Balco Atlantico - Couverture souple

Ferrari, J�r�me

3,86

72 �valuations de Goodreads

Couverture souple

ISBN 10 : 2330013051 ISBN 13 : 9782330013059

Editeur : Babel, 2012

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192pages. poche. Broch�.

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Product Description :

Extrait :

Oh, maman, maman, j'en mourrai aussi, finit par dire Virginie dans un sanglot si d�chirant qu'on aurait dit que des stylets minuscules lac�raient ses poumons, oh, j'en mourrai, maman, et Marie-Ang�le, qui aimait sa fille beaucoup plus fort qu'elle n'avait jamais �t� capable de ha�r quiconque, raffermit son �treinte en d�tournant son regard de la socquette blanche tach�e de boue et de sang et lui dit, oui, tu en mourras, je sais bien, et Virginie sanglota de gratitude et dit encore, maman, ma vie est termin�e, et Marie-Ang�le approuva, oui, ma ch�rie, ta vie est termin�e, elle est termin�e, et Virginie insista, je l'aimais tant, maman, je l'aimais tant, et Marie-Ang�le lui dit, oui, tu l'aimais, mon coeur, et tu l'aimeras toujours, tu n'ou�blieras jamais, ne t'en fais pas, tu n'oublieras jamais.
Personne ne souhaite entendre qu'il gu�rira d'un tel chagrin : la perspective de la consolation peut �tre intol�rable et Marie-Ang�le le savait bien. Elle serrait sa fille contre elle, en pin�ant le nez, comme si l'�pouvantable odeur de merde qui s'exhalait du cadavre par longs effluves r�guliers et sucr�s les avait poursuivies dans la maison, et elle savait que, dans quelques mois, Virginie aurait repris go�t � la vie, m�me s'il �tait impossible de le lui dire. Oh, tu en mourras, ma ch�rie, chuchotait Marie-Ang�le, ne t'inqui�te pas. Puis elle lui donna un calmant, lui retira sa socquette avec une grimace de d�go�t et la mit au lit. J'attendis dans le salon que Virginie se soit endormie, hypnotis�e par la voix infatigable, la voix vibrante d'amour et de charit� qui lui r�p�tait qu'elle allait mourir. Pour toutes les choses qui ne laissent pas d'autres traces que dans notre m�moire, je ne peux jurer de rien. Pourtant, j'entends encore cette voix avec la m�me clart� que si elle r�sonnait encore pr�s de moi.

J'avais, me semble-t-il, pass� une bonne partie de l'apr�s-midi au bar, tout seul avec Hayet, qui lavait les verres en silence, et Vincent Leandri, qui ne la quittait pas des yeux. Il m'avait encore parl� de sa vie dans l'oc�an Indien. Il savait que j'avais voyag� et que j'�tais mieux plac� que quiconque au village pour comprendre ce qu'il me disait. Depuis que je le connais, il en parle de plus en plus souvent. Il saute par-dessus toute sa carri�re de dirigeant nationaliste, � laquelle il a mis fin juste apr�s l'affrontement fratricide de 1995 et dont il ne dit jamais rien, pour rejoindre ses r�ves de jeunesse. "Vous voyez, Th�odore, m'avait-il dit, il y avait ce z�bu, avec son regard incroyablement con, qui bouffait un sac en plas�tique, bleu, je me rappelle. Je m'�tais tra�n� dans un bar pour prendre un caf�, avec une gueule de bois pas possible. Et il y avait ce type, derri�re le comptoir, le patron, un Fran�ais, on aurait dit qu'il avait cent ans. Il y avait aussi une Maoraise, accroupie � c�t� de lui, une gamine qu'il devait baiser, elle sifflotait en se grattant le cul. Lui, je vous dis, on aurait dit qu'il avait cent ans. Il avait les m�mes yeux cons que le z�bu, des yeux jaunes. Il lui manquait des dents. Je ne vous parle pas de celles qui restaient. On aurait dit qu'il �tait confit dans le rhum arrang�, il sentait la cirrhose � plein nez, la mort, et je me suis dit, il a quel �ge, en vrai ? Quarante ? et je me suis dit, c'est toi dans quinze ans, si tu restes ici, c'est toi.

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