À six heures moins le quart, un après-midi ensoleillé de juin, j'étais assise au Shepherds, près du comptoir, et je regardais un homme par-dessus le bord de mon verre. J'étais sûre qu'il allait me draguer. Moins sûre de la façon dont j'allais réagir. Physiquement, il me rappelait le major Carter qui, quelques semaines auparavant, m'avait prise dans ses bras en passant me chercher avec une voiture de l'état-major pour m'emmener à un bal du régiment. Une fois éconduit, il avait eu ces mots d'excuse :
- Je ne sais pas ce qui m'a pris. En plus, tu es une fille tellement comme il faut.
Peut-être était-ce sa déconvenue que je sois «tellement comme il faut» qui l'avait amené à se soûler plus tard dans la soirée ; ou peut-être était-il déjà soûl dans la voiture. Je l'avais perdu de vue dès que nous étions entrés dans le vaste salon de l'hôtel qui nous servait de mess. Mais, une demi-heure après, alors que j'étais assise en train de bavarder avec plusieurs amis, je fus stupéfiée par l'apparition du major Carter sur la galerie circulaire du salon. Il était nu, slip excepté. Cramponné à la balustrade, il criait :
- Je veux une femme. Qu'on me donne une femme !
Les deux sergents en faction à l'accueil dans le hall, le secrétaire du mess et quelques autres officiers, parmi lesquels j'aperçus le jeune Dent, avaient gravi en courant les marches qui menaient à la galerie pour se masser autour de lui. On l'avait emmené, hurlant et gesticulant, jusqu'à l'ascenseur.
Ce qui s'était passé ensuite, Dent me l'avait raconté une demi-heure plus tard en s'installant à ma table. Il était ravi :
- On monte le bonhomme dans sa chambre, on le pose sur le lit et on lui ligote les mains et les pieds avec deux cordes. Et puis on reste là à discuter le coup, sans vraiment le regarder, on se dit qu'on va lui donner encore dix minutes, qu'après son ordonnance pourra le mettre au lit et que ça va s'arrêter là ; or le voilà qui se détache, se lève d'un coup et file comme l'éclair sur le palier. On lui court après, il se rue sur la porte de l'ascenseur, il l'ouvre, et entre dans la cabine... qui n'est pas là. On ferme les yeux pour pas voir ça. Une chute de quatre étages sur une dalle de béton ! On se précipite dans l'escalier pour aller ramasser les restes et là, au premier, on le voit qui grimpe vers nous quatre à quatre en jurant et en criant, on se bagarre ; et nous revoilà dans la mêlée, comme avant. Maintenant il est couché.
Le lendemain matin, au petit déjeuner, le major Carter s'était paraît-il demandé pourquoi, bon Dieu, il était couvert de bleus.
Je connaissais bien le Shepherds, d'avant la guerre, mais je n'y étais jamais venue seule. Je n'étais d'ailleurs jamais entrée seule dans aucun pub.
Louisa, vingt-huit ans, rencontre dans un pub un inconnu dont elle devient la maîtresse. Commence alors une intense histoire d'amour dans laquelle Louisa prend plaisir à la souffrance. L'inconnu, Gordon, un psychiatre, la fascine et la domine. C'est dans les bras de cet homme qui lui déclare : «Je te garderai toujours, car je trouverai toujours de nouvelles façons de te torturer» qu'elle accède à l'extase. Peu à peu, l'emprise de Gordon s'accentue et tous deux s'aventurent, au-delà de la douleur, dans les ténèbres de la passion. Édité à l'origine sous pseudonyme, ce récit autobiographique a été interdit en Allemagne et en Angleterre lors de sa publication, en 1966.
«Ce n'est pas l'érotisme (glacial) qui fascine le plus dans Gordon, ni même l'extraordinaire étude sur la psychanalyse entreprise par le médecin auprès de sa victime consentante, mais la force de cette écriture avide et froide, qui semble chercher, à son tour, à placer le lecteur en situation de dépendance.»
Raphaëlle Rérolle, Le Monde des livres
Née à Prague en 1916, Edith Templeton passe son enfance dans un château de Bohême. Dès les années 1950, The New Yorker publie ses nouvelles. Certaines ont été reprises dans un recueil intitulé Irrésistiblement, paru aux éditions Robert Laffont en 2005. Au cours des décennies suivantes paraissent plusieurs de ses romans, dont le scandaleux Gordon, publié à l'origine sous pseudonyme et interdit en Allemagne et en Angleterre lors de sa parution, en 1966. Edith Templeton vit aujourd'hui en Italie.
"Grands détectives" dirigé par Jean-Claude Zylberstein
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