Extrait :
Introduction de Paul Burel Chroniqueur économique, Breton et fidèle ami de Guy Guilloux
L'or rose de Bretagne
Les pédants l'appellent «Nephrops norvegicus» ! Imprononçable, indigeste. Les vrais amateurs préfèrent souvent «la demoiselle de Loctudy», l'une des appellations les plus connues de la belle aux yeux couleur châtaigne. Et pour cause, la langoustine française a un passeport breton parfaitement à jour. Cela fait un bail qu'elle a pris ses principaux quartiers dans le chaudron océanique au large des Glénan, de Penmarc'h, de Groix, de Belle-Île. Et que ses ports d'attache privilégiés se nomment Concarneau, Le Guilvinec, Lesconil, Saint-Guénolé, Loctudy, Lorient, autant de havres de débarquement situés à quelques encablures des gisements. Grosso modo, 80 % de la production française, qui fait travailler environ 1 500 personnes, est débarquée dans les ports de la Bretagne sud ! Les Sables-d'Olonne, Le Croisic et La Cotinière, entre autres, assurent quasiment le reste.
Plutôt sédentaire de tempérament, la langoustine n'a pas vraiment de nationalité et de domicile fixe. En Europe, la «belle» navigue aussi bien dans les eaux de l'Islande que celles du Portugal et de la mer du Nord. Sa pêche qui monte en régime durant l'été se concentre sur l'Écosse. C'est là-haut, à Ullapool, Oban et autres Cambpbetown que l'on ramène à terre un bon tiers de la production communautaire, avec des chalutiers armés pour faire des marées de 3-4 jours. Suivent loin derrière l'Irlande et le Danemark. Et la France, qui puise son or rose en jouant l'atout maître de la fraîcheur, dans les vasières du golfe de Gascogne et de la Mer Celtique. Et plus marginalement en Corse.
Dans sa robe rose et diaphane il n'y paraît guère, et pourtant la langoustine préfère vivre de façon casanière dans les terriers vaseux qu'elle creuse méthodiquement, plutôt qu'à la surface limpide de la grande bleue. Son immense territoire de galeries s'étage de 15 à 800 mètres de profondeur ! Mais on la trouve rarement entre deux eaux, sauf quand la faim la tenaille au petit matin ou au crépuscule. C'est là, quand elle se laisse guider et emporter par son appétit insatiable de petits crustacés et de vers, qu'elle se fait (sur) prendre dans les chaluts des pêcheurs concarnois ou guilvinistes. La capture au chalut reste très largement dominante. Pour autant, les casiers se font désormais une belle place au soleil chez les «dragueurs» de la «demoiselle». A l'image de Denis Briant qui plonge les siens au large des Glénan. Tôt parti dans la nuit, tôt rentré dans l'après-midi, son «Ar re yaouank» (Les jeunes) livre ainsi des langoustines frétillantes à souhait, au mieux de leur forme, au meilleur de leur goût. «En casier les langoustines stressent moins et leur chair reste plus compacte», constate le patron de Trévignon. Récupérées en vivier, elles peuvent ainsi conserver leur fraîcheur et leur qualité pendant plusieurs jours.
La famille langoustine a des appellations souvent nationalisées : cigala en Espagne, scampi en Italie. Elle a même parfois des branches insolites dans son arbre généalogique. Ainsi, en 2010, elle s'est découverte dans les grandes profondeurs de la mer des Philippines une cousine lointaine, armée d'une grande pince en forme de scie interminable ! Sûrement destinée à faire un sort à tout prédateur qui aurait la velléité d'en découdre. Décidément faut pas les chatouiller les demoiselles, car avec leurs pinces elles savent se défendre, qu'elles soient de Concarneau, Belle-Île ou de Manille.
Présentation de l'éditeur :
Guy Guilloux, le chef étoile du restaurant La Taupinière à Pont-Aven, est tombé amoureux de la langoustine, que l'on appelle affectueusement «la demoiselle de Loctudy». Dans le premier livre gastronomique consacré au petit crustacé rose, il vous livre ses secrets de chef cuisinier en plus de 75 recettes, agrémentées de multiples conseils avisés.
La langoustine se prête à toutes les préparations et tous les modes de cuisson. Excellente, nature avec une simple mayonnaise. Elle reste la reine des plateaux de fruits de mer et sa rencontre avec le terroir est un régal. Exquise, crue, avec une saveur sucrée, en carpaccio ou en tartare sans artifice. Savoureuse tout simplement poêlée en aller-retour. Bref, elle est à elle seule une encyclopédie culinaire. Entre recettes raffinées et inventives, Guy Guilloux vous fait partager un talent rare : celui de marier créativité et simplicité. Profitez-en !
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