Extrait :
Extrait de l'avant-propos de Max Gallo
Voir et écouter de Gaulle tout au long de sa vie. Être à ses côtés à chaque rebond de son destin. Saisir son regard, scruter son visage, retenir ses gestes, là, les poings sur les hanches, ici, les bras levés en V. Découvrir autour de lui sa famille, ses camarades de 1914, la poignée des Français libres, puis les foules, les chefs d'État. Faire tout cela qui est le but de ce livre c'est retrouver les battements humains de l'Histoire. C'est-à-dire ne jamais séparer la «chair» de «l'esprit». D'un côté, un homme soumis à l'inéluctable loi de l'âge, du temps qui corrode, qui alourdit : le corps se transforme, le visage se creuse.
Mais de l'autre côté, depuis les jeux de l'enfance et les premiers textes de l'adolescence, jusqu'aux dernières phrases des derniers jours, depuis l'initiation d'un jeune officier jusqu'à l'ultime décision du président de la République, la permanence inaltérable d'une foi, et l'affirmation d'une pensée qui se déploie dans la fidélité.
À chaque étape, dans chaque regard, dans chaque choix, il y a - et c'était le sentiment exprimé dès l'enfance -«une certaine fierté anxieuse pour notre pays». Mais aussi la certitude que «dans le mouvement incessant du monde, toutes les doctrines, toutes les écoles, toutes les révoltes n'ont qu'un temps... Mais la France ne passera pas». Et cette croyance inébranlable : «Par-dessus tout et toujours, nous savons où nous allons. Nous allons, même quand nous mourons, vers la vie.» Et donc cette espérance : «Puisque tout recommence toujours, ce que j'ai fait sera, tôt ou tard, une source d'ardeurs nouvelles après que j'aurai disparu.»
Mais quand un homme meurt - et surtout quand il a été un acteur majeur de l'Histoire - le risque est grand qu'on sépare dans l'étude de sa vie, ce qui est de l'ordre de la «chair» et ce qui appartient à «l'esprit».
Les collectionneurs de photos composent des recueils indispensables, qui cantonnent la pensée, le sens, dans les marges. L'image devient le tout, mais à force d'être multipliée et accumulée elle se vide. Elle est une enveloppe sans densité.
De leur côté, les témoins, les biographes et les historiens ont, selon leurs qualités et leurs penchants, soit le souci de l'anecdotique, soit la volonté, utile, de mettre en perspective, d'analyser. Mais alors la «chair» manque. De Gaulle est enseveli sous les détails ou les théories, voire l'idéologie. Il devient une abstraction.
Ce que tente ce livre c'est de recomposer l'espace et l'épaisseur humains de l'Histoire en recréant l'unité de la vie.
La démarche est d'autant plus fructueuse que l'homme de Gaulle est le plus souvent saisi parmi les autres.
«La photo du siècle» que son père prend en 1900 en faisant aligner ses enfants est déjà une photo de groupe. Et elles vont se succéder, groupe familial, groupe d'élèves, groupe d'officiers, groupe de prisonniers en 1917, et pour la première fois, ce 6 juin 1940, groupe de ministres.
Au fil des années, la place de De Gaulle dans le groupe change. Il devient le tribun debout sur une estrade, bras levés en V. Mais il n'est pas seul. Le groupe, la foule, lui font face, l'entourent. «Ah ! c'est la mer», dira-t-il, descendant les Champs-Élysées envahis par des centaines de milliers de Parisiens, le 26 août 1944.
C'est la mise au point historique qui, associée aux photos, les éclaire et les enrichit, mieux, elle en révèle le sens. Du 6 juin 1940 aux conférences de presse du président de la République, de Gaulle est devenu la clef de voûte du gouvernement de la France. Et à suivre ainsi le cheminement de De Gaulle à travers ce double mouvement, celui de la place et de l'apparence des corps, et celui de l'analyse historique, on voit que le gaullisme a été une relation jamais interrompue entre le «premier des Français» et ses compatriotes. De Gaulle est bien la figure de proue de tout son peuple auquel il a besoin de se mêler et duquel il tire sa force. Il a reçu, dit-il «l'appui du peuple plutôt que celui des élites». Il ajoute : «J'écoute la voix profonde de notre peuple comme on entend la rumeur de la mer.»
Et c'est cette relation - qui n'est pas la «fusion» dans laquelle la responsabilité de l'élu se dissout - que les centaines d'images de ce livre, et les analyses, les témoignages, les citations de De Gaulle qui les appuient, restituent. Ainsi est reconstituée l'unité de la vie.
Présentation de l'éditeur :
Dès l’enfance, Charles de Gaulle unit son destin à celui de la France au nom d’une « certaine idée » qu’il se fait d’elle. De la Belle Époque au lendemain de Mai 68, le destin de de Gaulle se confond avec celui de son pays. Or, « le premier des Français » est aussi le premier chef de l’État dont le parcours ait été entièrement photographié et filmé. Raconter la vie de Charles de Gaulle en images, comme le fait ce livre, c’est aussi revoir près d’un siècle d’histoire de France, et notre entrée dans la modernité. Près d’un millier de clichés sur lesquels figure toujours Charles de Gaulle : de Lille à Londres, de l’Élysée à Colombey, le lecteur suit l’épopée de l’officier non-conformiste qui libéra la France et fonda la Ve République. Mais à travers lui, c’est tout le XXe siècle qui se donne à voir et à comprendre. Biographe de nos plus grands hommes politiques, Max Gallo analyse et décrypte ce mariage légendaire du parcours d’un homme à celui d’un pays. À son côté, Yves Guéna, compagnon de toujours du Général, se souvient... Un ouvrage de référence, conçu par la Fondation Charles de Gaulle à l’occasion de l’inauguration de l’Historial Charles de Gaulle aux Invalides.
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