Extrait :
«ET CECI SE PASSAIT EN DES TEMPS TRÈS ANCIENS...»
(Victor Hugo)
Nous traînons, derrière nous, un lourd héritage livresque, du Voyage au centre de la terre de Jules Verne (1864) à La Guerre du feu de Rosny aîné (1911).
Les reconstitutions d'Hommes préhistoriques de certains musées nous semblent un peu dépassées. On ne prend plus au sérieux la triste Fuite de Gain par Cormon (1880), «échevelé, livide, au milieu des tempêtes», qui trône encore au musée d'Orsay, ni la statue de l'homme primitif de Paul Dardé (1930), lourd catcheur body-buildé à gros orteils simiens, niché dans la falaise des Eyzies (Dordogne).
Le cinéma et la bande dessinée ont pris la suite : L'Odyssée de l'espèce a fait courir les foules et les aventures de Rahan sont disponibles dans toutes les bonnes libraires.
Pourtant, au cours du XXe siècle, les recherches des préhistoriens ont bouleversé l'idée que les romanciers et les artistes se faisaient des temps anciens. Mais les livres de Préhistoire, avec leurs austères catalogues de silex taillés et leur vocabulaire abscons, n'encouragent guère les lecteurs.
Faire revivre la Préhistoire ? Pas si facile... Il va falloir être clair et bousculer quelques idées reçues.
LE CLOCHARD DE LA NUIT DES TEMPS
Voulez-vous un portrait-robot ? Voici un inventaire des poncifs et des idées toutes faites.
L'homme des temps préhistoriques, pauvre hère en haillons, apparaît comme un clochard de la nuit des temps. C'est une brute, un demi-singe, batailleur, carnivore et sans doute cannibale. C'est une malheureuse victime des grands animaux, depuis le diplodocus jusqu'à l'ours des cavernes. C'est un survivant, sorte de mannequin patchwork, extrait d'un vieux musée d'ethnographie par des gens pleins d'imagination. Ce malheureux ne «subsiste» qu'à grand-peine en jouant les Eskimos parmi les glaces, en se réfugiant dans les cavernes et en pratiquant la magie de la chasse. Il est, en outre, plus ou moins drogué par des champignons hallucinogènes et des boissons suspectes.
Sa compagne est assez bien assortie. Vêtue de peaux de bêtes mal coupées, nantie d'une ribambelle d'enfants, c'est une obèse, toujours enceinte, à moins qu'elle ne joue le rôle d'une mystérieuse déesse rebondie de la fécondité.
Mais - paradoxe - on accepte, quand même, que ce miséreux ait peint Lascaux et Chauvet.
Au cours du siècle dernier, on voyait encore la France comme l'unique berceau des «races». Les hommes de Chancelade, de Grimaldi et de Cro-Magnon étaient à l'origine des Jaunes, des Noirs et des Blancs... Comme, dans la Bible, les trois fils du patriarche Noé : Sem, Cham et Japhet.
Pourtant, la couleur de la peau n'a pas d'importance. Sur notre planète, les hommes modernes sont «tous parents, tous différents», selon le mot de l'anthropologue André Langaney.
Quatrième de couverture :
Les livres de préhistoire sont habituellement des romans, comme La Guerre du Feu, ou des livres austères, écrits avec un vocabulaire abscons et illustrés de planches de silex taillés. L'homme préhistorique y apparaît comme un pauvre hère ou comme une sorte de patchwork ethnographique brossé par des gens pleins d'imagination.
Pour faire vraiment revivre la préhistoire de notre pays, raconter la vie quotidienne des Erectus, des Néandertaliens et des Cro-Magnons, Brigitte et Gilles Delluc ont adopté un ton nouveau. Voici un ouvrage ne s'appuyant que sur des faits réels - ils sont déjà extraordinaires - mais aussi très vivant, écrit avec une verve non dénuée d'un certain humour.
Enfin un ouvrage documenté, clair et lisible, qui bouscule bon nombre d'idées reçues et livre le résultat des dernières recherches. Les images qui l'accompagnent sont souvent inédites et toujours parfaitement choisies.
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