Extrait :
Extrait de l'introduction :
Avec quelques amis, il y a quelques années de cela, nous nous étions inscrits à un cours de cuisine animé par une matrone arménienne et sa domestique âgée. Comme elles ne parlaient pas l'anglais, et nous, pas l'arménien, la communication était difficile. Elle enseignait par l'exemple ; élèves zélés, nous observions et tentions de quantifier ses recettes quand elle préparait son délicieux agneau aux aubergines. Mais nos plats n'étaient pas aussi réussis que les siens : nous avions beau nous donner du mal, nous n'arrivions pas au même résultat. «Qu'est-ce qui donne à sa cuisine cette touche spéciale ?» Cette question me taraudait et resta sans réponse jusqu'au jour où, particulièrement attentif aux préparatifs qui se déroulaient en cuisine, j'observais notre professeur, digne et résolue, préparer un plat. Elle le remit à son assistante qui, sans un mot, le porta à la cuisine et y saupoudra prestement quelques poignées d'épices et de condiments. Ces «saupoudrages» furtifs j'en suis convaincu, faisaient toute la différence.
Ce cours de cuisine me revient souvent en mémoire quand je songe à la psychothérapie et que je m'interroge notamment sur les ingrédients essentiels d'une thérapie réussie. Les textes formels, les articles et les conférences présentent la psychothérapie comme une activité précise et méthodique, aux étapes soigneusement balisées, avec ses techniques d'intervention, le développement et la résolution méthodiques du transfert, l'analyse des relations d'objet et son lot soigneusement pesé d'interprétations «porteuses». Pourtant, je suis persuadé que le thérapeute, «dans sa cuisine», saupoudre ces petits plus qui changent tout.
Quels sont donc ces «secrets de cuisine» thérapeutiques ? Ils existent bel et bien à la marge de la thérapie formelle et ne sont ni documentés ni enseignés. Souvent, les thérapeutes eux-mêmes n'en ont pas conscience ; pourtant, ils sont parfois bien en peine d'expliquer l'amélioration de tel ou tel patient. Ces ingrédients essentiels sont difficiles à décrire, et plus encore à définir. En effet, comment qualifier et enseigner des aptitudes telles que la compassion, la sollicitude, la capacité à aller au-delà de soi, d'affecter le patient à des niveaux profonds ou - la plus insaisissable de toutes - la sagesse ?
Un mot de l'auteur :
Professeur émérite de psychiatrie à Stanford, Irvin Yalom est psychiatre à Palo Alto (Californie). Entre fiction, philosophie et psychothérapie, il est l'auteur de nombreux essais, romans ou récits, dont Apprendre à mourir. La méthode Schopenhauer, Mensonges sur le divan, Et Nietzsche a pleuré, La Malédiction du chat hongrois. Contes de Psychothérapie ou Le Bourreau de l'amour.
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