Extrait :
Extrait de la préface
Le Comte de Monte-Cristo est, avec Les Trois Mousquetaires, le roman le plus célèbre d'Alexandre Dumas. Connu et adapté dans le monde entier, on peut dire qu'il connaît toujours le même succès de nos jours et qu'il traverse toutes les générations comme il a déjà traversé toutes les frontières.
Cela peut se comprendre aisément : quand on songe un instant au résumé de l'intrigue, on s'aperçoit à quel point cette histoire aurait pu être écrite de nos jours. Un jeune homme, victime de l'avidité, de la jalousie et de l'ambition de trois autres, se retrouve injustement enfermé en prison durant quatorze ans. Il finit par s'évader et par trouver un extraordinaire trésor qui fait de lui un nabab digne des Mille et Une Nuits, mais aussi un capitaliste qui va user de sa puissance pour assouvir sa vengeance. Du reste, ses adversaires sont devenus entre-temps un sénateur, un banquier et un procureur de justice. Si Dumas avait vécu de nos jours, il y a fort à parier que son Dantès moderne aurait eu exactement les mêmes adversaires : les représentants de la politique, des finances et de la justice.
Mais la raison du succès de ce roman n'est pas seulement l'intrigue qui fait courir le lecteur haletant d'un bout à l'autre des 117 chapitres qui le composent : on n'a d'ailleurs jamais contesté à Alexandre Dumas son talent à développer toutes sortes d'intrigues à un rythme effréné. Non, cette oeuvre ne vieillirait pas aussi bien s'il ne s'agissait pas également d'un véritable monument littéraire, véhiculant toutes sortes d'images et d'idées, véritable carrefour de tous les genres à la mode à cette époque charnière (les années 1840), mais aussi des morceaux de bravoure quant au style de son auteur, trop souvent et toujours injustement méprisé comme écrivain. Après son entrée au Panthéon en 2002, année de son bicentenaire, cette préface est une autre occasion de le réhabiliter.
Une série d'expériences littéraires avant Monte-Cristo
Lorsqu'en 1843 Alexandre Dumas rédige Le Comte de Monte-Cristo, cela fait déjà vingt ans qu'il écrit et quinze qu'il édite toutes sortes de textes. Il publie ses Nouvelles contemporaines en 1826 (lesquelles ne se seraient vendues qu'à quatre exemplaires) ; suivent des poésies, nouvelles, essais, articles et, surtout, pièces de théâtre. En 1828, Dumas met le drame au goût du jour avec Henri III et sa cour, rédigé en deux mois. Premier succès, premier rendez-vous aussi avec l'Histoire mise en scène. Dumas écrit dès lors avec frénésie de nombreuses autres pièces, telles qu'Antony (1839), Charles VII et ses grands vassaux (1831), La Tour de Nesle (1832) et Kean ou Désordre et Génie (1836), date importante dans l'économie générale de l'oeuvre puisque notre dramaturge y aborde le thème de «l'homme différent - voire au-dessus - des autres» : thème prédominant dans Monte-Cristo. Entre-temps, en 1834, Dumas rédige ses premières Impressions de voyages, qui concernent alors la Suisse, mais l'Italie ne va pas tarder : plusieurs de ses futures annotations vont lui permettre d'aborder nombre de romans, avant d'être récupérées dans Monte-Cristo.
Car en 1836, après l'échec de Caligula, pièce dont la rédaction succède à celle de Kean, Dumas comprend que la vogue du théâtre dramatique et historique commence à s'essouffler, en tout cas en ce qui le concerne. À l'aube de la quarantaine, il sent qu'il va lui falloir changer de genre littéraire. Et, à de nombreuses reprises, Dumas prouvera sa capacité à se renouveler ou, au contraire, à retrouver et à faire partager de nouveau ses thèmes favoris.
C'est en 1838 que commence réellement la carrière romanesque de Dumas, avec une série d'ouvrages dont on retiendra surtout Pauline. Pas seulement parce que l'Italie y paraît dès les premières pages, mais surtout parce que Dumas utilise un type de personnage, qu'on pourrait qualifier de gothique : l'homme mystérieux, pâle, sinistre, tout-puissant - au moins en apparence -, paraissant suivre de machiavéliques combinaisons, et en même temps se comportant en public comme un homme du monde. Ce genre de personnage est très à la mode alors, entre les dandys qui rejettent la société (voir les héros de Byron), les homme supérieurs qui tissent des intrigues dans le secret de leurs existences tout en occupant des statuts honorables (Vautrin, célèbre héros balzacien et ancien bagnard, qui devient chef de la police dans Splendeurs et misères des courtisanes) et, surtout, tous ces personnages maléfiques, démoniaques, voire «vampiresques» qui foisonnent dans les romans de Byron, d'Hoffmann, de Gautier ou de Sheridan Le Fanu, et qui aboutiront à la fin du siècle, dans des registres très différents, au capitaine Nemo ou à Dracula. Il est vrai que depuis le début du siècle, un autre type de héros est apparu : le jeune homme enthousiaste, prêt à conquérir le monde, qui se lance dans une folle quête, bousculant tout (et se faisant lui-même bousculer) sur son passage, et qui a pour lui toutes les qualités de la jeunesse, de la beauté, de la bravoure et de la loyauté. Ce sont maints héros de Walter Scott, c'est aussi le Rastignac de Balzac. C'est, en 1843, Le Chevalier d'Harmental de Dumas qui trouve enfin un premier véritable succès, largement confirmé l'année suivante avec Les Trois Mousquetaires : d'Artagnan s'y présente en héros positif, charmeur, ironique, à la fois rusé et naïf, maladroit et habile.
L'écriture de ces deux romans ne se situe pas par hasard, juste avant celle de Monte Cristo. Pour aborder la vengeance de Dantès, Dumas aura eu besoin tout d'abord de mettre au point une manière de travailler, d'utiliser des types de personnages et, surtout, il aura enfin la place pour développer tout un univers personnel, fait de décors idéaux, de lectures idéales, et d'idées philosophiques qui ne cesseront ensuite de porter leurs marques dans les romans ultérieurs, dans Le Vicomte de Bragelonne ou La San Felice, pour ne citer qu'eux.
Présentation de l'éditeur :
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