Extrait :
Introduction
Ce titre indique son périmètre : «fonction phallique» n'est pas de Freud, mais de Lacan, qui emploie le terme de fonction dans son sens mathématique et plus précisément dans le sens que lui a donné le logicien Frege. Le cursus examiné va donc de Freud à Lacan, sans ignorer, entre les deux, le remarquable positionnement de Melanie Klein. Il ne s'agit cependant pas de seulement recenser les énoncés psychanalytiques concernés, encore moins de prétendre à un travail d'histoire épistémique tel que Koyré ou Canguilhem nous ont en laissé le modèle inégalé, mais de proposer une lecture, historique et problématique, ne reculant pas devant le risque de l'interprétation sans lequel une lecture reste unidimensionnelle et sans conséquence. Le lecteur repérera ces risques, quelquefois infimes, quelquefois grands, mais j'en veux donner deux exemples extrêmes. Le risque mineur d'abord : Freud, cela irait sans dire si l'on n'avait pu lire ici ou là que le phallus est le symbole du pénis, défend la thèse que le phallus, s'il est un symbole, est celui de l'absence de pénis. On mesure que le pas n'est pas si large avec ce sur quoi insiste Lacan, à savoir que le phallus est un signifiant du défaut de symbole, par quoi Lacan traduit, dans son «retour à Freud», le fait que le féminin n'est pas représenté dans l'inconscient. Le risque majeur maintenant, qui n'est pas d'ailleurs sans rapport avec le mineur, dans la mesure où il tire la conséquence de ce qu'il y a un phallus pour deux sexes, l'un n'étant pas sans l'avoir, l'autre sans l'être : la jouissance dite phallique n'est pas spécifique de l'homme, ni du névrosé, elle est la jouissance dont nous pouvons plus ou moins disposer à partir de ceci que la jouissance qui serait absolue ne peut être que la mort, et, solidairement, à partir de ceci que, parlants ou non, nous habitons le langage. Dès lors il n'y a pas à poser une jouissance primaire, qui correspondrait à un pseudo état prélangagier. On voit, à cet égard, que le débat si vif des années 1930 sur la phase phallique, débat dans lequel Freud n'eut pas toujours le dessus puisque même Jones, le fidèle parmi les fidèles, ne fut pas sur la même longueur d'onde que son maître, n'est pas vraiment clos.
Présentation de l'éditeur :
À partir d'une recension des écrits de Freud, de Lacan et d'autres, dont Melanie Klein, sur le phallus, les auteurs présentent un historique problématisé de ce concept central en psychanalyse et un état actuel de la question.
Étant donnés les conflits d'interprétation entre psychanalystes concernant le phallus, ils n'ont pas reculé devant l'exposé de ces contradictions (cf. notamment la «querelle du phallus») ni devant une prise de position dans ce débat. Ils distinguent ici jouissance phallique et signification phallique, critiquent la thèse d'une jouissance primaire pré-phallique et élucident ce qu'entend Lacan par jouissance féminine.
Cet ouvrage s'adresse bien entendu aux psychanalystes de tous horizons, mais aussi à tous ceux (analysants et étudiants) qui sont concernés par la psychanalyse et souhaitent mettre à l'épreuve leur compréhension du savoir qu'elle suppose et qui est une boussole dans la pratique analytique.
Pierre bruno est psychanalyste à paris, membre de l'association de psychanalyse Jacques Lacan (APJL). Dernier ouvrage paru : Lacan passeur de Marx, érès, 2010.
Fabienne Guillen est psychanalyste à Toulouse.
Cet ouvrage est issu d'un travail collectif auquel ont participé Pierre Bruno, Fabienne Guillen, Dimitris Sakellariou et Marie-Jean Sauret.
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