ERIC CHEVILLARD N1026 OCTOBRE 2014

COLLECTIF

ISBN 10 : 2351500679 ISBN 13 : 9782351500675

Editeur : REVUE EUROPE, 2014

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Extrait :

A FEUILLETER TR�S RAPIDEMENT DANS LE NOIR

Faites l'exp�rience. Prenez un roman d'�ric Chevillard, n'importe lequel. �teignez les lumi�res. Feuilletez le roman, tr�s rapidement, dans le noir. Et alors ? alors rien. Le roman ne se sera pas transform� en film comme vous pouviez l'esp�rer. Chevillard nous aurait menti ? Pas du tout. Ses romans- si c'en sont-r�sistent � l'adaptation Sont inadapt�s. Inadaptables. D'autres exp�riences vont �tre n�cessaires. Ce que nous proposons ici.
Depuis son premier texte, Mourir m'enrhume, paru en 1987, pr�s de trente livres sont parus, la plupart aux �ditions de Minuit, d'autres aux �ditions Fata Morgana et aux �ditions de L'Arbre vengeur. Et tr�s t�t, la critique s'est int�ress�e � cette voix nouvelle. Dans le tr�s riche �tat des lieux qu'elle consacre dans cette livraison d'Europe � la recherche sur Chevillard, Am�lie Adler souligne les diff�rents aspects de l'oeuvre que la critique a mis en �vidence. Celui qui s'impose au premier abord est sans doute le ludique, d�clin� en incongru, loufoque, ironie : ludique qui s'attaque aux genres, et au premier chef le roman, mais qui touche aussi au conte (Le Vaillant Petit Tailleur), au r�cit de voyage, au r�cit ethnographique (Choir), � la critique litt�raire (L'Oeuvreposthume de Thomas Pilaster, D�molir Nisard), voire � l'autobiographie. Pierre Jourde et Olivier Bessard-Banquy ont �t� les premiers � mettre en �vidence ce profil d'��crivain joueur� et l'ont inscrit, l'un dans la tradition de l'incongru, l'autre dans la filiation par rapport au Nouveau Roman. Filiation � la fois r�elle et distordue par l'humour, la parodie, et aussi un rapport diff�rent � l'histoire. L'engagement des livres de Chevillard n'est pas le m�me que celui des origines des �ditions de Minuit, mais t�moigne d'une volont� de voir le monde autrement. Et si la critique, dans son ensemble, a soulign� les aspects ludiques et cocasses de ces romans, ce serait n�anmoins une erreur de n'y voir que jeux formels, car l'oeuvre d�passe � tout moment ce rapport ludique aux formes, ne serait-ce que par la mise en jeu des �formes-monstres� et du questionnement sur l'alt�rit�. On le voit, les approches sont multiples, � la mesure de la diversit� de l'oeuvre. Et puisque la quatri�me de couverture du r�cent Pour Eric Chevillard sugg�re aux critiques de �s'int�resser � ce cas singulier de folie litt�raire et d'�tudier ses textes�, on se permettra de renvoyer l'auteur de ce conseil � l'�tat des lieux dress� par Aur�lie Adler dans le pr�sent dossier.
Le ludique et le s�rieux sont articul�s ici m�me dans �Harmonie du Choir� : Choir, cette esp�ce de roman ethnographique o� Bruno Blanckeman voit �le locus horribilis de l'oeuvre, un foyer d'infiction contaminant les pratiques litt�raires charg�es de le d�crire et ramenant les syst�mes de pens�es cens�es lui conf�rer l'allure d'une all�gorie � l'�tat p�teux de machinerie d�lirante, l'humour noir pour tout bacille.� Sur la triste �le de Choir, qui poss�de trois cent douze mots pour dire gris, joue � plein le m�canisme de l'inversion d�j� maintes fois rep�r� chez Chevillard : une naissance est une catastrophe, les enfants sont soumis au travail forc� et � toutes sortes d'exactions, leur mort est une bonne nouvelle, l'amour consiste � �viter � tout prix l'�tre aim�... Les lois de composition du texte (chute et renversement, scission et scansion) sont celles m�me de la construction de l'�le, r�gie par un �contrat asocial� et tendant fatalement � l'involution. Mais c'est pr�cis�ment ce qui permet � l'�criture de s'extraire de l'enlisement qui la menace.
Dans ��ric Chevillard, �crivain classique d'avant-garde�, Olivier Bessard-Banquy, qui a �t� l'un des tout premiers � �tudier l'oeuvre de Chevillard, et qui a r�cemment dirig� avec Pierre Jourde un colloque consacr� � l'auteur du H�risson, se place dans un paradoxe. D'un c�t�, Chevillard est bien d'avant-garde, par son refus du mainstream, de la �chambre d'�cho� d'une litt�rature qui se contenterait de redoubler le r�el, et par toutes ses exp�rimentations. Mais d'autre part, il refuse d'�abandonner la langue des classiques aux id�ologues et aux tribuns d'extr�me-droite� et de �laisser sans r�agir la souris Alzheimer d�vorer la biblioth�que en commen�ant par la Grammaire et le Lexique�. Il lutte donc sur deux fronts : �La grande entreprise de d�cervelage organis� doit �tre attaqu�e sans rel�che, mais la pens�e r�actionnaire, arrogante, sup�rieure, doit �tre elle aussi corrod�e pour sa haine visc�rale de la d�mocratie. Seule l'ironie permet de s'extraire de ces paradoxes.�
(...)

Pr�sentation de l'�diteur :

Depuis son premier texte, Mourir m'enrhume, paru en 1987, �ric Chevillard a publi� une trentaine de livres. Et tr�s t�t, la critique s'est int�ress�e � cette voix nouvelle. Audacieuse et jubilatoire, l'oeuvre de cet �crivain t�moigne d'une volont� de voir le monde autrement. Eric Chevillard aime � filer ses romans depuis des motifs improbables, empruntant � la m�nagerie de service : un crabe, un h�risson, un orang-outan, une loutre, diff�rents sp�cimens humains, auteur, capitaine, d�marcheur, tailleur, fant�mes hantant les fonds et les traverses de la langue, les r�serves et les bas-fonds de la fiction. On voit se dessiner � travers ses livres le profil d'un �crivain joueur, usant volontiers des figures du non-sens et du loufoque, dans le but avou� de faire d�railler la logique ordinaire. Les ressources de son invention semblent infinies, tout comme celles de son humour subtil et f�roce.
Cette litt�rature de la surprise et de l'incongru n'est jamais complaisante � l'�gard de l'ordre des choses. On y discerne au contraire une pens�e du rire critique et de l'interrogation sournoise qui passe r�solument au large de la moralisation p�ror�e et du discours assen� sur un ton docte et p�remptoire. Avec Eric Chevillard, la litt�rature n'a rien perdu de son app�tit de narration, m�me si elle n'est plus un miroir promen� sur le monde mais un exercice illimit� de mise en question de l'univers.

Anne Roche, �ric Chevillard, Pierre Jourde, Bruno Blanckeman, Olivier Bessard-Banquy, Gaspard Turin, Laurent Demanze, Claro, Pierre Senges, Aur�lie Adler.

JEAN-LOUIS GIOVANNONI
Gis�le Berckman, Jean-Louis Giovannoni, Christine Caillon, Arno Bertina.

ESTHER TELLERMAW
Patrick N�e, Esther Tellermann, Bernard No�l, Yves Di Manno, Jean-Baptiste Para, C�dric Demangeot, Isabelle Garron, Michel Collot, Ang�le Paoli, Didier Cahen.

JOS� CARLOS BECERRA
Bruno Gr�goire, Coral Bracho, Hugo Guti�rrez Vega, Jos� Carlos Becerra, Jean-Fran�ois Hatchondo, Jos� Manuel Pintado, Patrick Maury, Petr Kr�l.

DIRES & D�BATS : PAUL LOUIS ROSSI

CAHIER DE CR�ATION
H�lderlin � Jacques Demarcq � Mark Strand � Ramon Safon.

CHRONIQUES

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