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Intelligence de la complexité: Epistémologie et pragmatique - Colloque de Cerisy - Couverture souple
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Extrait :
Sur l'intelligence de la complexité, en entrelaçant épistémologie et pragmatique
Jean-Louis Le Moigne
Le couple «intelligence-complexité», auquel se consacre notre colloque, suscite étonnement et perplexité. D'un côté, Edgar Morin le marie pour le meilleur et le pire, avançant que la complexité appelle «de l'intelligence, encore de l'intelligence, toujours de l'intelligence '», et ajoutant aussitôt que «comprendre, c'est aussi comprendre qu'il y a de l'incompréhensible». De l'autre, Paul Valéry en révèle le lien qui serait celui de «l'imprévisibilité essentielle» mais intelligible («la complexité : cette intelligible imprévisibilité essentielle»). Dans les deux cas, on est assuré que l'intelligence dont il est question n'est pas celle des tests psychotechniques ou des concours académiques, mais «cette étrange faculté de l'esprit humain qui est de donner sens» aux situations dans lesquelles il se trouve ou vers lesquelles il désire aller. L'un verra plutôt dans la complexité du monde une de ses limites épistémologiques, l'autre y verra davantage l'un de ses ressorts pragmatiques. On exploitera dialogiquement ces deux heuristiques : l'intelligence de la complexité n'appelle-t-elle pas la reconnaissance de la complexité de l'intelligence déployant ses ressources et stratagèmes ?
Revenons à «intelligence». Prenons au départ le mot dans son sens d'origine française mais davantage pratiqué par la langue anglaise : s'exercer à l'intelligence d'une situation, c'est plus définir un acte qu'un état. Se construire une représentation intelligible d'un contexte ou d'une situation, c'est en effet se faire une bonne intelligence - ou une certaine intelligence - de cette situation. C'est dans ce sens complexe, ne dissociant pas le processus et le résultat, que nous pourrons entendre ici notre démarche, en utilisant ce concept comme un pôle aimanté autour duquel on va pouvoir bâtir notre réflexion. En privilégiant l'aspect processuel, on se prive un peu du côté rassurant du résultat, exposé à plat en n chapitres qui ferment le domaine; mais on sera beaucoup moins désarçonné si on y ajoute une dose de pragmatisme : ne savons-nous pas construire une représentation d'une situation dans laquelle on se propose d'intervenir, dans laquelle on n'exclut pas qu'on intervienne ? N'est-ce pas ainsi que nous nous donnons au moins un projet ? C'est pour cela que je propose cette formule de Bachelard en exergue de notre réflexion : (...)
Présentation de l'éditeur :
Jean-Louis Le Moigne
Le couple «intelligence-complexité», auquel se consacre notre colloque, suscite étonnement et perplexité. D'un côté, Edgar Morin le marie pour le meilleur et le pire, avançant que la complexité appelle «de l'intelligence, encore de l'intelligence, toujours de l'intelligence '», et ajoutant aussitôt que «comprendre, c'est aussi comprendre qu'il y a de l'incompréhensible». De l'autre, Paul Valéry en révèle le lien qui serait celui de «l'imprévisibilité essentielle» mais intelligible («la complexité : cette intelligible imprévisibilité essentielle»). Dans les deux cas, on est assuré que l'intelligence dont il est question n'est pas celle des tests psychotechniques ou des concours académiques, mais «cette étrange faculté de l'esprit humain qui est de donner sens» aux situations dans lesquelles il se trouve ou vers lesquelles il désire aller. L'un verra plutôt dans la complexité du monde une de ses limites épistémologiques, l'autre y verra davantage l'un de ses ressorts pragmatiques. On exploitera dialogiquement ces deux heuristiques : l'intelligence de la complexité n'appelle-t-elle pas la reconnaissance de la complexité de l'intelligence déployant ses ressources et stratagèmes ?
Revenons à «intelligence». Prenons au départ le mot dans son sens d'origine française mais davantage pratiqué par la langue anglaise : s'exercer à l'intelligence d'une situation, c'est plus définir un acte qu'un état. Se construire une représentation intelligible d'un contexte ou d'une situation, c'est en effet se faire une bonne intelligence - ou une certaine intelligence - de cette situation. C'est dans ce sens complexe, ne dissociant pas le processus et le résultat, que nous pourrons entendre ici notre démarche, en utilisant ce concept comme un pôle aimanté autour duquel on va pouvoir bâtir notre réflexion. En privilégiant l'aspect processuel, on se prive un peu du côté rassurant du résultat, exposé à plat en n chapitres qui ferment le domaine; mais on sera beaucoup moins désarçonné si on y ajoute une dose de pragmatisme : ne savons-nous pas construire une représentation d'une situation dans laquelle on se propose d'intervenir, dans laquelle on n'exclut pas qu'on intervienne ? N'est-ce pas ainsi que nous nous donnons au moins un projet ? C'est pour cela que je propose cette formule de Bachelard en exergue de notre réflexion : (...)
La complexité s'inscrit aujourd'hui dans un véritable mouvement de pensée qui nous invite à restaurer l'intelligence de la complexité dans nos cultures et nos enseignements. Elle pose un problème épistémologique clé pour la connaissance et l'action, et appelle une réforme de pensée. Alors qu'un savoir fragmentaire et dispersé nous rend de plus en plus aveugles à nos problèmes fondamentaux, l'intelligence de la complexité devient un besoin vital pour nos personnes, nos cultures, nos sociétés. L'aventure collective de la pensée complexe fait apparaître deux modes d'appréhension de la complexité : le «paradigme de la complexité restreinte», qui se forme dans les creusets des disciplines traditionnelles, et le «paradigme de la complexité générale ou épistémique», qui se forme dans des creusets plus ouverts. L'intelligence de la complexité relie les données, informations et connaissances séparées, pour lesquelles l'intelligence du réel n'est pas un reflet de la réalité mais une traduction/reconstruction de cette réalité à partir d'un esprit/cerveau humain; elle relie la connaissance et l'action, l'épistémique et la pragmatique. Cette aventure de la connaissance s'inscrit dans l'humaine histoire de la pensée, et lui apporte peut-être une pertinence nouvelle. C'est au coeur de cette aventure que se situe ce colloque de Cerisy, un livre savant et passionnant.
Autour de Jean-Louis Le Moigne et d'Edgar Morin : Michel Adam, Teresa Ambrôsio, Evelyne Andreewsky, Marie-José Avenier, Hervé Barreau, Marc Benoit, Philippe Boudon, Claude Cremet, Jacques Brossier, André Demailly, Pierre F. Gonod, Edith Heurgon, Rosa Iniesta-Masmano, Georges-Yves Kervern, Frédérique Lerbet-Sereni, Giuseppe Longo, Jacques Miermont, Mioara Mugur-Schàchter, Atsuo Morimoto, Emmanuel Nunez, Françoise Odin, Guilherme d'Oliveira Martins, Marc Parenthoën, Alfred Pétron, Pascal Roggero, Michel Rouger, Ana Sânchez, Boris Saulnier, Tatsuya Tagami, Bruno Tardieu, Jacques Tisseau.
Autour de Jean-Louis Le Moigne et d'Edgar Morin : Michel Adam, Teresa Ambrôsio, Evelyne Andreewsky, Marie-José Avenier, Hervé Barreau, Marc Benoit, Philippe Boudon, Claude Cremet, Jacques Brossier, André Demailly, Pierre F. Gonod, Edith Heurgon, Rosa Iniesta-Masmano, Georges-Yves Kervern, Frédérique Lerbet-Sereni, Giuseppe Longo, Jacques Miermont, Mioara Mugur-Schàchter, Atsuo Morimoto, Emmanuel Nunez, Françoise Odin, Guilherme d'Oliveira Martins, Marc Parenthoën, Alfred Pétron, Pascal Roggero, Michel Rouger, Ana Sânchez, Boris Saulnier, Tatsuya Tagami, Bruno Tardieu, Jacques Tisseau.
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- ÉditeurEditions de l'Aube
- Date d'édition2007
- ISBN 10 2752602995
- ISBN 13 9782752602992
- ReliureBroché
- Nombre de pages457
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