"Si vous suivez les chemins balisés de la société, tout va bien, mais si vous vous en écartez pour emprunter un chemin de traverse, une déviation, alors là, d'étranges aventures vous attendent et nul ne sait où elles pourront vous mener." En 1991, dans l'introduction qu'il avait faite de l'édition de son album Arzach, Mœbius plantait le décor de l'élan qui l'amenait à la bande dessinée de science-fiction. De Bluberry à sa collaboration avec Jodorowsky pour la série l'Incal, l'itinéraire n'était, effectivement, pas "balisé".
C'est en 1970 que Jean Giraud, dessinateur des albums du célèbre lieutenant, entame sa seconde carrière et choisit pour cela le pseudonyme de Mœbius. Dès sa sortie, l'originalité d'Arzach a provoqué un choc dans le milieu de la bande dessinée. Réédité aujourd'hui sous une nouvelle maquette, l'album présente un univers fantasmagorique, plus proche du terrain de la poésie que de celui de la narration. Evocations oniriques et construction des symboles utilisés par la suite dans sa collaboration avec Jodorowsky, on y voit apparaître, notamment, son oiseau de béton, mi-ptérodactyle, mi-archange de la mort. Comme à l'orée du sommeil, lorsque les pensées glissent peu à peu dans l'irrationnel, l'auteur conduit son lecteur dans les tréfonds de mondes mystérieux et effrayants, disséqués par son trait, à nul autre pareil.
"J'ai lâché la bride de mon inspiration", dit-il. Entre rêve et cauchemar, d'une situation des plus ordinaires (une famille sur la route de ses vacances à l'île de Ré) aux mondes extraterrestres, il n'y a qu'un pas que Mœbius franchit ici avec talent et humour.--Laure de Montalembert-- -- Urbuz.com
C'est un étrange cavalier. Juché sur un drôle d'oiseau qui semble sorti tout droit de la préhistoire, il traverse des paysages intemporels. Son nom ? Arzach. Nul ne sait d'où il vient, ni quel est son but. Créé en 1975 dans le magazine
Métal hurlant, le personnage est issu de l'imagination féconde de l'un des plus fameux auteurs de bande dessinée : Jean Giraud, alias Moebius. Giraud s'est fait connaître avec les aventures du lieutenant Blueberry, un western qu'il a commencé à dessiner d'après les scénarios de Charlier et qu'il poursuit aujourd'hui en solo. En parallèle, il a bâti sous le nom de Moebius une oeuvre personnelle originale, teintée de fantastique et d'onirisme. Avec Arzach, l'auteur a voulu "plonger dans des mondes étranges, au-delà du visible".
Le résultat est envoûtant. Bande dessinée muette, sans dialogues ni scénario, Arzach intrigue, amuse, déconcerte. Et fascine par la puissance du trait de Moebius. Un jalon essentiel de l'histoire de la bande dessinée. --Gilbert Jacques