Revue de presse :
Que diable dit-on d'un livre de philosophie si, comme d'un vin, on dit qu'il a du corps, qu'il fond sous la langue, qu'il fait entendre le ressac et des cloches lointaines, qu'il a un goût de pruneau ou d'écorce d'orange, qu'il fleure bon les sous-bois, le foin et l'iode marin ? Chaque livre de Michel Serres fait poser la même question, à laquelle, bientôt, on renonce. Dans Ecrivains, savants et philosophes font le tour du monde, il y a aussi des boeufs et des poissons, des plantes toxiques, des mancherons de charrues, des «cornes alignées dans la grange», des parlers d'oc, des barbes d'épis, des eaux glauques et «Garonne en personne». Pourtant, il y est question de l'émergence des sciences humaines, des classifications de l'histoire naturelle, des mathématiques, de sciences de l'information - et de la tentative de faire comprendre «à nouveaux frais» l'origine de toutes ces disciplines...
Ecrivains, savants et philosophes font le tour du monde ne décrit donc pas le tour du monde que font, ou ont fait, nos écrivains, nos savants et nos philosophes. Pour les faire «voyager», Michel Serres emprunte à Philippe Descola (Par-delà nature et culture, Gallimard 2005) les catégories par lesquelles celui-ci classe les cultures humaines - des Kwakiutls ou des Dogons, des Aborigènes autraliens ou des Inuits -, s'en sert pour refaire une autre carte du monde, où les «cinq continents limités par des mers» deviennent quatre archipels «où des sociétés, géographiquement éloignées, se regroupent» selon la lignée à laquelle elles appartiennent, et, à la loupe, y cherche la nôtre pour la lire d'un autre oeil, selon qu'il y décèle la présence de l'une ou l'autre de ces traditions. (Robert Maggiori - Libération du 30 avril 2009 )
Présentation de l'éditeur :
Ce livre vous convie à plusieurs tours du monde. Et d'abord à celui que font les ethnologues pour découvrir les cultures dites «exotiques». Philippe Descola les ordonne en : totémistes, animistes, analogistes. Ces classes, Michel Serres les utilise pour lire nos propres créations.
Étrange et joyeuse surprise, nos écrivains : Michelet, Proust, Flaubert, nos philosophes profonds : Bergson, Leibniz, nos inventeurs dans les sciences : Linné, Galilée, Euclide, voient le monde comme des Inuits du Grand Nord, des Aborigènes australiens ou certaines tribus amérindiennes d'Amazonie ! Nos génies inventeraient-ils, si, à l'écart de leur histoire et de leur société, ils ne pensaient pas autrement qu'elles ?
De ce nouveau tour, les oeuvres de notre culture deviennent aussi rutilantes et chamarrées que des mappemondes.
Professeur à Stanford University, membre de l'Académie française, Michel Serres est l'auteur de nombreux essais philosophiques et d'histoire des sciences. Il est l'un des rares philosophes contemporains à proposer une vision du monde ouverte, fondée sur une connaissance des humanités et des sciences.
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