Extrait :
«Comprendre une action»
La première partie de l'ouvrage réunit cinq contributions représentant plusieurs disciplines différentes (histoire de l'art, études théâtrales, anthropologie historique, ethnologie). L'équipe scientifique qui a coordonné l'ensemble est elle-même composée de chercheurs en études théâtrales et en sciences de la communication, qui se définissent comme une interdiscipline, plus particulièrement dans les travaux portant sur la médiation culturelle. Ainsi se manifeste d'emblée la complexité de ce qui peut être décrit comme un «accompagnement» théorique des amateurs, une tentative de réponse à leur invitation au dialogue, dans cette période encore mal lisible où eux-mêmes raffermissent et redéfinissent de différentes façons leurs relations avec l'art. La variété des approches disciplinaires suscitées par leurs questions, mais aussi par l'objet particulier qu'est le théâtre qu'ils pratiquent, inscrit cette redéfinition dans un mouvement de réflexion beaucoup plus large, qui touche l'idée même de l'art, comme en témoignent les premières contributions. Mais parce que le principe majeur de l'ouvrage est de privilégier le rapport au réel, au terrain, à l'exemple, deux exercices d'observation sont proposés aussitôt après, précédant et annonçant l'ensemble des études : ils portent sur deux histoires collectives situées aux deux extrémités de l'éventail esthétique des scènes d'amateurs contemporaines. Les deux auteurs racontent en détail ces histoires, dessinent les lieux, les gestes, les actes, réinscrivant à chaque fois les réalités observées dans un paysage social, culturel, mémoriel que l'on parvient ainsi à entrevoir.
Pour Jean Bazin, anthropologue, la description de l'action suffit à la comprendre, sous certaines conditions :
«Comprendre une action [...] n'équivaut pas à en déchiffrer le message, mais à apprendre comment elle s'effectue, dans quel univers social, historique et politique elle se déroule et quels en sont les enjeux pour ceux qui agissent : "Je ne décris pas ce que ces gens sont (par exemple en quoi ils sont autres que moi ou que nous) mais comment ils agissent". Le chercheur se situe donc en position d'apprentissage vis-à-vis de ceux qu'il observe, car pour pouvoir décrire une action, il faut "apprendre tout un monde, c'est-à-dire établir patiemment des différences entre des mondes, entre des configurations du faisable et du non faisable pour des situations sociales et historiques données"».
Les descriptions précises de différentes situations où des amateurs font du théâtre et se trouvent au contact de praticiens professionnels dont les activités s'organisent tout autrement que les leurs mettent en évidence le caractère original et multiforme de leurs relations avec l'art, et font apparaître la nécessité de poursuivre la réflexion, sur des bases entièrement renouvelées, au-delà du présent ouvrage.
M.-M. Mervant-Roux
Présentation de l'éditeur :
Entièrement consacré au théâtre tel qu'il est pratiqué en amateur, c'est-à-dire dans un cadre amateur, et organisé autour de la notion d'art, cet ouvrage peut être présenté sous trois éclairages différents :
° Il propose une approche originale d'un monde insuffisamment étudié, malgré les travaux pionniers réalisés depuis quelques années.
° Du fait de sa double dimension anthropologique et esthétique, il s'inscrit tout naturellement au coeur des réflexions actuelles sur la définition de l'art.
° Enfin, et peut-être surtout, l'ouvrage présente l'originalité d'être issu d'une longue collaboration (elle a duré plusieurs années), entre des animateurs de compagnies, d'associations et de fédérations d'amateurs d'une part, de chercheurs, d'universitaires et d'étudiants d'autre part.
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