Extrait :
Extrait de l'introduction :
Comparé à l'Islam, le catholicisme donne le sentiment d'avoir réussi son aggiornamento. Indéniablement, les catholiques ont mieux négocié le tournant des années 60, notamment grâce au Concile de Vatican II, initié par Jean XXIII en 1962 et achevé par Paul VI en 1965. Une liturgie plus accessible à tous, un prêtre célébrant la messe tourné vers ses fidèles, la fin de la prière pour la conversion du «juif perfide» et l'abandon d'une certaine prétention à la Vérité absolue ont permis d'ouvrir la voie à un catholicisme plus ouvert, capable de dialoguer sereinement avec les autres religions. Mais cette réforme ne s'est pas faite sans douleur ni débats houleux. Loin de faire consensus, Vatican II fut au coeur d'une guerre d'interprétation entre catholiques «intransigeants» et catholiques d'ouverture. Il aura fallu toute l'autorité du Saint-Siège et la vitalité du catholicisme conciliaire pour imposer une telle cure de rajeunissement à une frange de l'Eglise restée obstinément hostile à tout changement. Dans les années 60, cette fraction était incontestablement minoritaire. Est-ce toujours le cas aujourd'hui ?
À l'époque du Concile, le catholicisme progressiste et moderne avait le vent en poupe. En France, c'était l'époque glorieuse des prêtres-ouvriers. La JOC (Jeunesse ouvrière chrétienne) incitait le monde ouvrier à se hisser socialement grâce à une citoyenneté ouverte sur le monde. Dans les zones rurales, la JAC (la Jeunesse agricole catholique) parvenait à favoriser l'émergence d'une élite paysanne catholique progressiste. La JAC a disparu en laissant quelques leaders paysans et toute une génération d'enfants de la ruralité incarner cette conscience. Quant à la JOC, forte de 10 000 membres, elle continue de vouloir initier des jeunes à la citoyenneté via la spiritualité. Les catholiques de gauche sont toujours très actifs au sein de ce qu'on appelle le «militantisme moral» : humanitaire, sans-papiers, lutte contre la pauvreté, droit au logement, solidarité internationale... À la veille des municipales de 2008, des prêtres-ouvriers se sont par exemple chargés de signaler aux élus de Basse-Normandie que 30 % de la population active vivait en état de précarité. Ce catholicisme existe, il est vivant. Mais ces catholiques peuvent-ils encore proclamer, comme par le passé : «Nous sommes l'Église» ?
Rien n'est moins sûr. L'optimiste suscité par un catholicisme résolument tourné vers le social et vers l'avenir aura été de courte durée. Dès 1968, moins de trois ans après la fin de Vatican II, les événements du mois de mai, la libération de la parole et de la sexualité, ont durablement traumatisé les hautes sphères de l'Église.
Présentation de l'éditeur :
Le catholicisme donne parfois le sentiment d'avoir réussi son aggiornamento. Pourtant l'élection de Benoît XVI signe le triomphe des intransigeants au détriment des catholiques modernistes. Jusqu'où ce virage réactionnaire de l'Église catholique ira-t-il ? Jusqu'à faire du Concile de Vatican II une parenthèse bien vite refermée ? Jusqu'à Vatican moins II ?
C'est ce qu'ont voulu savoir Caroline Fourest et Fiammetta Venner en enquêtant sur les relations du Saint-Siège avec trois des courants les plus sulfureux du catholicisme contemporain : l'Opus Dei, la Légion du Christ et les traditionalistes.
Caroline Fourest (Prix du livre politique 2006) est journaliste et enseigne à Sciences Po, Fiammetta Venner est politologue. Spécialistes des intégrismes, elles écrivent dans Charlie Hebdo. Elles ont signé plusieurs livres très remarqués dont Tirs croisés, la laïcité à l'épreuve des intégrismes juif, chrétien et musulman (Calmann-Lévy, 2003). En 2005, elles ont reçu le prix national de la laïcité pour l'ensemble de leurs travaux sur les intégrismes et l'extrême droite.
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