Extrait :
La Muse Nature
John K. Grande
Bob Verschueren s'est choisi comme muse la nature. La nature vivante des arbres, des branches, des feuilles, des plantes, des légumes est le matériau que Bob Verschueren utilise dans ses installations. La nature lui fournit son matériau artistique, les ressources dont il a besoin ; elle nous unit à des forces plus grandes qui inspirent l'art de Bob Verschueren. Nous avons l'intuition de quelque chose qui nous dépasse, quelque chose que nous ne pouvons mesurer, une force verte, invisible, atomisée, dont nous trouvons la preuve dans une myriade de formes de vie, une force qui, tel le géant, nous souffle des questions fondamentales sur l'éphémère, sur nos propres vies, sur la mortalité. Les installations de Bob Verschueren sont une offrande à l'humanité. Elles portent en elles des indices de motifs, mais elles ne s'arrêtent pas là : elles relient le physique au spirituel, et la nature ontologique devient la colle qui maintient le tout en place. La nature est à la fois le contexte de ses installations, mais également leur vaste et permanente toile, faîte du capital naturel de notre culture et de notre civilisation. Ici, l'artiste dialogue avec l'infinité et avec le geste éphémère. Les liens renvoient à cet environnement. On y trouve le motif, dans l'assemblage de feuilles semblables à l'ombre d'une fenêtre, ou dans le rhubarbe drapé sur les pots de fleurs, ou dans l'élégante contextualisation des brindilles et des branches. Les feuilles en assemblage (la nature dans la nature) représentent le passage du temps qu'on ne voit pas, l'histoire naturelle qui, imperceptiblement, se superpose au temps.
Les douze pots de fleurs flottants de Bob Verschueren dans le parc du Château de Seneffe : l'Installation V/09, appelée «La montée des eaux», présente douze plantes flottantes qui ne doivent leur survie qu'aux bouées les maintenant au-dessus de la surface des eaux. On voit une parabole du réchauffement climatique se refléter dans ces plantes nomades qui paraissent autant d'arches de Noé ou de canoës naturels.
La nature est la muse, «emblémisée» dans l'Installation IX/09 «Les fourches topiaires». Témoignage de respect au jardinier lambda et à la résistance de la nature, les fourches renversées embellies d'une poussée de polygonum aubertii rendent un hommage allégorique et amusé à la croissance éternelle de la nature qui, parfois, peut défaire le travail du jardinier. Un «Drapeau de la Nature», créé à Sorel au Québec dans le cadre d'un symposium de sculpture environnementale, a beau être «fait de nature», il ne représente aucun symbole de quelque forme que ce soit, ni politique, ni religieux, ni pointilleux. Nous ne voyons que ce qui fait le «drapeau» : des couleurs et des textures de branches. Ces sculptures sont l'emblème d'un esthétisme imaginé dans les plus verts pâturages d'une imagination verdoyante, non pas absolument utopique mais, sans être contre-utopique, artistique, dont l'éthique découle des systèmes cycliques de la nature marqués par une «recréation» éternelle. L'Installation IV/09, appelée «L'îlot», rien d'autre qu'un vieux hêtre servant de terreau à un jeune arbre, est explicite : la croissance intergénérationnelle, un tableau de la nature sur la nature dans la nature. L'Installation 111/09, également dans le parc du Château de Seneffe, représentant un condominium assez comique pour oiseaux composés de quelques 400 maisons. Assemblées, elles ressemblent à un arbre rempli de maisons.
Présentation de l'éditeur :
Depuis 1992, le Festival des jardins du Domaine de Chaumont-sur-Loire constitue un panorama étonnant de l'état de la création paysagère dans le monde. À la fois mine d'idées et pépinière de talents, le festival redynamise l'art des jardins et intéresse le public et la profession en présentant de nouveaux fleurissements, de nouveaux matériaux, des idées et des approches novatrices.
En collaboration avec ce festival incontournable de l'art des jardins, la commune de Chaudfontaine et l'asbl belge, Les Ateliers d'Art contemporain créent le «Festival des cinq saisons», dont la première édition sera inaugurée les 16 et 17 octobre 2010. Ce Festival conviera artistes, paysagistes et botanistes à faire du parc de Hauster à Chaudfontaine, un lieu d'art et d'expérimentations.
En parallèle à cet événement, l'équipe du Festival prévoit, en collaboration avec l'ASBL belge Façons de voir et les éditions Mardaga, la publication de deux livres par an, dans un esprit de collection :
- Au printemps : une monographie sur l'artiste invité d'honneur du Festival ;
- À l'automne : un catalogue regroupant, d'une part, les oeuvres des artistes et intervenants du Festival et, d'autre part, une partie théorique - historique et culturelle - à laquelle collaboreront des auteurs paysagistes, historiens, architectes et botanistes.
L'artiste, invité d'honneur en 2010, est Bob Verschueren, dont Mardaga a déjà publié une monographie très remarquée en 2008, Dialogues entre nature et architecture. Cette publication, Natura Humana, sera consacrée uniquement aux installations en extérieur, et notamment aux projets réalisés pour le festival de Chaudfontaine, toujours dans cette perspective de l'art comme lien entre l'homme et la nature.
Les informations fournies dans la section « A propos du livre » peuvent faire référence à une autre édition de ce titre.