Extrait :
OÙ L'ON APPREND À S'ADAPTER À L'AMBIANCE BELGE
Les Français disent souvent des Belges qu'ils sont sympathiques.
Or, c'est faux.
Il existe quantité de Belges antipathiques.
Pourquoi, alors, une telle bienveillance à l'égard des Belges ?
Ce cliché est d'autant plus surprenant que par tradition, un cliché est négatif. C'est devenu un cliché de répertorier les clichés, mais enfin tout de même : l'un est fourbe, l'autre sale, le troisième tient les médias; le Belge, quant à lui, est... sympathique ! Une des rares espèces du genre humain à bénéficier de stéréotypes positifs. Le chien est affectueux, le renard rusé et le Belge plaisant.
Le phénomène est d'autant plus énigmatique que, dès qu'ils sont divisés en appartenances régionales, les Belges perdent aussitôt tout leur attrait : on ne dit pas du Wallon qu'il est sympathique, mais qu'il est paresseux, profiteur et mal organisé ; on ne dit pas du Flamand qu'il est sympathique, mais qu'il est nationaliste, égoïste et borné; quant au Bruxellois, on ne sait pas très bien ce qu'il est - et lui non plus, d'ailleurs.
C'est donc le Belge dans sa globalité qui est sympathique; le Belge comme abstraction. D'aucuns diront qu'il n'est nul besoin de théoriser ainsi, et qu'il suffit de rencontrer un Belge pour le trouver sympathique. Inversons cependant cette vision des choses : sans doute trouve-t-on le Belge sympa parce qu'on a décidé d'avance qu'il l'était] En effet, quel Belge de passage en France ne s'est jamais entendu dire : «Ah, vous êtes belge ? Formidable, j'adore les Belges !» Comment pourriez-vous, après pareille sortie, ne pas vouloir satisfaire votre interlocuteur, ni vous montrer aussitôt sous votre meilleur jour ? À l'inverse, s'il s'entendait dire : «Ah, vous êtes belge ? Quelle horreur, je déteste les Belges ! Vous êtes si déplaisants !», nul doute que le Belge se montrerait moins souriant et, de ce fait, parfaitement antipathique.
«LES BELGES SONT LES PLUS BRAVES»
D'où vient donc cette croyance populaire en la sympathie innée du Belge ? On la fait souvent remonter à Jules César et à son fameux «de tous les peuples de la Gaule, les Belges sont les plus braves». Pourtant, même Jules César peut avoir dit des bêtises : on peut être excellent militaire et empereur affûté, sans pour autant être observateur avisé... Aurait-on demandé à Oscar Wilde ou Sacha Guitry de conquérir les Gaules ? Chacun son métier ! Par ailleurs, suffirait-il, aujourd'hui, qu'un chef des armées qualifie les Bretons de fins gourmets pour que d'ici deux mille ans ces mêmes Bretons continuent à se targuer fièrement de cette affirmation foireuse ? D'autant qu'en évoquant les Belges, César visait un territoire, la Gaule Belgique, qui se situerait aujourd'hui pour moitié en France, et que le mot latin par lequel on a souvent traduit «brave» (fortis) peut également être traduit par «farouche», ou «inculte».
Cherchons donc ailleurs l'origine de la sympathie inhérente au Belge, en entamant une petite balade à travers ce savoureux pays. Le pays du mauvais temps où l'on continue, jour après jour, à se plaindre du mauvais temps, comme si c'était à chaque fois une surprise invraisemblable; le pays où même les anarchistes aiment la monarchie ; le pays dont personne, pas même les ministres ou les militaires, ne connaît les paroles de l'hymne national; le pays dont les Français disent qu'ils sont toujours «ravis d'y retourner», car «ils y comptent de nombreux amis», et d'ailleurs «une partie de leur famille est belge», affirmant dans la foulée qu'il y a en Belgique «un art de vivre qui s'est perdu en France, une chaleur, quelque chose d'indéfinissable». Et tellement sympathique...
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Présentation de l'éditeur :
Que ce soit pour des raisons bassement fiscales, pour des raisons sentimentales, pour l’art de vivre, ou encore parce qu’ils adorent la pluie, de plus en plus de Français ont envie de devenir belges. Et les Belges eux-mêmes sont assez tentés d’en faire autant. Car oui, on ne naît pas belge (on naît flamand ou wallon, ou à la limite bruxellois), on le devient. La belgitude est quelque chose d’indéfinissable, une attitude, un art de vivre éminemment sympathique. Alors comment devenir belge, puisque cette opportunité exaltante est désormais ouverte à tous ? Ce guide pratique vous apprendra à parler belge, à adopter la philosophie d’Outre Quiévrain et à comprendre les institutions d’un pays qui peut vivre durant des années sans gouvernement, mais attention : ce livre ne parle pas seulement de recettes de cuisine, de bandes dessinées ou de Belges célèbres (pour changer, une fois). Ce livre aussi drôle que sérieux (car tout y est vrai…) effleure à peine le Manneken-Pis, l’Atomium, les gaufres, les bières, le chocolat, Jacques Brel et René Magritte. Il évoque les absurdités quotidiennes d’un pays trilingue (on oublie toujours les germanophones) mais relax. Vous y trouverez toutes les réponses que vous ne manquerez pas de vous poser, puisque vous avez décidé de devenir belge : • Comment se fait-il que personne ne connaisse les paroles de La Brabançonne, pas même le Premier ministre belge ? • Pourquoi le Plat pays n’est-il pas plat ? • Qu’est-ce qu’un Américain, un athénée, des carabistouilles, un cuistax, une raouette, un ket ou un zinneke ? Que veut dire : « Tchos, il fait douf, ici ! » ? • Comment bien boire une bière belge ? • Pourquoi trouve-t-on les Belges « sympathiques » ? Et quand vous serez devenu belge (même si vous l’étiez déjà), quoi qu’il arrive, n’oubliez jamais : « En Belgique, la situation est désespérée, mais pas grave. »
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