Si vous désirez savoir ce qui distingue vraiment un Botticelli d'un Cézanne, un Degas d'un Picasso, voici le livre qu'il faut avoir lu. En s'appuyant sur l'analyse de trois moments clés de l'histoire de l'art occidental : la Renaissance, l'Impressionnisme et le premier XXe siècle, l'auteur démonte point par point les thèses traditionnelles qui expliquent les révolutions picturales par des inventions techniques. Il prouve que les artistes sont les "passeurs" d'un état de civilisation vers un autre, précédant parfois mais ne reflétant toujours que des mutations collectives, celles de sociétés tout entières qui changent leur regard sur les choses. Loin de diminuer le génie de peintres que Francastel admire comme des "magiciens", cette théorie confère une dimension nouvelle aux oeuvres d'art. Elles deviennent "signes" que l'auteur nous propose de lire et d'interpréter.
Les quelque soixante-dix chefs-d'oeuvre illustrant le propos sont tous assortis d'une lumineuse notice explicative qui achève de convaincre le lecteur profane de la subtilité d'une thèse qui a renouvelé le genre. --Stéphane Pares
On comprend ainsi l'originalité du projet scientifique que Francastel définit comme celui d'une " sociologie historique comparative ". Il s'agit, très exactement, qu'on cesse de considérer l'art comme le luxe des sociétés avancées ou comme un ensemble de " curiosités ", exotiques ou non. L'art n'est pas un objet de jouissance, de délectation esthétique pour les hommes de goût. C'est une formation sociale qui engage à la fois la pensée et l'action humaine. C'est un mode de communication et de transformation du monde, irréductible à tout autre.