Une liaison philosophique - Couverture souple

Sibony-Malpertu, Yaelle

Couverture souple

ISBN 10 : 2234070198 ISBN 13 : 9782234070196

Editeur : Stock, 2012

A propos du livre

Extrait :

Extrait de l'avant-propos

Thérapeutique cartésienne de l'union de l'âme et du corps

À l'origine de ce livre se trouvent des interrogations cliniques. Et ce constat : des individus souffrent d'être réduits à des corps lorsqu'ils ont des maladies somatiques, et à des esprits lorsqu'ils ressentent des difficultés psychiques. Culturellement, cette dichotomie entre l'esprit et le corps est souvent rattachée à l'héritage cartésien, plus particulièrement à sa distinction de l'âme et du corps. En cherchant à approfondir la pensée cartésienne et à comprendre le sens de ce dualisme, on aperçoit, en marge des textes les plus célèbres de Descartes, comme le Discours de la méthode ou les Méditations métaphysiques, d'autres textes dont on ne peut minimiser l'importance. Il en est ainsi des lettres de sa correspondance avec Elisabeth de Bohême, princesse palatine. Qu'elles soient signées par Descartes ou par la princesse, celles-ci abordent les symptômes d'un individu en souffrance en introduisant une notion : «l'union de l'âme avec le corps».
Descartes considérait qu'il ne fallait pas systématiquement séparer l'âme du corps, et que c'était une erreur de le faire'. Dès lors, comment aborder la subtile articulation du dualisme à la pensée de l'union de l'âme avec le corps ? Et dans le même sens, comment comprendre les «reproches» qui ont a posteriori été adressés à Descartes, du fait qu'il n'ait pas explicitement développé de «médecine» ?
Le dualisme se situe dans un contexte précis que complète, dans une autre perspective, la pensée de l'union de l'âme et du corps. La correspondance avec la princesse Elisabeth est un barrage contre la systématisation de la pensée de Descartes (sa réduction à une quête d'objectivité, le dualisme de l'âme et du corps, à l'omnipotence de la volonté, au rationalisme poussé à l'extrême, etc.). Aborder à la lumière de ces lettres certains aspects de la métaphysique permet de mieux comprendre les liens du projet cartésien avec la vie. De plus, la manière dont Descartes aide Elisabeth à dépasser et surmonter symptômes, meurtrissures et traumatismes, ne peuvent manquer d'intéresser, à titre individuel mais aussi clinique. Il est vrai qu'il construit là une pratique thérapeutique ponctuelle, destinée à soigner une personne particulière, la princesse Elisabeth. Celle-ci souffre de maux complexes, de somatisations liées aux événements traumatiques qui se sont succédé dès son enfance. Descartes ne cherche pas à diffuser telle quelle la démarche qu'ils accomplissent ensemble. C'est pourquoi l'affirmation qu'«on pourrait tirer de la correspondance toute une thérapeutique» est d'autant plus pertinente dans une approche tant physique que psychique du sujet. Avec les termes qui étaient d'usage à leur époque, Descartes et Elisabeth n'hésitent pas à affronter les difficultés de cette articulation du corps avec l'âme, à interroger les supposés savoirs, les situations limites, à préférer la réflexion au consensus, à aborder les aspects délicats et problématiques de leur pensée.
Ce qui relève de la clinique, c'est-à-dire de la manière spécifique et unique dont quelqu'un vit un événement traumatique ou développe une pathologie, ne peut faire l'objet d'une maîtrise totale ni d'un protocole a priori infaillible. Descartes n'a pas prétendu élaborer un système thérapeutique exhaustif qui occulterait ou mettrait au second plan l'individu. Le cheminement et l'engagement thérapeutiques de Descartes avec Elisabeth peuvent pour cela être mis en résonance avec la relation thérapeutique que l'on a avec certains patients. Leur relation interpelle et enrichit au niveau éthique ceux qui s'investissent dans un travail psychothérapeutique. Le souci pragmatique d'aider Elisabeth à aller mieux, à se remettre de ses chocs émotionnels qui sont autant d'atteintes à son intégrité psychique et physique, amène Descartes à dépasser le cartésianisme qu'Elisabeth entend a priori se voir administrer. (...)

Présentation de l'éditeur :

Cet ouvrage analyse la dimension thérapeutique qui sous-tend l’ensemble de la Correspondance entre Descartes et la princesse Élisabeth, fille aînée du roi déchu Frédéric V de Bohême – aussi surnommé « roi d’un hiver ». Sur fond d’exil aux Pays-Bas, l’un pour se libérer de tout carcan social, l’autre à cause de la guerre de trente ans, Descartes et Élisabeth cherchent ensemble quelles réactions avoir face aux événements traumatiques de l’existence et comment se les approprier en tant que sujets. Descartes met en pratique sa théorie du « contentement », et va jusqu’à dévoiler à la princesse les secrets de son équilibre physique et psychique. Quant à Élisabeth, c’est une femme qui a le courage d’affronter ses symptômes en tâchant de les connaître, d’en comprendre le sens et les enjeux profonds. Sa sensibilité la pousse à une exigence intellectuelle accrue, qu’elle satisfait en partie grâce à sa rencontre avec Descartes à qui elle demande de l’aider à se guérir. Descartes lui permet d’accéder à elle-même, explicitant dans ses lettres non plus la notion de dualisme mais celle d’union de l’âme avec le corps, montrant dans quel registre penser le « vrai homme ».
Par leur honnêteté intellectuelle et le lien transférentiel qui s’établit, ils donnent accès à certains mécanismes des passions, abordent la complexité des liens intersubjectifs.
Élisabeth va conduire Descartes à élaborer sa théorie des passions en prenant appui sur le vécu ; leur union épistolaire donnera naissance au traité des Passions de l’âme.

À propos de cette édition

• Éditeur: Stock
• Date d'édition: 2012
• ISBN 10: 2234070198
• ISBN 13: 9782234070196
• Reliure: Broché
• Nombre de pages: 280