Extrait :
Extrait de l'introduction
Enfant puis adolescent, j'avais un rêve, tenace, celui d'un jour traverser un pays dont on disait pourtant beaucoup de choses effrayantes : terre de goulag, enfer glacé, désert de roc et de neige, froidure mortelle... La liste est longue des termes employés et répétés par tous les voyageurs et autres déportés pour décrire cette terre des extrêmes : la gigantesque et fascinante Sibérie. Elle me faisait rêver parce qu'elle était inaccessible, interdite aux étrangers. Et moi, j'étais un enfant attiré par ce qui se cache derrière la seule porte de la maison fermée à double tour... Mais, si braver l'interdit a contribué à nourrir ma fascination pour la Sibérie, il faut chercher ailleurs les véritables fondements de cette passion. Sauvage, démesuré, extrême et mystérieux : voilà les adjectifs que je retenais de ce pays, au fur et à mesure que je dévorais tous les livres que je pouvais me procurer sur ces contrées lointaines.
Puis, après la mort de Brejnev, Gorbatchev et la Perestroïka sont arrivés et le pays a commencé à s'ouvrir, tout doucement. Je me suis rué dans la brèche avec l'opiniâtreté qui me caractérise quand il s'agit de donner corps à mes rêves. Je suis de ceux qui préfèrent vivre leurs rêves plutôt que de rêver leur vie...
Mais, malgré la Perestroïka et ses promesses d'ouverture au monde, les autorités m'ont clairement fait comprendre que le projet que je dessinais sur une carte était irréalisable. Je voulais traverser, de part en part, du sud au nord, la Sibérie interdite : celle des goulags et des déportations en tout genre. L'ambassadeur de l'URSS de l'époque, harcelé et excédé par mes demandes réitérées, m'a finalement envoyé au diable en m'avertissant que même le ministre des Affaires intérieures n'avait pas le pouvoir ni l'autorité pour délivrer une autorisation de la sorte, encore moins à un étranger !
Qu'à cela ne tienne, me suis-je dit. Mikhaïl Gorbatchev détient ce pouvoir-là ! Il ne me restait plus qu'à le contacter. Ce qui n'est pas simple quand on est, comme je l'étais alors, inconnu et dépourvu de relations, à quelque échelon que ce soit, au sein des gouvernements français et soviétique.
Pourtant, en cherchant bien, je trouvai quelqu'un qui connaissait quelqu'un qui connaissait... le président François Mitterrand. En voisin, puisqu'il habitait Château-Chinon, son fief. J'y allai au culot, traversant dans ma vieille 4L une grande partie de la France pour le rencontrer et lui raconter mon rêve. Cet ami de François Mitterrand s'était imposé une règle : ne jamais utiliser sa relation avec le Président pour servir ses intérêts ou ceux de ses amis. Mais il fit, pour moi, une exception.
J'envoyai une lettre au Président, qui me fit recevoir par l'un de ses conseillers à l'Elysée. S'ensuivit un coup de téléphone de François Mitterrand à Mikhaïl Gorbatchev qui m'autorisa, en personne, à réaliser le rêve impossible : traverser pendant un an et demi la Sibérie (avec de surcroît un port d'arme : inimaginable à l'époque), depuis la Mongolie jusqu'à l'océan Arctique. Sept mille kilomètres de taïga, de toundra et de montagnes.
Biographie de l'auteur :
À vingt ans, il fait une expédition à pieds dans les vastes plateaux de Laponie. Son aventure dans le Grand Nord québécois en traîneau fera l'objet de nombreux livres et trois longs métrages pour le cinéma.
En 2000, il met en place une association, " Les fauteuils glissants ", afin de rendre possible aux personnes handicapées moteur la pratique du traîneau à chiens. Aujourd'hui, il veut en quelque sorte rendre à la nature tout ce qu'elle lui a donné. Il y a du travail !
C'est à cela que ses rêves de films, de voyages, de livres vont maintenant être consacrés.
Les informations fournies dans la section « A propos du livre » peuvent faire référence à une autre édition de ce titre.