Travailler avec lacan - Couverture souple

Didier-Weill, Alain

Couverture souple

ISBN 10 : 2700724402 ISBN 13 : 9782700724400

Editeur : AUBIER, 2008

A propos du livre

Extrait :

Extrait de l'avant-propos :

Le terme de vérité se dit ordinairement à propos des propositions. Une proposition est vraie si elle correspond à un fait ou si, à l'exception de la copule près, elle entretient un rapport de mapping avec un fait. Selon une autre version, une proposition est vraie si elle dit de ce qui est qu'il est, et de ce qui n'est pas qu'il n'est pas.
Mais «vrai» se dit aussi assez couramment des objets. On dit, par exemple, que la couronne du roi de Syracuse était faite de vrai or, comme l'a démontré Archimède en forgeant le concept scientifique du poids spécifique. Mais on dit également d'un tel qu'il est un «vrai» homme, où «vrai» ne fait sans doute que trahir l'idéal phallique qui se glisse en contrebande sous le vocable d'homme. Je peux dire aussi que le général de Gaulle est un «vrai» homme d'État - où le même terme ne fait que traduire la conception, le plus souvent nébuleuse, que j'ai de l'homme d'État.
Aussi devons-nous distinguer entre les cas où «vrai» ne fait que traduire un idéal ou un point de vue qui renvoie, comble de mystification, à un objet qui se pose comme inaccessible, et ceux où le point de vue ou l'idéalisation crée l'objet, comme c'est le cas de la linguistique, au dire de Chomsky, pour ne pas parler de la géométrie euclidienne.
Entre ces deux extrêmes, celui où le point de vue fait l'inaccessibilité de l'objet et celui où il le produit, on peut distinguer des cas intermédiaires. C'est ainsi qu'un historien parle du «vrai» Descartes, ce qui signifie qu'il prétend définir le trait spécifique, celui qui fait l'originalité de l'oeuvre de ce philosophe - prétention dont la valeur scientifique se mesure à la consistance des arguments qui la soutiennent.
Si sur cette lancée on me demandait quel est le vrai Lacan, je répondrais que le trait distinctif de l'oeuvre de Lacan a consisté à théoriser les trois livres «canoniques» de Freud : L'Interprétation des rêves, Psychopathologie de la vie quotidienne et Le Mot d'esprit et ses rapports avec l'inconscient. Cette théorisation se résume dans cette proposition méconnue par les philosophes que la vérité parle. Ce qui ne veut pas dire qu'elle s'articule, mais qu'elle se signifie ; et c'est justement en tant qu'elle se retire du savoir qu'elle se signifie comme telle, comme vérité : c'est en tant qu'elle se retirait du savoir du médecin qu'était Freud que la limite de sa puissance s'est signifiée dans l'oubli de Signorelli.
Cette distinction entre vérité et savoir entraîne des conséquences pratiques. Elle implique la déchéance du moi du statut que lui allouait un Fenichel comme l'agent qui emploie les mots et comprend leur sens. Une autre altérité se découvre que celle du je, à telle enseigne que je dirais qu'à moins de s'enraciner dans un dogme ou dans la croyance la pensée procède de l'impensable, car un sujet ne saurait à la fois dire ce qu'il pense et retracer la genèse de sa pensée. L'acte psychanalytique ne s'adresse jamais à un tu qui, fût-il baptisé d'inconscient, ne sera jamais que l'ombre de l'âme antique proposée à l'adage socratique : «Connais-toi toi-même.» Il implique une désubstantification extrême du sujet et se borne à reconnaître ce qui, dans la bouche de l'analysant, s'avère être le signifiant de l'Autre en lui.

Présentation de l'éditeur :

Présenté par Alain Didier-Weill et Moustapha Safouan

Travailler avec Lacan

Au cours d'une de ces réunions tendues qui ont précédé la dissolution de la Société française de psychanalyse, en 1964, Lacan faisait remarquer que les méthodes d'un analyste «ne se jugent que de l'intérieur ou selon leurs résultats - et mes résultats sont là : "C'est vous !"» Ce livre contient un ensemble de témoignages qui, sans prétendre saisir le «vrai Lacan», donneront au lecteur une vue de l'intérieur de ses méthodes d'analyste, de superviseur et d'enseignant.
Trois générations d'analystes - anciens analysants et anciens analystes en contrôle, marqués par les scissions qui ont contribué à modeler la communauté psychanalytique (1953, 1963 et 1981) - évoquent ici le travail avec Lacan : dans l'analyse, son aptitude à manier la dimension affective afin de rendre l'analysant disponible pour le travail de l'inconscient ; sa manière de nouer les catégories (l'imaginaire, le symbolique, le réel) ; sa capacité à former des analystes capables de théoriser à leur tour ; sa disponibilité fondée sur la façon qu'il avait de s'adresser au sujet de l'inconscient ; sa conception de la responsabilité de superviseur, qui ne consiste pas à apprendre la psychanalyse à l'analyste, mais bien à l'aider à apprendre quelque chose de sa propre pratique ; sa faculté à saisir la culpabilité ailleurs que là où la conscience morale croit la trouver... Et enfin, transparaît dans ces témoignages le charisme que lui donnait, malgré lui, sa créativité.

Cet ouvrage est présenté par Alain Didier-Weill, analyste, auteur notamment de Les Trois Temps de la Loi (Seuil, 1995), Invocations. Dionysos, Moïse, saint Paul et Freud (Calmann-Lévy, 1998), Lila et la Lumière de Vermeer. La psychanalyse à l'école des artistes (Denoël, 2003) et Moustapha Safouan, analyste, qui a publié entre autres ouvrages : La Parole ou la Mort (Seuil, 1993), Lacaniana : les séminaires de Jacques Lacan (Fayard, 1998).

À propos de cette édition

• Éditeur: AUBIER
• Date d'édition: 2008
• ISBN 10: 2700724402
• ISBN 13: 9782700724400
• Reliure: Broché
• Nombre de pages: 182