Revue de presse :
Comme à son habitude, le facétieux Bayard jongle avec les registres, puisant également ses exemples dans le sport et l'anthropologie. Et n'hésite pas à prétendre qu'il a lui-même pris le Transsibérien, séjourné sur l'île de Pâques, couru le marathon de Boston, descriptions lyriques à l'appui ! "A chaque fois, le "je" de mes livres n'est pas moi, enfin pas tout à fait... Il ne faut pas prendre au pied de la lettre cette inutilité du voyage que je formule, pas plus que la soi-disant inutilité de la lecture que j'ai prônée", tient à préciser ce grand lettré. Et, s'il avoue s'adresser à un lecteur "astucieux", pas question de le barber. "Je fais en sorte que mes livres ne soient pas trop longs et rapportent autant que possible des situations intéressantes et drôles." Pari de nouveau tenu avec cet opus qui fait voyager en première classe intellectuelle. (Delphine Peras - L'Express, janvier 2012)
Je reviens à l'imagination du chasseur d'éclats, celle qui se trouve au centre du nouveau livre de Pierre Bayard, Comment parler des lieux où l'on n'a pas été ?, où apparaît l'hypothèse qu'il est plus facile de parler savamment et avec de plus larges connaissances d'un lieu où l'on n'est pas allé que de parler de lui après avoir fait la bêtise de le visiter. Malgré tout, je continue à glisser en ballon vers Kaliningrad. Je ne m'attends pas à voir grand-chose, mais je ne peux pas arrêter le ballon. Quant à ma manière préférée de voyager, je dirai simplement que, très souvent, sans bouger de chez moi, j'écris au préalable ce que je vais vivre dans le voyage le plus immédiat que j'ai en vue et que, arrivé à mon point de chute, j'essaie - en général avec succès - de vivre ce que j'ai écrit...
Parmi les cas évoqués par Bayard, Jules Verne est peut-être le plus paradigmatique. Mais il en est d'autres qui ne sont pas à négliger : les techniques voyageuses de Chateaubriand ou celles du grand Emmanuel Carrère, les cas extravagants de Cendrars ou de Karl May... J'ai surtout été ému par le cas d'Edouard Glissant qui montre à quel point est fragile la frontière qui sépare voyage et non-voyage. (Enrique Vila-Matas - Le Monde du 26 janvier 2012)
Après les livres qu'on n'a pas lus, Pierre Bayard explore les voyages qu'on n'a pas faits...
Fidèle à son principe de typologie fébrile (jadis au summum dans Comment améliorer les oeuvres ratées ?), Bayard commence par examiner les différents types de lieux où l'on n'a pas été, faisant magnanimement place à ceux dont on a entendu parler (un genre assurément impur) et même à ceux qu'on a un peu parcourus, qui sont limite hors sujet. Puis il passe aux circonstances qui poussent à parler des lieux qu'on ne connaît pas. Sous couvert de traiter quelques points noirs de vraie théorie littéraire (la notion d'auteur, de fiction, de valeur...) par le prisme du délire, Bayard fournit en réalité des ouvrages fort pratiques. Si critiques, profs, mondains avaient fait leur miel des Livres qu'on n'a pas lus, ces Lieux où l'on n'a pas été s'adressent cette fois aux écrivains, journalistes, anthropologues et même aux sportifs. (Eric Loret - Libération du 2 février 2012)
En élaborant ici le concept de «voyageur casanier», l'auteur se conforme en réalité à une inlassable pratique dont Xavier de Maistre demeure, si l'on peut dire, le pèlerin fondamental avec son fameux «Voyage autour de ma chambre»...
Marco Polo n'a peut-être pas dépassé Constantinople. Emmanuel Kant, qui enseigna la géographie, n'a jamais quitté Königsberg. Il assurait que, de là, avec une bonne bibliothèque, on pouvait prendre un point de vue sur le monde entier. Et le plus fort, grâce à ces pionniers dont Bayard se veut l'émule, c'est qu'on n'est même pas obligé d'y aller pour le savoir. (Jean-Louis Ezine - Le Nouvel Observateur du 16 février 2012)
Extrait :
Les inconvénients des voyages ont été suffisamment étudiés pour que je ne m'attarde pas sur ce sujet. Démuni face aux animaux sauvages, aux intempéries et aux maladies, le corps humain n'est à l'évidence nullement fait pour quitter son habitat traditionnel et moins encore pour se déplacer dans des terres éloignées de celles où Dieu l'a fait vivre.
A ces éléments naturels sur lesquels l'être humain n'a que peu de prise, il convient d'ajouter les désagréments qu'il occasionne par sa propre violence. Contrairement à ce dont rêvaient certains utopistes, ce monde n'est nullement plus sûr qu'auparavant et j'ai du mal à comprendre, ayant la chance de vivre dans un endroit relativement protégé, les raisons qui pourraient me conduire à le quitter pour prendre le risque de recevoir un mauvais coup dans des terres hostiles.
Mais les dangers des voyages ne s'arrêtent pas là. À trop se fixer sur leurs inconvénients physiques, on perd de vue les perturbations psychologiques qu'ils peuvent susciter. Après les travaux de Freud et d'autres psychiatres qui ont étudié les différents syndromes du voyageur, nous savons aujourd'hui que partir loin de chez soi est non seulement susceptible de provoquer des troubles psychiques, mais peut même conduire à devenir fou.
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