Oeuvres complètes, Tome 3: Eros, littérature et philosophie - Couverture rigide

Levinas, Emmanuel

Couverture rigide

ISBN 10 : 2246795176 ISBN 13 : 9782246795179

Editeur : Grasset, 2013

Synopsis

Si l'on connaît, à travers ses écrits sur Proust, Blanchot, Celan, l'intérêt qu'Emmanuel Levinas portait à la littérature, on ne soupçonnait peut-être pas, chez lui, l'existence d'une telle "pratique littéraire". Or, c'est ce que mettent en évidence les ébauches de roman (Eros ou Triple opulence et La Dame de chez Wepler), les notes et les poèmes qui composent ce nouveau volume d'inédits magnifiquement préfacés par Jean-Luc NancyAinsi, bien que Levinas ne soit jamais devenu à proprement parler écrivain, la passion littéraire a toujours été intimement mêlée à son projet philosophique. Levinas a vu dans la littérature le lieu peut-être le plus propre à la présentation de l'intrigue de l'autre et du rapport, de l'approche et du contact. Ecrits dès le début des années 1920, ces inédits nous font accéder à la genèse de l'oeuvre du grand philosophe. Ainsi de ces émouvants poèmes de jeunesse, rédigés en russe, en yiddish et en hébreu, alors que Levinas n'a qu'une quinzaine d'années. Ou, plus tard, ses deux esquisses de roman, qui témoignent sur le mode fictionnel de son expérience de la guerre. Levinas n'a pas été plus loin dans ses tentatives littéraires, mais le mouvement qui les portait n'a pas pour autant été effacé.

A propos du livre

Revue de presse :

Eros, littérature et philosophie est l'appellation donnée au troisième tome des Œuvres complètes, contenant des textes inédits qui peuvent être regroupés en trois ensembles : d'abord deux ébauches de romans, Eros ou Triste opulence et la Dame de chez Wepler, indiqués déjà par Levinas comme «mon oeuvre à faire» durant la période de captivité en Allemagne (1940-1945) et probablement rédigés dans les années 50 ; puis une série de Notes philosophiques sur Eros, dont la datation est malaisée ; enfin des poèmes et d'autres écrits de jeunesse en langue russe...
Que peuvent devenir dans ce monde cassé, où l'homme n'est que nudité, l'existence, la rencontre, l'être-avec-les-autres, la responsabilité vis-à-vis d'autrui, le respect du «visage» de tout autre, la «destination» de l'humanité ? Immense lecteur - Proust, Dostoïevski, Blanchot, Bloy, Sartre, Tolstoï, l'Arioste, Dante... -, Levinas considère que la littérature, apte à montrer, à rendre sensible, «ce dont la pensée fournit l'intellection», peut répondre à ces questions : il a, lui, répondu par son oeuvre philosophique, dont les germes, presque imperceptibles, sont assurément dans ses tentatives littéraires et poétiques. (Robert Maggiori - Libération du 5 décembre 2013)

Dans ce troisième volume d'inédits, l'originalité de la pensée d'Emmanuel Levinas se dessine à travers une réflexion philosophique sur l'altérité....
Comme le philosophe l'écrira ensuite dans Le Temps et l'Autre, la relation érotique est une «relation avec l'altérité, avec le mystère». Et le mystère d'autrui, ma responsabilité infinie. (Juliette Cerf - Télérama du 11 décembre 2013)

Extrait :

(Version continue)

Rondeau

- En somme le front se stabilise. On tient sur l'Aisne, on tient sur la Somme.
C'était l'heure des adieux. À la porte du bureau où interprète militaire d'une langue inutilisable, Rondeau avait passé à Paris, à de besognes sans importances, les neuf premiers mois de guerre, il serrait la main aux camarades et disait sa confiance.
Depuis trois semaines le front ne se stabilisait pas. La vieille terre de France est devenue du sable mouvant. Le pied n'arrivait à trouver nulle part un point d'appui. L'ennemi s'infiltrait a travers les crevasses invisibles du sol. Il ne venait pas d'une direction pour aller dans une autre en franchissant les intervalles. L'étendue se trouvait dépouillée de ses qualités les plus familières de continuité et d'ordre. C'était là le trouble étrange qui sur la figure de Rondeau penché sur les journaux se reflétait depuis trois semaines. Le cataclysme ne consistait pas seulement dans 'es malheurs des êtres, mais dans ce bouleversement du cadre même de la réalité. Que les communiqués de la guerre de 14 se faisaient regretter ! Là, à travers les horreurs de la boucherie, la pensée s'accrochait à une réalité qui lui ressemblait. On pouvait suivre les opérations sur une carte, déplacer dans un sens ou dans un autre les petits drapeaux, mesurer avec un bout de ficelle les progrès et les menaces. Les axes du monde demeuraient fixes. Dans l'anéantissement des personnes et des choses, l'espace du moins, le vieux, l'honnête espace demeurait intact.

À propos de cette édition

• Éditeur: Grasset
• Date d'édition: 2013
• ISBN 10: 2246795176
• ISBN 13: 9782246795179
• Reliure: Relié
• Nombre de pages: 384