L'�poque d�nou�e - Couverture souple

Granel, G�rard

Couverture souple

ISBN 10 : 2705683321 ISBN 13 : 9782705683320

Editeur : Hermann, 2012

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Extrait :

Prolog im Himmel : L'Invention platonicienne de l'�me

C'est de psuch�, � vrai dire, qu'il s'agit, dont il faudrait voir si anima est bien le double, et dont il est certain que notre ��me� ne l'est pas.
Il s'agit de psuch� parce que nous ne quittons pas le texte de Platon, qui parle grec, et que nous tenons que les langues pensent. Avant donc de �d�signer une r�alit� - s'il en vient jamais l� -, le mot psuch� signifie une certaine fa�on d'�tre dans l'ordre du mouvement. Ce qui appartient au mouvement sur le mode du se mouvoir (et non de l'�tre-mu-mouvant), cela poss�de la psuch�, cela est empsuchon. Plus rien d'une telle d�termination ontologique de l'�tant en mouvement par le mode de son mouvement ne subsiste dans le fran�ais ��me�, h�ritier d'une longue lign�e philosophique dont le point de d�part est justement le corpus platonicum, le corps d'�criture dans lequel Platon a mis �toute son �me�, sorte de Tombeau-pour-Socrate o� se r�alise et s'apaise � la fois le ressentiment de l'�l�ve d�laiss� envers cet ancien ma�tre, tout en puissance et en paroles, et tellement entier (� prendre ou � laisser) qu'il faut attendre sa mort pour le diviser - pr�cis�ment en un corps et une �me - et pouvoir enfin en prendre et en laisser, le r�-�crire �en v�rit�, c'est-�-dire selon la loi de l'ancien d�sir : mon Socrate, � moi Platon.
De ce qui a mis en mouvement l'�criture � laquelle nous devons le texte platonicien, nous ne dirons cependant rien ici. Rien par cons�quent sur les �motivations� qui font que l'invention de l'�me (et donc du corps, la th�orie de l'�me et celle du corps �tant une seule et m�me) provient � son tour des m�andres du rapport de Platon � Socrate et de son besoin de d�nier ce rapport en le refictionnant post mortem de fond en comble. Nous nous en tiendrons au texte m�me, et � y rep�rer les voies et moyens d'une invention de l'�me, pr�cis�ment comme effet de texte.
Pr�cisons d'abord que le terme d'�invention� a �t� choisi ici pour son sens banal, qui relie la fabrication ing�nieuse (toujours d'une sorte de machine, merveilleusement simple ou merveilleusement compliqu�e, en vue d'un effet pratique) � l'imagination d�lirante (�Qu'est-ce que tu vas encore inventer l� ?�).
Car, si les langues pensent, les discours fabulent. Si les premi�res, au lieu de d�signer le �r�el�, en disent le possible, les seconds construisent des fictions qui ne sont pas toujours le corps scripturaire du possible, mais qui peuvent aussi bien donner corps � un pseudo-possible impossible. Tous les concepts, disons-nous, sont des �ficta�, en ceci qu'ordonn�s � d�gager l'essence, ils sont toujours expos�s � lui donner un air r�el dans le discours ; mais certains sont, en outre, produits par un d�tournement de l'essence (jamais donc n'importe comment : rien de plus n�cessaire dans ses moyens que le fabuleux logique). Qui dit d�tournement dit strat�gie et proc�dure, quand celles-ci doivent �tre rep�rables dans le texte, quand bien m�me il serait tiss� avec un art supr�me pour cacher qu'il invente ce qu'il produit et para�tre simplement le d�couvrir.

Pr�sentation de l'�diteur :

�L'�poque d�nou�e� s'attache � d�m�ler les fils embrouill�s de la Tradition afin de comprendre ce qui nous arrive, � nous les tard venus. � cette fin, G�rard Granel s'engage dans une analyse historico-historiale visant � d�terminer la �loi la plus intime� de notre monde. Le noeud th�matique qu'il retient dans les textes r�unis dans ce volume est celui de l'�automate� dont il montre qu'il poss�de un triple nouage historique : la substantification par Platon de la psych� automate, qui dessine la figure de la pens�e comme mathesis ; l'universalisation par Descartes de l'id�e de mathesis, dont le moteur est une logique de l'infinit� induisant un devenir-ing�nieur de l'esprit et une d�termination du savoir comme savoir �automate� ; la propagation, mise en �vidence par Marx, du principe d'infinit� � tous les domaines d'activit�, qui transforme le monde lui-m�me en une vaste �accumulation de marchandises� ne connaissant d'autre loi que celle impos�e par la �substance automatique�.
D�m�ler le noeud de l'automate fait donc lever la question suivante, qui fut celle de Nietzsche avant de devenir celle de Heidegger, et qui est aussi celle � laquelle nous confronte le versant non m�taphysique des analyses de Marx : comment nous d�partir de notre appartenance � un monde qui semble p�rimer tout avenir ?

G�rard Granel (1930-2000) a enseign� la philosophie, pendant quelques trente ans, � l'universit� de Toulouse. Son oeuvre, ancr�e dans le champ de la ph�nom�nologie, s'inscrit dans le sillage des questions heidegg�riennes avec lesquelles elle entretient un libre rapport. Elle poursuit un double objectif : penser le monde a-mondialisable (l'�offre du sensible�) en se restant � l'�coute de certaines questions husserliennes n�glig�es par Heidegger (telles la question de l'homo percipiens, ou celle de la �mat�rialit� logique�), et d�terminer la �figure historiale� du monde en voie de mondialisation en mettant Heidegger en dialogue avec Marx.

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