Paroles de paix en temps de guerre - Couverture souple

Collectif; Claude Gauvard; Dominique Barthélemy; Claire Gantet; Jean-Clément Martin; Violaine Sebillotte-Cuchet; Francis Latour

Couverture souple

ISBN 10 : 2708905341 ISBN 13 : 9782708905344

Editeur : Privat, 2006

A propos du livre

Extrait :

Écrire l'histoire de la paix

Nicolas Offenstadt, Rémy Cazals et Sylvie Caucanas

L'historien de la paix se trouve d'emblée confronté à de sérieux écueils.

Le premier est en quelque sorte moral et téléologique tout à la fois. Beaucoup de travaux sur la paix, y compris historiques, ont une tonalité militante qui fait du sujet un idéal. Le mélange entre la science et l'engagement caractérise, dans une large mesure, les Peace Studies ou la Frie-densforschung, ce sous-champ de la recherche en sciences sociales qui s'est constitué dans les pays anglo-saxons, au nord de l'Europe et en Allemagne à partir des années 1950, en lien avec des engagements politiques progressistes. Le rapport y est fort entre le travail des chercheurs et les perspectives contemporaines, celles du temps court (ainsi, éviter tout conflit atomique dans les années 1950 et 1960) et du temps long (préparer l'avènement de nouvelles sociétés non violentes). Les chercheurs demandent parfois à la paix du passé d'être un guide pour celle du présent, historia magistra vitae.
Les pacifistes eux-mêmes, qui comptent en leur sein de nombreux intel­lectuels, juristes, historiens, théologiens, ont souvent mis en avant, depuis le XIXe siècle, une histoire de la paix à travers les âges qui conforte leurs enga­gements présents. Cette histoire croise les figures morales qui ont prôné la paix ou refusé les conflits (du Christ à Gandhi) et le développement du droit et des institutions internationales (en recherchant les précurseurs antiques et médiévaux dans telle ou telle ligue, tel ou tel plan de paix). En face, une partie de l'historiographie, avec de nombreuses nuances, a traité de l'engagement pour la paix, notamment dans le monde contemporain, par un regard critique inscrit dans la dénonciation du renoncement (le pacifisme mène à l'abaissement, à Munich, etc.).
Il convient donc d'historiciser ces enjeux historiographiques et de se défier des biais induits.
Le deuxième écueil est propre au terme même de «paix», qui recèle un potentiel sémantique considérable plus ou moins déployé selon les époques et les régions. La paix s'apparente, selon les contextes, à une disposition inté­rieure, à l'harmonie sociale, à l'ordre social, à la concorde civique, à l'absence de guerre, à la cessation des hostilités, pour ne citer que cela et sans compter les chevauchements d'un sens sur l'autre. Il y a donc toujours risque de dilution des enjeux ou de confusion des registres si l'on ne s'efforce pas de bien délimiter ce que la paix veut dire pour les acteurs qui l'invoquent ou la négocient, ou si l'on cherche trop à ramener le concept à une essence. La tâche est complexe, car les acteurs eux-mêmes restent parfois dans l'incer­titude sémantique, quand ils ne jouent pas des multiples sens du terme «paix». À lire les contributions qui suivent, on sera aussi frappé par le flou aux frontières entre la paix, la guerre ou le conflit, par l'entremêlement des mots et des situations.
Charles Wright Mills a résumé ainsi ces deux écueils : «La paix : ce mot est si bon qu'il convient de s'en méfier ; il a signifié et signifie tant de choses pour un si grand nombre de gens ! Sans cela, on ne pourrait tomber d'accord à son sujet si promptement et de façon si générale. Tout bon mot est ainsi : il sert à tout le monde, et il dissimule par conséquent de nombreuses idées politiques.»

Présentation de l'éditeur :

En temps de guerre, rares sont ceux qui résistent au fracas des armes. Mais les proclamations de paix ne se limitent pas à celles des pacifistes militants, hommes et femmes. Le mot même de «paix» est si variable dans sa définition et si malléable dans son utilisation qu'il peut être saisi par les institutions, religieuses ou laïques, et les gouvernants pour servir des intérêts multiples.

Comment embrasser dans une même analyse les cris de révolte des pacifistes intransigeants et les discours de paix les plus officiels ? C'est tout l'enjeu de ce volume, qui rassemble les meilleurs spécialistes, de l'Antiquité gréco-romaine aux guerres du xxe siècle, pour donner à comprendre toutes les paroles de paix dans leurs contextes : Comment individus et groupes se saisissent-ils des paroles - et des images - de paix pour construire leur identité ou faire irruption dans l'espace public ? Comment se déploient les rivalités pour imposer la définition légitime de la paix ? Comment les paroles de paix contribuent-elles à façonner les débats de leur temps ? Chacun offre ici des réponses neuves, en une analyse comparative, depuis les conflits des Grecs et des Romains jusqu'aux grands affrontements du xxe siècle en passant par les rivalités féodales et les guerres de Religion.

Collectif sous la direction de :
Rémy Cazals est professeur à l'université de Toulouse Le Mirail.
Nicolas Offenstadt est Maître de conférences à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
Sylvie Caucanas est directrice des Archives de l'Aude.

À propos de cette édition

• Éditeur: Privat
• Date d'édition: 2006
• ISBN 10: 2708905341
• ISBN 13: 9782708905344
• Reliure: Broché
• Nombre de pages: 330