Louis voulait devenir administrateur colonial. Ou était-ce l'ambition de sa mère, Marguerite, bien avant l'existence de l'École coloniale ? À force de lectures boulimiques, entre deux aventures amoureuses, Louis fut enfin reçu, Marguerite enfin comblée. Mais, malgré l'année d'adieu effectuée auprès de la famille Orsenna, les pays lointains tant convoités devinrent soudain effrayants et Louis refusa de partir... c'est donc son fils Gabriel, oui, le Gabriel même de
Grand Amour et de
Longtemps, qui dut incarner le rêve de sa grand-mère. Dans la veine ironique et picaresque qui est la sienne, Erik Orsenna raconte Gabriel, son double, l'enfance à Levallois, l'amour pour Ann et Clara, qui firent de sa vie une exposition coloniale : "Un faux empire, des rêves trop grands, un spectacle pour les familles."
L'Exposition coloniale reçut le prix Goncourt en 1988. Dix ans plus tard, après avoir été éditeur et conseiller de François Mitterrand, Erik Orsenna est maître de requêtes au Conseil d'État, président de l'École nationale du paysage, académicien et... écrivain ! --Laure Anciel
Je m'appelle Gabriel. Je suis né en 1883 à Levallois, capitale des chevaux. Louis était mon père, très gourmand de mariages. Moi, depuis plus d'un demi-siècle, j'aime deux soeurs, Ann et Clara. Grâce à elles, ma vie aura ressemblé à une Exposition coloniale. Grâce à elles, j'aurai connu l'Amazonie, Belem do Para, le positivisme, le port de Londres, la course automobile, la vie secrète de Clermont-Ferrand, les belles amies de Freud, le visage hideux du Vélodrome d'Hiver, la vieille Hué... Et tant d'autres curiosités. Ann et Clara m'auront appris des vérités insoupçonnées, par exemple que le caoutchouc ressemble à la démocratie, que sans bicyclettes jamais nous n'aurions perdu Diên Biên Phu, ou que les chagrins d'amour sont plus doux que la jungle...