Extrait :
À la hauteur de Beaune, Guillaume quitta l'autoroute et commença à se sentir chez lui. Pourtant, cette fois, il ne descendait pas en Bourgogne d'un coeur léger et il n'éprouvait pas l'allégresse habituelle. Il lui avait fallu presque une semaine pour prendre les dispositions nécessaires, mais il était prêt à faire face, à rester le temps qu'il faudrait. En l'appelant à l'aide, son frère savait forcément ce qu'il faisait, jamais il n'aurait crié au secours pour rien.
De part et d'autre de la route, les vignes s'étendaient, bien alignées sur les coteaux ventrus. Un plaisir pour le regard que cette traversée des grands crus, où les parcelles prestigieuses étaient juste séparées par des murets de pierres sèches. Avant Chalon, Guillaume quitta la départementale en obliquant vers l'ouest. Là se trouvaient des terres un peu moins célèbres mais tout aussi généreuses, des villages typiques avec leurs toits de tuiles vernissées et leurs ruelles tortueuses. Quand il arriva devant la maison de Robin, il s'arrêta un instant avant de franchir le portail. Cette construction ultramoderne s'intégrait sans heurt dans le paysage. Guillaume l'avait dessinée pour son frère quand celui-ci s'était marié, et il y avait mis tout son talent d'architecte.
Il s'engagea dans l'allée de gravier et alla se garer à l'ombre d'un grand chêne. L'arbre l'avait gêné pour élaborer les plans des abords et du jardin, mais pour rien au monde il ne l'aurait sacrifié. Alors qu'il sortait ses sacs de voyage du coffre, il entendit Robin le héler et il se retourna, sourire aux lèvres. Aussitôt, son expression se figea, se transforma en grimace. À quoi s'était-il donc attendu ? En fait, il n'avait rien imaginé de précis, refusant même d'y penser, et ce qu'il découvrait le bouleversait.
- Je sais, dit Robin en descendant de la terrasse. C'est la chimio, ça me crève.
Depuis leur dernière rencontre, il avait dû perdre une dizaine de kilos. Ses yeux étaient cernés, ses traits marqués, son teint jaunâtre et sa voix rauque. Presque tous ses cheveux étaient tombés, il semblait vieilli, transformé.
- Robin..., murmura Guillaume, laissant tomber ses sacs.
Il ouvrit les bras et son frère s'y jeta. Durant une longue minute ils s'étreignirent, aussi émus l'un que l'autre.
- Ne t'inquiète pas, souffla Robin. Les médecins ne sont pas trop pessimistes, la partie n'est pas encore perdue !
- Tu es bien soigné, au moins ? Tu vois les gens qu'il faut ? Tu devrais peut-être venir à Paris, il y a des services de pointe, tu...
- J'ai déjà consulté à Villejuif, tout va pour le mieux. Les derniers mots lui arrachèrent un rire étranglé, et il ajouta, encore plus bas :
- Non, ça ne va pas, tu t'en doutes. Je ne suis plus bon à rien et j'ai une trouille bleue.
Présentation de l'éditeur :
Guillaume, brillant architecte, met momentanément de côté sa carrière pour se rendre au chevet de son jumeau, Robin, gravement malade.
Ce qui devait n'être qu'un court séjour s'éternise au fur et à mesure que les problèmes s'accumulent : le paysan chargé des vignes familiales menace de partir et la femme de Robin, enceinte, ne s'en sort plus.
L'arrivée de Ralph, le fils rebelle de Guillaume, qui vient de lui voler sa fiancée, ne va pas arranger les choses...
" Il y a un phénomène Bourdin. La recette du succès ? Des histoires habitées par des personnages vrais, confrontés aux choses de la vie. " Femme actuelle
" Françoise Bourdin signe un drame à la fois contemporain et intemporel. " L'Obs
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