Présentation de l'éditeur :
"Tu me pardonneras d'ouvrir mon propos d'aujourd'hui par une déclaration un peu brutale, voire tonitruante - mais comment faire autrement ? Disons que j'ai une bonne et une mauvaise nouvelle. Je commence par la mauvaise ? Tu es mort ! La bonne ? Tu es le père d'un petit garçon !" Ainsi s'exprime Pierre Briant en s'adressant à Alexandre le Grand, au sixième jour d'une lettre qui en compte sept.
Allégée volontairement de toute référence érudite explicite, cette Lettre ouverte est nourrie d'années de réflexion sur un objet qui fascine et qui divise depuis toujours : comment s'est élaborée hier et comment se construit aujourd'hui l'histoire d'Alexandre ? L'auteur a opté pour un style direct et vif semé d'humour, sans sacrifier pour autant à la complaisance et à la facilité. Il explique très simplement le sens de sa démarche auprès de son illustre correspondant : "A tort ou à raison (on verra bien), j'ai pensé qu'à travers cette lettre ouverte je pourrais t'aider à faire remonter tes souvenirs à la surface, et que je pourrais expliciter mes doutes, mes cheminements, mes convictions aussi, et permettre à celles et ceux qui la liront d'y voir plus clair dans quelques-unes des questions dont on débat avec fougue et avec passion, depuis que tu as ouvert une page d'histoire qui n'est pas simplement le récit du voyage initiatique d'un jeune homme en quête de sens."
Pierre Briant est professeur au Collège de France, titulaire de la chaire "Histoire et civilisation du monde achéménide et de l empire d'Alexandre ".
Extrait :
JOUR 1
Cher Alexandre le Grand,
Pas facile de commencer cette lettre, qui pourtant me tient particulièrement à coeur. Certes, j'ai appris le grec et le manie un peu, mais je ne me sens pas de taille à me mesurer à toi en ce domaine. Peut-être toi-même as-tu commencé à le parler un peu rudement, "à la macédonienne", comme disaient alors vos prétentieux ennemis qui, d'Athènes, vous traitaient hautainement de barbares et de parvenus ? De mon côté, le représentant du bas clergé qui, dans un obscur collège situé au fin fond de la campagne, m'initia naguère à Thucydide et à Xénophon, peut difficilement être comparé, même de loin, à l'immense Aristote, auprès de qui tu as tant appris. Et même si j'ai lu les discours de Démosthène (mauvais souvenir pour toi, non ?), et même si je me suis fréquemment recueilli dans les ruines de nombre de théâtres et autres lieux d'assemblée semés dans le monde que tu as conquis, je n'ai jamais eu l'immense honneur d'être introduit devant l'Assemblée du peuple athénien, encore moins de me voir décerner le titre incomparable de citoyen de la patrie de Périclès, et, pour être tout à fait franc, je sais pertinemment que jamais l'occasion ne m'en sera offerte.
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