Extrait :
Comment es-tu arrivée dans les Cévennes ?
J'ai été élevée moitié en Cévennes et moitié dans la plaine. Mes parents avaient un travail à Montpellier et tous les week-ends et vacances nous étions ici. Mon grand-père était mineur, de Saint-Ambroix. Mes racines sont ici, j'ai les Cévennes dans la peau, mais j'aime aussi la garrigue. Mes parents ont retapé une maison à Ardaillès, c'est à côté de Valleraugue.
Je suis revenue ici à trente-huit ans après avoir vécu plus près de la ville avec ma famille et c'était une vraie décision. Pourquoi ? Ça, je m'en suis rendu compte après plusieurs années, sur la profondeur. Au départ, nous voulions être plus dans la vibration de la nature, qu'il y ait plus d'arbres que d'humains. On sentait que l'on devenait de plus en plus douillets et ramollis en ville. On voulait que la nature rythme notre existence. Retrouver une humilité par rapport à l'humain qui veut tout maîtriser. Ici, il y avait une nature assez sauvage. Ce n'était pas vraiment la civilisation mais plutôt rencontrer cette nature. Comme je suis fille unique, j'ai passé toute mon enfance à parler avec les cailloux, les rivières, les arbres, j'étais tout le temps seule. Ma sécurité, je la trouve dans la nature.
Je me suis rendu compte aussi que j'étais venue dans les Cévennes pour en chier. Et ça a marché ! À un moment donné, j'ai été prise dans cette course effrénée de la consommation. J'ai aussi connu jeune femme de me dire : «Tiens je ne me sens pas bien, je vais aller m'acheter des chaussures». (Rires) En arrivant ici, j'ai eu envie d'expérimenter la simplicité volontaire, même si ce n'était pas conscient. Donc je suis allée loin dans le fait de ne plus avoir de thune. Jusqu'à ne plus pouvoir payer le gaz et faire cuire le riz au feu de bois. Aller se coucher presque le ventre vide. J'ai tâtonné. Ici, il y a une certaine rudesse et ça m'a permis de me ramener à l'essentiel. Il y a beaucoup de futilités qui sont sorties de ma vie, je me suis sentie énormément transformée en cinq ans.
Ce que j'ai oublié de préciser, c'est que la maison que nous avons construite est destinée à être un pied-à-terre parce qu'on veut voyager pour faire découvrir le monde à nos enfants et que je voudrais être utile planétairement au niveau de mon métier. Entre parenthèses, notre médecine obstétricale occidentale a fait beaucoup plus de ravages à l'extérieur de l'Europe que dans notre pays. C'est par le monde moderne que l'on a amené tout ce chaos dans l'obstétrique et c'est à nous de le réparer.
Les Cévennes, territoire imaginaire ?
Non, je n'avais pas d'imaginaire, je connaissais déjà. Ah si en fait... J'ai un imaginaire par rapporta ici. Dans la démarche de la simplicité volontaire, d'être plus dans l'être ou dans le faire, je ne l'ai pas vécu plus jeune. Lorsque j'étais petite, j'habitais une petite maison qui s'appelait l'Oustal del porc (la maison du cochon), que mon père avait retapée et comme il faisait très froid et rude, j'allais chez un grand-père qui s'appelait Louis Cavalier - c'est une famille très connue ici d'ailleurs. J'avais cinq ans et il m'accueillait chez lui dans la pièce cévenole classique, avec l'immense cheminée, une pièce sombre avec un fauteuil et me racontait les Cévennes. La vie de sa femme, quand elle partait à la filature les jours d'hiver au Mazel en déblayant la neige, etc. Enfant, j'avais compris une certaine austérité au niveau du pays, c'était l'époque de l'exode rural massif. Cela fait tant de fois que les Cévennes sont prêtes à crever et à chaque fois elles mettent la tête hors de l'eau. À l'heure actuelle, il y a un renouveau incroyable.
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Présentation de l'éditeur :
Elsa Dréau-Rivière est partie à la rencontre de personnages qui incarnent la transition chacun à leur manière : écologie, art, culture, éducation alternative, éco-construction, médecines alternatives... De là se sont dessinés des portraits savoureux, en images et en mots, de citoyens qui ont choisi de vivre en accord avec leurs valeurs.
Découvrons les parcours d'acteurs de la transition : des agriculteurs bio, un clown, un professeur, des artisans, des artistes ou encore une sage-femme ! Autant d'itinéraires atypiques et engagés qui se dévoilent au fil des pages.
Ces hommes et ces femmes - comme vous ? vos voisins ? - vivent selon les valeurs des Créatifs Culturels : écologie, engagement citoyen et action locale, valeurs féminines, ouverture multiculturelle, vie intérieure... Ils nous interpellent, pour réparer ou dégager de nouveaux chemins pour la communauté humaine. Un appel pour prendre sa vie en mains, se donner du courage et créer, construire !
Artiste-Plasticienne, photographe ainsi qu'ouvrière agricole, Elsa Dréau-Rivière vit dans les Cévennes, entre art et agriculture. Elle se nourrit d'influences multiples telles que la méditation de pleine conscience, les techniques d'intelligence collective, l'éducation émotionnelle et la pédagogie Montessori. Elle développe un travail d'artiste-colibri en lien avec son territoire et ses habitants.
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