Revue de presse :
Journal intime d'une jeune rebelle dans le Cuba de la guerre froide, ce premier roman de Wendy Guerra révèle une voix prometteuse...
Le journal de Nieve est une enclave de liberté et de poésie dans un pays muselé, un territoire où elle peut enfin échapper aux intrusions de la politique, recopier les vers de ses auteurs préférés avant d'y noter les siens. Dans la prose de Nieve, le temps file vite, comme dans un sablier. Le mur de Berlin s'effondre, on brandit la glasnost sur les décombres de l'URSS, mais à Cuba, les murs tiennent bon. Dès qu'ils le peuvent, les artistes embarquent pour le monde libre. Nieve aussi voudrait partir, elle et sa mère ont «les bras fatigués de dire adieu». Il n'existe qu'un ailleurs pour Nieve : son journal, qui a vu la naissance d'une jeune femme, d'une poétesse et d'une résistante. (Astrid Eliard - Le Figaro du 17 avril 2008)
Un témoignage sous la forme d'un journal par une jeune romancière cubaine qui a choisi la résistance...
On est frappé par l'authenticité de ce journal, composé sous l'étouffoir d'un régime où triomphe le mensonge : Nieve écrit d'abord avec la naïveté de son âge et puis, au fil des années, sa prose mûrit, gagne en rigueur et en lucidité politique...
Quand tout le monde s'en va, Wendy Guerra, elle, reste. Pour témoigner. Son livre est un acte de résistance. Et un pied de nez aux dinosaures castristes. (André Clavel - Lire, juin 2008)
C'est un voyage intérieur nourri des pensées, des sensations, des colères et des souffrances d'une petite fille qui espère grandir, devient adolescente, puis femme après une première nuit d'amour, son "baptême du feu". C'est aussi un voyage à l'intérieur d'une île magique et désolée, au régime absurde et brutal, Cuba. L'héroïne, la narratrice, s'appelle Nieve - la neige en espagnol. Drôle d'idée, alors que la seule neige qu'on connaisse là-bas est celle des téléviseurs à la fin des programmes. L'auteur, elle, se prénomme Wendy, comme la Wendy de Peter Pan, autre drôle d'idée sous le soleil des tropiques. Nieve et Wendy se ressemblent sûrement, mais qu'importe. Ce qui compte, c'est que Tout le monde s'en va, de la Cubaine Wendy Guerra, née en 1970, est un splendide roman. Son premier...
Tout le monde s'en va n'a pas été publié à Cuba, mais d'abord en Espagne, en 2006, où il a reçu le prix Brugera et où le quotidien El Pais l'a désigné "meilleur roman de l'année". Il a connu un énorme succès en Amérique latine. C'est lors d'une signature au Chili, en 2007, que Wendy Guerra a vu pour la première fois la neige : "J'en ai pleuré", nous a-t-elle confié lors d'un récent séjour à Paris. (Le Monde du 4 juillet 2008)
Extrait :
Laguna del Cura, Cienfuegos, Cuba, 1978
Ma mère a épousé un étranger, un Suédois qui travaille à la Centrale nucléaire.
Notre maison sur la lagune est remplie d'inventions bizarres, des cordes qui tirent sur des ficelles et qui, avec une ancre, remontent de la mer des chaudrons brillants. Ils ont été mis là pour que le sel les nettoie. Fausto, le mari de ma mère, est très beau, blond et grand. Il nage tout nu, marche tout nu, lit le journal tout nu. C'est toujours le même journal, le seul avec des lettres suédoises.
Les voisins nous apportent du poisson de contrebande et Fausto a beaucoup de mal à s'habiller. Ma mère le menace en disant qu'on va nous mettre en prison. Il passe un jean à franges tout déchiré.
Tous les voisins parlent de nous. On habite un quartier élégant où les maisons donnent sur la mer. D'autres, comme la nôtre, qui a été prêtée à Fausto par l'État, donnent sur la lagune. Ma mère ne veut pas que je m'attache à cette maison ni à aucune autre. On nous prête toujours tout, à vrai dire.
Les choses matérielles n'ont pas d'importance. Je vis donc comme si je n'avais pas de chez-moi. Mais j'aime ça et je nage l'après-midi dans le bras qui va de la lagune à la mer. Je jette ma mallette dans le patio, j'ôte mon uniforme, je le suspends au hamac et plouf, à l'eau.
Je suis un poisson dans le courant, il veut m'entraîner mais je résiste et je mets longtemps à revenir sur la plage. Je reste à flotter tranquillement, je me laisse porter là où il me pousse. Je suis un morceau de canot, du verre, une poupée cassée, un petit poisson d'eau douce qui bat des nageoires, flottant à la dérive. Jusqu'à ce qu'un goût salé m'indique que je dois faire attention parce que je suis dans la baie.
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