Extrait :
PRÉAMBULE
L'HERBIER OUBLIÉ,
ou
PORTRAITS ETHNOBOTANIQUES
Au début des années 1980, le terme d'ethnobotanique faisait partie du jargon des spécialistes et bien peu de personnes en connaissaient le sens. Aujourd'hui qu'il est presque devenu à la mode, nombreux sont ceux qui en revendiquent l'attribution... C'est heureux, car comme monsieur Jourdain, beaucoup de gens font de l'ethnobotanique sans le savoir et contribuent à enrichir une science pour laquelle il n'est nul besoin d'être universitaire pour être efficace.
La définition du mot est simple : «ethno», du grec ethnos, peuple, et «botanique», également de racine grecque, botané, la plante, pour tout ce qui est relatif à l'étude des végétaux. L'ethnobotanique est donc la discipline qui étudie les liens entre l'homme et le végétal. Elle décortique les rapports étroits qui unissent ces deux univers, de prime abord si différents, mais si intimement imbriqués en fait. Elle met en évidence les dépendances de l'un envers l'autre, mais aussi la suprématie de l'un sur l'autre car si le végétal peut se passer de l'homme, l'inverse est impossible...
Un domaine d'investigation aussi riche et complexe ne peut qu'être abordé de multiples façons. Cela va du simple paysan passionné, collectant et transmettant les savoirs traditionnels qui font son quotidien, au chercheur du CNRS partant pour le fin fond d'une forêt de Papouasie-Nouvelle-Guinée étudier les savoirs traditionnels des populations liés aux plantes. Vaste programme, dont il est bien impossible de lister toutes les spécialités.
Curieusement, cette science ancestrale n'a acquis ses lettres de noblesse que fort récemment. Pourtant, lorsque l'on pressent l'omniprésence du végétal dans notre vie, on imagine sans peine son importance. Il est possible que cette reconnaissance tardive soit le fait d'un cliché tenace qui colle à l'ethnobotanique, assimilée trop souvent à une science tournée vers le passé. Or ce n'est vraiment pas le cas, car elle s'attache aussi à décortiquer les liens présents et futurs. À ce titre, l'ethnopharmacologie, branche importante de l'ethnobotanique, collecte les savoirs médicinaux liés aux plantes afin de permettre aux savants de trouver de nouvelles molécules qui, transformées en médicaments, nous soigneront peut-être demain... Un bel exemple d'interdisciplinarité, fondement même de l'ethnobotanique.
Un mot de l'auteur :
Le point de départ de «L'Herbier oublié», c'est une trouvaille, un de ces vieux trucs qui appartiennent aux aïeux et dont on ne sait que faire quand ils partent.
Trouvée dans un grenier, une vieille chemise grise poussiéreuse, un herbier de près de 100 ans...
«C'est quoi ce truc ?», fut sans doute la réaction première. «Des plantes sèches collées sur des feuilles de papier, ils n'avaient vraiment rien à faire à l'époque !».
Et puis l'heure de l'apéritif arrive, une main innocente tire au hasard une feuille de la chemise grise. Chaque planche passe de mains en mains et fait le tour de la table.
«C'est quand même beau, non !» ose quelqu'un. «Oh oui, et drôlement bien conservé, dis l'autre.» «Eh, tu as vu, toute les petites notes sur chaque plante ?»
«Moi je sais qui ça va intéresser, ce truc...»
«Fred, regarde ce que j'ai trouvé !» Et le Fred en question, qui n'était qu'un éditeur, jeune et modeste d'accord, mais un intuitif, a aimé !
Et il venu me trouver, parce qu'il savait que je m'intéressais aux «mauvaises herbes»...
Ainsi l'herbier, oublié dans un grenier, est devenu un herbier retrouvé. Et pour conclure sur une anecdote, «L'Herbier oublié» a été mon premier travail de commande ! La pression... Eh bien croyez-moi si vous voulez, mais j'ai pris beaucoup de plaisir à me pencher sur ces vieilles planches là, et j'espère que ce plaisir sera partagé !
Bernard Bertrand
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