Extrait :
Sur le coup des cinq heures, Leïla m'a envoyé un texto pour me dire que l'on gagnerait du temps à se retrouver directement devant la station de métro Père-Lachaise à dix-neuf heures plutôt qu'à ma pompe. J'ai répondu : pas de souci. J'y serai. Puis, je me suis enfermée dans mon bureau pour faire mes comptes.
Une belle journée.
Rien qu'aujourd'hui j'ai eu cinq clients. Une retraitée, ancienne directrice d'école privée, m'a pris le cercueil Chenonceau en chêne clair aux poignées de levage en cuivre finement ouvragées, un monument funéraire en granit rose, une plaque mortuaire du même granit dédiée à son cher disparu. Pour les funérailles, elle a désiré le grand jeu avec chorale, enfants de choeur, prières récitées par un prêtre orthodoxe et rapatriement de la dépouille dans le caveau de famille à Milhac dans le Lot - une virée au coeur de la France qui a considérablement lesté sa facture.
La petite gerbe de fleurs ceinte du ruban violet sur lequel est écrit en lettres floquées argentées «A mon époux dans mon coeur à jamais tu demeures» ; je lui en ai fait cadeau.
Les autres clients, des bobos mécréants qui habitent les nouveaux immeubles de grand standing autour des Buttes-Chaumont, sont partis sur de la crémation.
Très en vogue, ces dernières années, la crémation dans le quartier.
Le nom du défunt, sa date de naissance, sa date de décès, gravés sur le granit noir de l'urne cinéraire, j'en ai fait cadeau, aussi. C'est le petit geste commercial de la Maison Reverdy, le supplément d'âme qui fait la différence avec la concurrence amicale mais néanmoins féroce de mes voisins et rivaux.
Juste avant que je ne ferme la boutique, l'hôpital Lariboisière m'a envoyé un mail pour m'informer que leur morgue affichait complet et qu'il était urgent que je les soulage dès demain matin d'une paire de SDF, morts d'hypothermie sur un banc du square de Belleville, et d'un noyé repêché canal Saint-Martin, à l'écluse de l'Hôtel du Nord.
J'ai répondu : Pas de souci. Je vous envoie mes gars à la première heure. Bien cordialement, Adèle Reverdy.
Présentation de l'éditeur :
Adèle Reverdy est une jeune femme pleine de complexes et, pour comble de malheur, les hommes la fuient dès qu elle avoue son métier de croque-morts.
Mais sa vie va changer le jour de ses trente ans. Parmi les invités venus à la fête organisée par sa soeur, il y a Léo, ancien trapéziste devenu aveugle à la suite d un accident puis masseur aux Thermes du Paradis. Un soleil noir dans la vie d Adèle qui, aidée de sa meilleure amie Leila, talentueuse thanatopractrice, va tout faire pour conquérir le coeur de Léo.
Un roman plein d humour et de tendresse où l on découvre que l on ne voit bien qu avec le coeur et que l essentiel est invisible pour les yeux.
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