Extrait :
Extrait de l'avant-propos
J'ai hésité, je l'avoue, à publier ce livre. Il y a déjà de longues années, un premier recueil d'articles où se mêlaient politique et littérature avait été accueilli avec indulgence : c'était Jean qui grogne et Jean qui rit. Il y a à peine plus de deux ans, je donnais à ma fille Héloïse qui venait de lancer, avec Gilles Cohen-Solal, sa maison d'édition, un deuxième recueil de chroniques consacrées surtout à un certain nombre d'écrivains, à quelques films, à des voyages, à des souvenirs d'enfance et de jeunesse : Odeur du temps. Fallait-il tenter une troisième expérience ?
Les risques étaient grands. Odeur du temps avait été reçu par la critique et par le public avec autant d'amitié que Jean qui grogne et Jean qui rit. Il me semblait que proposer une troisième série d'articles, c'était tenter le diable. Les journaux, la radio, la télévision, à qui je dois beaucoup, en avaient peut-être, et je peux les comprendre, un peu par-dessus le dos de mes exhibitions. Et il n'était pas impossible que les lecteurs eux-mêmes commencent à se lasser.
Dans les deux préfaces à mes recueils précédents, j'avais beaucoup parlé d'Hérodote et de Xénophon, des merveilleuses Choses vues d'Hugo, poète de génie, romancier de génie et journaliste de génie, de Kessel, de Mauriac et des rapports entre journalisme et littérature. J'avais cité Oscar Wilde - «Le journalisme est illisible et la littérature n'est pas lue» -, André Gide - «J'appelle journalisme ce qui sera moins intéressant demain qu'aujourd'hui» - et Péguy - «Rien n'est plus vieux que le journal de ce matin, et Homère est toujours jeune». La répétition est un des écueils majeurs qui menacent l'écrivain. Le sujet me paraissait épuisé.
Je me disais aussi que la comparaison était inévitable entre mes deux premiers recueils et le troisième. J'entendais déjà les murmures courtois des lecteurs - et des lectrices - et les avanies de mes confrères : «La vieillesse est un naufrage» ou «Il y a un moment où il faut savoir quitter la table...»
L'affection et le goût du risque ont eu raison de ces scrupules.
L'affection d'abord. Dans les circonstances difficiles que chacun connaît - la crise, bien sûr, et, à l'intérieur de la crise, la concurrence toujours plus vive entre l'édition et la télévision, puis surtout Internet qui menace non seulement l'imprimé mais le petit écran lui-même -, j'ai vu avec fierté le succès constant de l'entreprise de ma fille. À force de travail et de fidélité à ses ambitions, sa maison d'édition devenait de plus en plus «une petite qui a tout d'une grande». J'avais gardé le meilleur souvenir de ma collaboration avec toute l'équipe des éditions Héloïse d'Ormesson. J'ai cédé au désir de renouveler l'expérience.
Revue de presse :
Dans ce nouveau volume de ses chroniques pour la presse, au fil d'articles qui couvrent une soixantaine d'années, Jean d'Ormesson se ressemble d'un bout à l'autre. Il est de la même eau, très tôt. Lucide et littéraire. Ludique, tout pénétré de l'évidence de notre finitude...
Certes, au début de cette anthologie, il est beaucoup question de culture, d'idées générales : déclin de la France, perte de notre hégémonie culturelle, crise du roman ? Jean d'Ormesson évite tout parti pris polémique. Ses idées générales sont loyales. Sa pensée est celle de l'honnête homme, tolérant, ouvert. Libertin au sens propre. C'est énorme. Mais moi qui n'ai plus d'opinions générales, mes morceaux préférés sont les plus singuliers. C'est lorsque l'auteur célèbre tel paysage, tel écrivain qu'il est le meilleur. Débarrassé de l'équité, envoûté par son sujet, incarné. (Patrick Grainville - Le Figaro du 8 octobre 2009 )
Ah, Jean d'Ormesson ! Insubmersible. Soixante ans qu'il sévit. Romans, essais, recueils, anthologies, et même des livres pour enfants... Tout ce qu'il touche se transforme en or. Jean d'Ormesson est libre, gai, mélancolique, léger, drôle, prodigieusement érudit. Le lire, c'est faire pénétrer au plus profond de soi un peu des adjectifs précités. C'est aussi se frotter à une réflexion sur l'époque. Car Jean d'Ormesson n'est pas seulement le romancier de La Gloire de l'empire ou de Casimir mène la grande vie, c'est aussi l'auteur des "chroniques du temps qui passe". Pour la troisième fois, il réunit quelques-uns des milliers d'articles qu'il a écrits, pour Le Monde ou Arts, Le Figaro ou ses suppléments. Et c'est épatant. (François Busnel - L'Express du 15 octobre 2009 )
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