Opera Wonyosi - Couverture rigide

Soyinka, Wole

Couverture rigide

ISBN 10 : 0253134358 ISBN 13 : 9780253134356

Editeur : Indiana Univ Pr, 1981

A propos du livre

Extrait :

Extrait de l'avant-propos

Depuis qu'Opéra Wonyosi a été écrit et mis en scène en décembre 1977, le continent africain a été débarrassé de deux dictateurs particulièrement abjects et brutaux qui figurent dans cette pièce : le «président à vie» Idi Amin Dada et l'«empereur à vie» Jean-Bedel Bokassa. Un troisième, pas moins odieux et sanguinaire, le «président à perpète» Macias Nguema, de Guinée équatoriale, n'a pas été seulement écarté du pouvoir : la corde du bourreau lui a donné la fin qu'il méritait. L'année 1979 a été désastreuse pour les mutants moraux et politiques que le continent a engendrés et une mise en garde pour ceux qui ont réussi à survivre à cette «année de la purge» sans précédent.
Mais comment sont-ils arrivés à rester si longtemps au pouvoir ou pourquoi y sont-ils toujours ?
Essentiellement par la connivence active et les jeux de protection mutuelle d'autres titulaires des sièges de pouvoir tout aussi coupables (ou presque) sur le continent. Dans certains cas, il y avait méconnaissance réelle, soigneusement alimentée par les rapports truqués de leurs représentants diplomatiques nationaux dans les différents pays, des élites expatriées motivées par leurs petits intérêts personnels. Assidûment courtisés par les agents de pouvoirs répressifs de pays comme l'Ouganda, flattés, bichonnés, privilégiés et coupés avec leur assentiment des réalités de la nation et des misères dont ils se régalaient, ces entremetteurs fournissaient à leur gouvernement des rapports élogieux sur les monstres auprès desquels on les avait affectés et rejetaient les clameurs de protestation des peuples en n'y voyant que des rumeurs orchestrées par l'Occident pour jeter le discrédit sur les vrais héros du nationalisme africain.
Je me souviens, avec honte et dégoût, d'un haut fonctionnaire de l'OUA [Organisation de l'unité africaine] que j'avais rencontré à Addis-Abeba au début de 1977 et qui repoussait ces accusations sans aucun état d'âme. Chaque fois qu'on exigeait de lui, et d'autres comme lui, qu'il fasse son devoir en disant la vérité à ses maîtres et à son peuple sur la situation ougandaise, il n'avait qu'une seule réponse : Idi Amin Dada était un Africain sympathique, spirituel et sans prétention dont la générosité ne pouvait jamais être prise en défaut. Invité par Amin, il venait juste de rentrer d'une visite de trois jours en Ouganda, où, insistait-il, on lui avait «carrément laissé la liberté du pays». Ses horizons ne s'étendaient pas au-delà de cette expérience personnelle très privilégiée. Prenons bonne note de l'existence de ceux qui comme lui façonnent l'opinion publique «bien informée».
Prenons bonne note aussi d'une autre catégorie, dont le sophisme si facilement écrase, engourdit ou dispense de toute obligation de s'engager, ne serait-ce que par la parole, auprès des victimes de telles anomalies inhumaines. Pour ces observateurs «objectifs» de la société, les Bokassa, les Nguema de ce monde n'existent pas sauf comme produits de conditions socio-économiques spécifiques. Cette anomalie de l'esprit critique des néo-marxistes africains méritera une attention plus approfondie là où il se doit ; pour l'instant, il suffit d'affirmer qu'il faut faire la distinction entre les phraseurs et les opportunistes d'un côté et ceux qui sont sincères mais obsédés de théorie de l'autre. Le médium d'un genre littéraire comme Opéra Wonyosi sera réservé aux premiers tandis que nous essaierons de «dialoguer» avec les derniers quand l'occasion l'exigera. Nos répliques reposeront sur notre préoccupation sans faille pour les valeurs sociales de la littérature, la reconnaissance de ses limites et de ses potentialités et l'affirmation que le rôle de l'écrivain est d'être complémentaire à celui du politicien, du sociologue, du technocrate, de l'ouvrier, de l'idéologue, du prêtre, de l'étudiant, du professeur etc. et non d'usurper un ou tous ces rôles intégralement sans perdre ce qui fait le propre de sa vocation.

Présentation de l'éditeur :

«Tu ruines ton voisin au quotidien
Tu étouffes les consciences par le gain
Et puis les dimanche et vendredi
Tes frasques de la semaine tu renies
Et remets tes coups bas au lendemain»

Ainsi va la chanson d'Anikura, le roi des Mendiants d'Opéra Wonyosi, pièce créée en 1977 au Nigeria quelques années après la fin de la guerre civile, lorsque la manne pétrolière s'était transformée en malédiction avec son cortège d'excès, de luxe tapageur et de violence. Librement adaptée de L'Opéra de quat'sous de Bertolt Brecht (1928) et de L'Opéra du gueux de John Gay (1728), cette pièce de Wole Soyinka est une satire décapante de l'arrivisme, de la corruption et des abus de pouvoir d'une société obnubilée par les pétrodollars et par le wonyosi, étoffe d'un prix exorbitant portée comme symbole de réussite par les «en-haut-de-en-haut».

Wole Soyinka est né à Abeokuta, au Nigeria. Dramaturge, metteur en scène, acteur, poète, essayiste, romancier, il a reçu le prix Nobel de littérature en 1986.

À propos de cette édition

• Éditeur: Indiana Univ Pr
• Date d'édition: 1981
• ISBN 10: 0253134358
• ISBN 13: 9780253134356
• Reliure: Relié