Extrait :
Je vends le meurtre, la mutilation, le désastre. Et ce n'est pas tout : je vends la tragédie, la vengeance, le chaos, le destin. Je vends les souffrances des pauvres et les vanités des riches. Les enfants qui tombent des fenêtres, les rames de métro qui flambent, les violeurs qui s'éclipsent dans la nuit. Je vends la colère et la rédemption. Je vends l'héroïsme musclé des pompiers et la poussive cupidité des chefs de la mafia. La puanteur des ordures, les espèces sonnantes et trébuchantes. Je vends le Noir au Blanc et le Blanc au Noir. Aux démocrates, aux républicains, aux anarchistes, aux musulmans, aux travestis, aux squatters du Lower East Side. J'ai vendu John Gotti et O. J. Simpson et les poseurs de bombes du World Trade Center, et je vendrai tous ceux qui suivront. Je vends le mensonge et ce qui passe pour la vérité, et tout le spectre des nuances qui les séparent. Je vends le nouveau-né et le mort. Je revends la misérable et splendide ville de New York à ses habitants. Je vends des journaux.
Le maire me lit au petit déjeuner, les vendeurs d'obligations qui prennent le train dans le New Jersey me feuillettent, idem pour les dockers italiens à la retraite qui mâchent leurs cigares éteints sur leurs porches à Brooklyn, les infirmières qui vont en bus de Harlem au Lenox Hill Hospital. Les types de la télé me lisent, et parfois me volent mes histoires. Les Pakistanais qui attendent dans leur taxi devant Madison Square Garden, et qui, bien décidés à déchiffrer l'Amérique, lisent tout. Les jeunes avocats, le midi, pendant leur pause du déjeuner, après avoir parcouru les publicités vantant les boîtes de strip-tease. Les portiers des immeubles de l'East Side, qui lèvent les yeux chaque matin quand passent en coup de vent les femmes d'affaires, brillamment happées par leur avenir. Et les flics - tous les flics me lisent pour savoir si j'ai bien écouté ce qu'ils m'ont dit.
Présentation de l'éditeur :
Meurtres, accidents, drames en tous genres... Porter Wren, chroniqueur de faits divers dans un tabloïd new-yorkais, est un habitué des turpitudes quotidiennes de l'humanité. Mais en observateur prudent, il s'est toujours gardé de s'embarquer dans le type d'histoire qu'il raconte. Jusqu'au jour où il est abordé par une séduisante jeune femme, la veuve d'un cinéaste en vogue dont le meurtre n'a jamais été élucidé. Elle détient des secrets. Il n'aurait jamais dû accepter de les partager... À mesure que se noue ce drame étouffant, Colin Harrison révèle un à un les fils mystérieux qui, nulle part comme à New York, relient les bas-fonds les plus sordides aux sphères les plus élevées de la réussite." Roman noir, roman de mœurs au propos et à la perspective morale d'une grande ambition, Manhattan nocturne est le récit d'un engrenage mortel, un labyrinthe poisseux tendu sur le mystère d'un homme à la curiosité malsaine, catalyseur de toutes les peurs et de toutes les angoisses de son époque. " Le Monde
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