Extrait :
Extrait du prologue
Lyon, le passé
Elle est là, carcasse inerte gisant sur le pont hydraulique de ce garage clandestin de la banlieue lyonnaise ; un monstre de métal et de plastique aux flancs lourds et au moteur trafiqué. Parfait pour les Go Fast. «Ils» auraient dû rabattre la porte basculante, mais la température caniculaire les en a découragés.
C'est une erreur.
Il vaut mieux transpirer que saigner.
Je consulte ma montre, il ne me reste que peu de temps avant que les autres arrivent avec leurs gyrophares, leurs sirènes hurlantes et tout le bordel. Je passe la main par-dessus le portail, soulève le loquet et pousse le battant le plus silencieusement possible. Ça grince à peine. A l'allée de gravier, je préfère le bas-côté en terre. Plus discret. Partout sur le terrain devant le pavillon transformé en atelier de mécanique, des carcasses abandonnées de bagnoles pourrissent, l'huile de vidange et l'acide de batterie suintant de leurs entrailles, faisant des trous dans la mauvaise herbe. «Ils» sont là et «ils» n'ont rien entendu, occupés qu'ils sont à démonter le capot de la voiture. La calandre et le pare-chocs avant ont déjà été déposés.
Le molosse, lui, m'a repéré. C'est un bâtard de rottweiler, le poitrail large et musclé. Sa robe noir et fauve est constellée de cicatrices dont certaines sont récentes. «Ils» doivent le faire combattre dans les caves clandestines des cités avoisinantes.
Par chance, il est à l'attache, une chaîne à gros maillons enserrée dans le châssis rouillé d'une Renault 11. Il bondit sur ses pattes, ses babines se retroussent, dévoilant un véritable piège à loup de crocs jaunâtres.
Un grondement sourd, caverneux.
J'avance tout doucement, pas à pas, en portant à mes lèvres un index dérisoire.
«Chut !» je souffle tout en sachant combien je suis pathétique. Le chien tourne sa grosse tête vers ses maîtres. Comme «ils» ne réagissent pas, le monstre se met à aboyer. «Ils» lèvent enfin la tête et me repèrent instantanément. Je me fige. «Ils» échangent un regard et sortent du garage en jetant des coups d'oeil inquiets aux alentours. Normal vu ce qui se trouve sur le pont. Eddy le géant essuie nerveusement ses grosses pognes pleines de cambouis sur un chiffon. Steve, le gringalet, s'approche du fauve qui aboie de plus belle, l'écume à la gueule. Le chien bondit vers moi, les yeux fous. La chaîne se tend, prête à rompre, et le squelette de la voiture tressaute à chaque impulsion.
- Qui t'es, le négro ? demande Steve.
- Tu vois pas que c'est un Schmidt, bordel ! beugle Eddy.
- Si c'est un Schmidt, pourquoi il est seul ?
Perplexe, le mastard reste sans voix. Un petit sourire ravi sur ses traits cauteleux, Steve entreprend de défaire le mousqueton qui retient le monstre.
Présentation de l'éditeur :
Viré des stups en France, Solo vivote comme détective à Bamako, capitale du Mali, en noyant ses souvenirs dans l'alcool. Une jeune touriste, qu'il avait aidée à sortir de la prison où elle croupissait pour trafic de cocaïne, est retrouvée égorgée. Solo veut comprendre pourquoi, comme il veut comprendre pour quelle raison quelqu'un s'attaque à ses proches. Tandis que les cadavres se multiplient, il se lance à la poursuite des assassins à travers ce pays de chaleur, de poussière et de violence... «Avec une écriture énergique, Laurent Guillaume compose une sorte de hard-boiled du Sahel, gangréné par la corruption et inspiré de faits divers réels.» Alibi
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