Extrait :
Extrait de l'introduction
Le premier Petit livre des gros mots était évidemment trop «petit» pour rendre compte de l'extraordinaire ingéniosité verbale qui nourrit le monde des gros mots, des jurons, de l'insulte et de l'injure. Voici donc un second «Petit» qui poursuit le même chemin : vous faire explorer sans fausse pudeur cette langue marginale, souterraine, mais si vivante et omniprésente dans notre quotidien.
Avant d'aller plus loin, il est peut-être bon de rappeler brièvement les distinctions entre gros mot, juron, insulte et injure.
Le gros mot. Les dictionnaires le définissent comme un terme incorrect, cru, indélicat, obscène, scatologique, vulgaire, qui offense la pudeur par sa transgression des codes de politesse et de bienséance. C'est incontestablement le domaine sexuel qui fournit le corpus le plus abondant : tout le monde sait que «bite», «con», «couilles» sont de vrais gros mots.
Le juron. À l'origine, il permet de jurer, c'est-à-dire de prononcer le nom de Dieu dans des exclamations blasphématoires comme «nom de Dieu», «bordel de Dieu», «bordel de nom de Dieu» ; mais sa définition se développe et peut aussi désigner une interjection à base de gros mots : «merde !», «putain !», «ah, le con !». Le juron ne s'adresse à personne d'autre que son propre émetteur.
L'insulte et l'injure. Même si la nuance est parfois mince entre ces deux formes qui visent à outrager quelqu'un, on peut cependant tenter une distinction. L'insulte est liée à une attaque de circonstance et vise plus l'action commise que son auteur : par exemple le retentissant «connard» qui ponctue la queue de poisson dont vous avez été victime sur la route. L'injure apporte une intensité supplémentaire dans l'agression verbale en cherchant à provoquer, à déstabiliser pour causer un tort plus profond. Dans cet ouvrage, nous laisserons à chacun le soin d'établir cette nuance. On observera qu'elles se construisent avec ou sans l'emploi de gros mots : «âne», «boudin», «mollusque» peuvent servir à des insultes mais ne sont pas des gros mots. Ainsi tout peut se transformer en insulte : dans un film de Bertrand Blier, Les Valseuses, trois comparses (joués par Gérard Depardieu, Patrick Dewaere et Miou-Miou) faisaient du stop et lançaient aux voitures qui passaient sans s'arrêter : «Travailleurs ! Prolo !»
Enfin, il est remarquable de constater que cette production langagière «grossière» ignore les frontières des classes sociales : quels que soient le milieu, l'éducation, la maîtrise de soi, la fonction, chacun d'entre nous a déjà pu vivre cette situation où, soudainement, toutes les bonnes manières s'effaçaient pour laisser la place à un retentissant «putain, merde !» ; «ah, le petit enculé !». Personne n'a oublié la sortie d'un président de la République dans un salon agricole, gratifiant d'un désormais célèbre «casse-toi pauvre con !» une personne qui refusait de lui serrer la main.
Présentation de l'éditeur :
La langue française est décidément très riche... si riche qu'un premier Petit livre des gros mots ne suffisait pas à faire le tour de ses jolis noms d'oiseaux ! Savez-vous par exemple, et sans être numismate, que le " freluquet " désignait au XVI esiècle une pièce de monnaie de peu de valeur ? Que " branquignol " était utilisé dans l'argot des Poilus de la guerre de 1914-18 pour désigner... les brancardiers ? Sauriez-vous comment reformuler en langage plus chââââtié les carpettes, conneaux et autres poivrots ? Avec drôlerie et gourmandise, Gilles Guilleron explore l'étymologie et l'histoire de quelque 150 gros mots et autres injures, classés par ordre alphabétique. Pour chacun, il propose plusieurs variantes et quelques " traductions " dans les registres courant et soutenu. Des encadrés sur des curiosités culturelles, régionales et lexicales ainsi qu'un index viendront enrichir ce petit dictionnaire.
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