Extrait :
Prendrait-on le potier pour l'argile ?
Quel renversement des rôles !
Prendrait-on le potier pour l'argile ?
L'oeuvre dirait-elle de l'ouvrier : «Il ne m'a pas faite» ?
Le vase dirait-il du potier : «Il n'y entend rien» ?
ISAÏE 29, 15-16.
Notre civilisation est intimement liée à l'histoire d'un enchantement, celui de la révélation du christianisme dont toute la culture occidentale découle. Même si l'on cherche à dénigrer l'enchantement en le reléguant au rayon du merveilleux et de l'heroic fantasy, et à l'effacer de la mémoire dite collective et des manuels scolaires, les traces laissées par les monuments, les oeuvres d'art, les écrits, les compositions musicales sont suffisantes pour noter que cette tendance à nier ce qui est procède d'une contre-culture illusoire, d'une culture à rebours.
Le cadre spirituel et sacré de cet enchantement que le christianisme a patiemment construit depuis des millénaires est rejeté en bloc, voire diabolisé, au point que le patrimoine culturel de l'Europe veut se dégager à tout prix de son empreinte. Quelle étrangeté ! Ce patrimoine, composé essentiellement d'oeuvres au sujet chrétien, continue contre vents et marées à transmettre son héritage et la grâce qui y est attachée : des touristes venus du monde entier photographient ces chefs-d'oeuvre artistiques comme perles de l'humanité.
Dans cette situation, il convient de dresser un constat, celui de la perte du sacré, du désenchantement et de la «déchristianisation» de l'art dans toutes ses disciplines. Il convient de le dresser aussi pour l'Église coupée du monde des artistes, même si quelques expériences de convenance maintiennent des liens de circonstance. L'époque d'une Église formatrice et inspiratrice des artistes est, hélas, bien révolue. Même si «ce qui a été, c'est ce qui sera ; ce qui s'est fait, c'est ce qui se fera : rien de nouveau sous le soleil» (Eccl 1, 9), ce désenchantement du monde dans son vieillissement l'éloigné de sa source et de facto il perd la proximité spirituelle nécessaire à son équilibre et à la paix. Comme le dit la métaphore du prophète Jérémie : «Ils ont abandonné la Source des eaux vives et ils ont creusé pour eux des citernes fissurées.»
Il ne s'agit pas de considérer ce qui était avant comme parfait ou meilleur, d'estimer le passé toujours supérieur à ce que nous pouvons être ; simplement, l'homme vit une histoire et, dans cette histoire, il y a des points de convergences et des apex exemplaires, comme le fut le XIIe siècle, qui marque un tournant décisif dans l'art occidental sous toutes ses formes. Ces apex sont des «moments de jeunesse», des fulgurances d'aigles, comme le rappelle saint Augustin : «Le monde vieillit, le Verbe demeure jeune à jamais. Ne crains pas, ta jeunesse reviendra comme revient celle de l'aigle.»
(...)
Présentation de l'éditeur :
L'époque contemporaine ne serait-elle pas celle de la profanation du Beau ? De l'art pariétal jusqu'aux oeuvres contemporaines, l'évolution de la création artistique témoigne dans l'ensemble d'un affadissement qui provient d'un oubli de l'être. Un lien semble s'être dénoué au cours du temps et l'homme contemporain se retrouve orphelin de la Beauté, qu'il ne reçoit plus comme don de Dieu.
Aussi, dans ce manifeste engagé, Daniel Facérias appelle-t-il d'urgence à une véritable insurrection, pour en retrouver l'ardente flamme.
Si l'on sait remonter à ses sources vives et se mettre à l'écoute des grandes voix prophétiques - celles du roi David comme celles des troubadours, de Mozart, de Van Gogh ou de Dali -, alors nous pourrons retrouver la «Beauté qui sauve», cette empreinte du Verbe que tout être humain, quelle que soit sa culture, est à même de reconnaître.
La Beauté ne relève pas d'une quête esthétique, mais de la redécouverte de l'image de Dieu en l'homme. Elle est la splendeur de la Vérité.
Daniel Facérias, né en 1951, a soutenu un doctorat consacré aux chansons des troubadours avant de devenir auteur-compositeur-interprète. Atypique dans le milieu artistique français, il chante depuis trente ans la foi chrétienne. Daniel et Anne Facérias ont fondé en 2012, avec Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon, un mouvement qui invite les artistes à vivre la dimension spirituelle de l'art : Diaconie de la Beauté.
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