Un mot de l'auteur :
C'est Éric Vieljeux, directeur de 13e Note Éditions, qui a repéré ce livre aux États-Unis et, fidèle à sa passion pour les «odyssées humaines», a senti son potentiel. Le tandem Roberts (le gangster) & Wright (le reporter) avait toute sa place parmi les «auteurs extrêmes sous haute tension» publiés par la maison - notamment pour les passages hallucinants consacrés au Vietnam, quelque part entre Pas de saison pour l'enfer (2013) de Kent Anderson et Né un 4 Juillet (2014) de Ron Kovic. Le film Les Bérets verts, qui valut à John Wayne l'opprobre des bien-pensants en 1968, avait le mérite de rappeler une réalité sur laquelle Jon Roberts, peu soucieux de se justifier, n'insiste guère : les abominations qu'il a commises au Vietnam étaient communément perpétrées par le camp d'en face.
Le thème central du livre s'exprime dans la phrase suivante : «Une devise de mon père a dominé ma vie quand j'étais gosse : «le mal est plus fort que le bien - en cas de doute, choisis le camp du mal.»» Devise diamétralement opposée à celle du poète mystique français François Brousse (1913-1995) : «Le bien est plus fort que le mal car le mal finit nécessairement par s'autodétruire.» Toute velléité de scrupule est balayée dans ce bref dialogue entre le narrateur et son compagnon d'aventures, rentrés mal en point du Vietnam :
«- Peut-être que ça nous est arrivé en châtiment de tout ce qu'on a fait aux gens, là-bas...
- C'est possible, a répondu Steve. Et alors ? On a bien profité de chaque instant.»
Rock-and-roll !
Evan Wright y insiste dans ses e-mails, il s'est interdit d'enjoliver le personnage en le présentant comme une «victime de la société» : «Il n'en avait rien à foutre de la manière dont je le représentais. Jon ne se vantait pas de son amoralité, ni ne la dissimulait. Pour un mec venu de la rue, il était remarquablement objectif, semblant parfois se considérer lui-même comme une expérience scientifique.»
Leurs entretiens ont duré trois ans, pendant lesquels Wright s'est parfois demandé si l'amour du gangster vieillissant pour son fils n'était pas simulé dans le but d'atténuer la noirceur du livre. Le fait est qu'à la fin de sa vie, Jon, rongé par le cancer, ne parlait que de Julian au reporter. Incertain de l'origine de sa propre violence (génétique ? sociale ?...), il craignait que son fils en hérite.
Les gens courageux ne sont pas toujours gentils, ni les gentils toujours courageux. Peut-être Jon Roberts fera-t-il l'expérience de la gentillesse dans une prochaine existence, s'y étant exercé à l'issue de celle-ci en découvrant l'amour via la paternité ?
Sous la pression des avocats de l'éditeur américain, Evan Wright a écarté certains épisodes de son manuscrit, notamment le viol d'un codétenu par Jon pendant son incarcération, et une soirée au cours de laquelle Jon battit presque son pitbull à mort devant Julian et Evan Wright - «afin de donner une leçon à son fils».
Dans les réimpressions de la version française, 13e Note a dû modifier le nom d'un juge qui «se poudre le pif» en compagnie du gangster.
La traduction de ces Mémoires en français n'a pas posé de problème majeur. Naturellement, Jon Roberts ayant eu autant de vies qu'un chat sauvage, il a fallu se familiariser avec le vocabulaire plus ou moins spécialisé de divers milieux, très différents les uns des autres.
En guise de conclusion, ce lien vers un tube de Starbuck, manne d'accords disco tombée en 1976 sur les States en général et Miami en particulier à l'époque où les cocaine cowboys y régnaient en maîtres - et en seigneurs. Le chanteur, ce qui ne gâte rien, est le sosie maigrichon de Jon Roberts :
http ://www.youtube.com/watch ?v=oCuQQcISZTM
Rien de tel qu'un clair de lune tamisé pour importer des tonnes d'héro colombienne au nez et à la barbe des garde-côtes : «Moonlight feels right...»
Patricia Carrera, traductrice de l'ouvrage
Revue de presse :
Le journaliste Evan Wright a eu le privilège d'écouter Jon Roberts, criminel endurci, raconter sa vie. Résultat : l'incroyable mais vrai " American Desperado ". Jon Roberts est mort en 2011, à peine trois mois après la parution, aux Etats-Unis, de ses Mémoires, American Desperado, coécrits avec le reporter et romancier Evan Wright. Son CV criminel a de quoi impressionner les amateurs les plus endurcis des films de gangsters : braquages, rackets, tortures, assassinats, arnaques en tout genre, trafic de drogue à grande échelle pour le cartel de Medellín... En parcourant son autobiographie, on croit revivre des scènes du Parrain et de Scarface...
Dans American Desperado, Jon Roberts s'est livré avec une rare franchise : son ascension au sein de la pègre new-yorkaise dès la fin des années 1960, les meurtres ayant précipité son exil à Miami, la sophistication des moyens mis en oeuvre avec ses associés pour berner les autorités pendant plus de dix ans (aérodromes secrets, bornes d'écoute pour espionner les communications des gardes-côtes, balises à longue distance équipant les bateaux, avions capables de voler très bas, sous les radars), lorsqu'il assurait la logistique du transport de drogue pour les Colombiens. Il raconte aussi son accord secret avec la CIA pour convoyer des armes aux Contras qui combattaient le gouvernement sandiniste au Nicaragua... Wright s'est interdit de glorifier comme de " moraliser " le personnage ou la trajectoire de Jon Roberts...
Courant des années 1960 aux années 1990, lorsque la drogue coulait à flots et que les Etats-Unis menaient en sous-main ses guerres sales en Amérique du Sud, cette fresque est en voie d'adaptation au cinéma. (Macha Séry - Le Monde du 31 octobre 2013)
Ames sensibles, passez votre chemin, ce livre est plus gore qu'un film de Tarantino, mais aussi plus palpitant que tout autre roman de gangsters...
Ecrit avec Evan Wright, un journaliste américain qui a pu longuement rencontrer Jon Roberts avant sa mort en 2011, le récit de la vie absolument décadente de Roberts en apprend plus sur le fonctionnement de la mafia américaine que n'importe quel documentaire sur Lucky Luciano : une mine d'informations racontées sur le ton du badinage, les confessions d'un malfrat pas du tout repenti mais surtout le récit désopilant d'une vie menée à l'encontre de tout politiquement correct. Jon Roberts, né Riccobono, voit le jour en 1948 dans le Bronx et grandit dans le crime comme d'autres dans la soie...
Psychopathe autoproclamé, Jon Roberts est un personnage profondément iconoclaste, mais surtout hilarant. «Bryan était excessif. Un jour, il a forcé un type à manger son arme», confie-t-il ainsi au sujet de son associé. C'est ce mélange d'horreur et de détachement qui fait tout le sel d'un livre qui aurait pu tourner à l'énumération de faits d'armes pour rappeurs apprentis- gangsters. Au lieu de quoi, American Desperado fait se rencontrer Woody Allen et Tarantino, Oliver Stone et Michel Audiard. (Clémentine Goldszal - Les Inrocks, décembre 2013)
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