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Extrait :
La vie de château
Lundi 18 mars 1861. La semaine débutait. Le gros poêle de fonte ronronnait dans un coin de la classe et tous les élèves se tenaient debout à côté de leurs pupitres.
- Asseyez-vous !
Après avoir posé sur le bureau son cartable à soufflets, l'institutrice monta sur l'estrade et traça sur le tableau noir la date du jour en lettres penchées et régulières. Avec la même application qu'elle exigeait de ses élèves, elle dessinait les courbes, les pleins et les déliés, faisant crisser la craie sur la surface de bois peint. Après qu'elle eut écrit les premiers mots et chiffres de la journée, elle dit à haute voix sur quel sujet porterait ce début de matinée, sans provoquer le moindre étonnement car chacune des trente-cinq élèves savait bien que chaque semaine débutait par la traditionnelle «leçon de morale».
«Les bons serviteurs font les bons maîtres.» Elle avait à peine fini d'écrire cette phrase qu'elle se retourna pour faire face à la classe et se mit à commenter la maxime relue à haute voix.
- Je vous l'ai déjà dit, l'école vous permet d'accéder au savoir grâce à l'étude de l'orthographe, du calcul, de l'histoire ou de la géographie. Mais pour devenir des femmes dignes et honnêtes, respectées et vertueuses, vous devez apprendre la morale, en connaître les principes et les respecter en toute occasion. Plus tard vous serez adultes, vous fonderez un foyer et, à votre tour, vous aurez des enfants auxquels il vous faudra enseigner ces principes qui auront guidé votre vie. Vous serez alors leurs préceptrices...
Ce dernier mot sonnait agréablement à l'oreille de Marie-Aurélie. Du premier rang, où elle suivait avec une attention soutenue les leçons de la maîtresse, elle distinguait les attitudes et les regards de cette vieille enseignante qu'elle sentait soucieuse de faire passer ses convictions en offrant à ses élèves un peu plus que ses connaissances. La jeune écolière admirait le savoir de l'enseignante, et elle éprouvait toujours la même fascination devant l'éclectisme et l'étendue de ses connaissances : comment pouvait-elle enseigner avec autant d'aisance des matières aussi éloignées que la grammaire et les mathématiques, l'histoire et les sciences naturelles ?
- Ainsi, il est fort possible que, vos études terminées, vous soyez placées comme apprenties ou domestiques. Vous aurez alors de nouvelles tâches et de nouveaux devoirs. Il vous faudra être irréprochables et déférentes pour vos maîtres ou vos patrons, savoir leur obéir pour tout ce qui regarde le service, prendre soin de leurs intérêts comme vous le feriez pour les vôtres, et surtout garder en toutes circonstances la plus grande probité.
L'institutrice insistait sur chaque mot, comme pour mieux capter l'attention des élèves et leur imprimer dans la mémoire cette phrase importante.
- Nous allons parler aujourd'hui des devoirs des serviteurs et des ouvriers à l'égard des maîtres et des patrons.
Le livre de Morale et Instruction civique, dont la couverture rose était usée et écornée par trois générations d'écoliers, était ouvert à la leçon indiquée. Marie-Aurélie avait hâte de découvrir l'illustration : cette fois, c'était une gravure représentant un atelier de mécanique ; devant un établi, deux jeunes ouvriers, dont l'un tenait sa casquette à la main, suivaient tête baissée les explications d'un professeur portant un complet-veston aussi noir que son collier de barbe et tenant un outil que l'élève ne parvenait pas à identifier. L'institutrice poursuivait sa leçon mais, contrairement à son habitude, Marie-Aurélie n'y prenait plus le même intérêt. Elle s'était laissé happer dans l'image du livre et n'entendait plus que la voix lointaine de la maîtresse couverte par le bruit de machines et de tôles résonnant bruyamment sous les coups de marteau...
- Marie-Aurélie, vous ne suivez pas ! L'institutrice avait quitté l'estrade et s'était placée devant l'écolière, lui intimant l'ordre de répéter ce qu'elle venait de dire.
- Si nous sommes apprenties, nous devons... nous devons bien écouter...
- Justement, vous feriez mieux d'écouter. Inutile de chercher des mots dont le sens semble vous échapper.
Se sentant fautive, elle ne sut plus que dire. Une intense émotion lui nouait la gorge, elle sentit un tremblement la gagner tout entière et demeura pétrifiée, face à l'enseignante qui la regardait par-dessus ses lunettes d'écaille avec un air de réprobation mêlé d'étonnement.
Présentation de l'éditeur :
Lundi 18 mars 1861. La semaine débutait. Le gros poêle de fonte ronronnait dans un coin de la classe et tous les élèves se tenaient debout à côté de leurs pupitres.
- Asseyez-vous !
Après avoir posé sur le bureau son cartable à soufflets, l'institutrice monta sur l'estrade et traça sur le tableau noir la date du jour en lettres penchées et régulières. Avec la même application qu'elle exigeait de ses élèves, elle dessinait les courbes, les pleins et les déliés, faisant crisser la craie sur la surface de bois peint. Après qu'elle eut écrit les premiers mots et chiffres de la journée, elle dit à haute voix sur quel sujet porterait ce début de matinée, sans provoquer le moindre étonnement car chacune des trente-cinq élèves savait bien que chaque semaine débutait par la traditionnelle «leçon de morale».
«Les bons serviteurs font les bons maîtres.» Elle avait à peine fini d'écrire cette phrase qu'elle se retourna pour faire face à la classe et se mit à commenter la maxime relue à haute voix.
- Je vous l'ai déjà dit, l'école vous permet d'accéder au savoir grâce à l'étude de l'orthographe, du calcul, de l'histoire ou de la géographie. Mais pour devenir des femmes dignes et honnêtes, respectées et vertueuses, vous devez apprendre la morale, en connaître les principes et les respecter en toute occasion. Plus tard vous serez adultes, vous fonderez un foyer et, à votre tour, vous aurez des enfants auxquels il vous faudra enseigner ces principes qui auront guidé votre vie. Vous serez alors leurs préceptrices...
Ce dernier mot sonnait agréablement à l'oreille de Marie-Aurélie. Du premier rang, où elle suivait avec une attention soutenue les leçons de la maîtresse, elle distinguait les attitudes et les regards de cette vieille enseignante qu'elle sentait soucieuse de faire passer ses convictions en offrant à ses élèves un peu plus que ses connaissances. La jeune écolière admirait le savoir de l'enseignante, et elle éprouvait toujours la même fascination devant l'éclectisme et l'étendue de ses connaissances : comment pouvait-elle enseigner avec autant d'aisance des matières aussi éloignées que la grammaire et les mathématiques, l'histoire et les sciences naturelles ?
- Ainsi, il est fort possible que, vos études terminées, vous soyez placées comme apprenties ou domestiques. Vous aurez alors de nouvelles tâches et de nouveaux devoirs. Il vous faudra être irréprochables et déférentes pour vos maîtres ou vos patrons, savoir leur obéir pour tout ce qui regarde le service, prendre soin de leurs intérêts comme vous le feriez pour les vôtres, et surtout garder en toutes circonstances la plus grande probité.
L'institutrice insistait sur chaque mot, comme pour mieux capter l'attention des élèves et leur imprimer dans la mémoire cette phrase importante.
- Nous allons parler aujourd'hui des devoirs des serviteurs et des ouvriers à l'égard des maîtres et des patrons.
Le livre de Morale et Instruction civique, dont la couverture rose était usée et écornée par trois générations d'écoliers, était ouvert à la leçon indiquée. Marie-Aurélie avait hâte de découvrir l'illustration : cette fois, c'était une gravure représentant un atelier de mécanique ; devant un établi, deux jeunes ouvriers, dont l'un tenait sa casquette à la main, suivaient tête baissée les explications d'un professeur portant un complet-veston aussi noir que son collier de barbe et tenant un outil que l'élève ne parvenait pas à identifier. L'institutrice poursuivait sa leçon mais, contrairement à son habitude, Marie-Aurélie n'y prenait plus le même intérêt. Elle s'était laissé happer dans l'image du livre et n'entendait plus que la voix lointaine de la maîtresse couverte par le bruit de machines et de tôles résonnant bruyamment sous les coups de marteau...
- Marie-Aurélie, vous ne suivez pas ! L'institutrice avait quitté l'estrade et s'était placée devant l'écolière, lui intimant l'ordre de répéter ce qu'elle venait de dire.
- Si nous sommes apprenties, nous devons... nous devons bien écouter...
- Justement, vous feriez mieux d'écouter. Inutile de chercher des mots dont le sens semble vous échapper.
Se sentant fautive, elle ne sut plus que dire. Une intense émotion lui nouait la gorge, elle sentit un tremblement la gagner tout entière et demeura pétrifiée, face à l'enseignante qui la regardait par-dessus ses lunettes d'écaille avec un air de réprobation mêlé d'étonnement.
Le destin romanesque d'une fille de gendarme champenois qui épouse un prince algérien descendant du prophète. En 1872, cette catholique défiant les mœurs établies va vivre une véritable épopée au cœur du désert.
Bercée toute son enfance par les récits de son père sur la conquête algérienne, Aurélie Picard ne pensait pas un jour rencontrer Ahmed Tidjani, descendant du prophète et chef d'une influente confrérie du Sud algérien. Elle en tombe pourtant amoureuse un soir de 1870 et se marie avec lui, bravant les tabous de l'époque ? dont l'interdiction par l'Église catholique de voir l'une de ses fidèles épouser un musulman. Elle n'a que 22 ans lorsqu'elle suit son mari dans cette Algérie lointaine.
Commence alors une extraordinaire aventure pour cette pionnière, qui construisit un palais dans les sables et mit en culture plusieurs centaines d'hectares de terre aride. Elle répudiera les premières épouses de son mari et s'imposera comme une excellente gestionnaire, très appréciée de la population. Même si son statut vacille à la mort de son mari, elle parvint tout au long de sa vie à redonner du souffle à son incroyable destin.
En plein XIXe siècle, le destin romanesque d'une femme hors-normes.
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- ÉditeurBelfond
- Date d'édition2000
- ISBN 10 2714437354
- ISBN 13 9782714437358
- ReliureBroché
- Nombre de pages360
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la princesse des sables
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BELFOND
(2007)
ISBN 10 : 2714437354
ISBN 13 : 9782714437358
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Paperback
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Description du livre Paperback. Etat : NEUF. Le destin romanesque d'une fille de gendarme champenois qui épouse un prince algérien descendant du prophète. En 1872, cette catholique défiant les moeurs établies va vivre une véritable épopée au coeur du désert. Bercée toute son enfance par les récits de son père sur la conquête algérienne, Aurélie Picard ne pensait pas un jour rencontrer Ahmed Tidjani, descendant du prophète et chef d'une influente confrérie du Sud algérien. Elle en tombe pourtant amoureuse un soir de 1870 et se marie avec lui, bravant les tabous de l'époque ? dont l'interdiction par l'Église catholique de voir l'une de ses fidèles épouser un musulman. Elle n'a que 22 ans lorsqu'elle suit son mari dans cette Algérie lointaine. Commence alors une extraordinaire aventure pour cette pionnière, qui construisit un palais dans les sables et mit en culture plusieurs centaines d'hectares de terre aride. Elle répudiera les premières épouses de son mari et s'imposera comme une excellente gestionnaire, très appréciée de la population. Même si son statut vacille à la mort de son mari, elle parvint tout au long de sa vie à redonner du souffle à son incroyable destin. En plein XIXe siècle, le destin romanesque d'une femme hors-normes. - Nombre de page(s) : 352 - Poids : 440g - Genre : Littérature française Romans Nouvelles Correspondance. N° de réf. du vendeur N9782714437358
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