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Extrait :
La prière
Thomas : Seigneur ? Vous êtes là, Seigneur ? Si vous êtes là, si vous êtes bien là, j'aurais un service à vous demander. Alors voilà. Auriez-vous l'amabilité de faire en sorte, Seigneur, que tous ces petits gars qui, hier encore, ricanaient derrière mon dos tandis que pour leur plaire je m'essayais à ma première clope, désormais, toutes les nuits, dans leur lit, se retournent en rêvant de s'habiller comme moi, en rêvant de marcher comme moi, en rêvant de jouer de la guitare comme j'en joue. Pourriez-vous faire ça pour moi, Seigneur ? Et aussi, pourriez-vous, s'il vous plaît, faire qu'un jour mon prof d'anglais me voie chanter sur scène et, la tête entre les mains, souffre mille morts en regrettant amèrement la terrible humiliation infligée ce matin devant toute la classe parce que j'ai confondu turn the light on avec turn the light off. Si vous pouviez faire ça, Seigneur, soyez-en sûr, je vous serais éternellement reconnaissant. Et aussi, tant que j'y suis, plus que tout au monde, je voudrais Caroline - je voudrais ses seins, Seigneur, je voudrais ses fesses, je voudrais sa bouche et son nombril, et ses clavicules, et ses épaules, ses hanches, l'arrière de ses genoux, sa langue sur la mienne, et sa peau, et son âme. Si vous pouviez faire ça pour moi, vous seriez vraiment un chic type. Mais surtout, Seigneur, si c'était encore possible, si ce n'était pas trop abuser de votre bonté, s'il vous plaît, s'il vous plait, s'il vous plaît, j'aurais une dernière chose à vous demander, voilà : faites qu'un jour mon père soit fier de moi.
Alors voilà, Seigneur, maintenant, je vais compter jusqu'à trois. Et si à trois vous ne m'avez pas envoyé un signe d'encouragement, un minimum de garanties, une raison d'espérer en mon futur, alors, Seigneur, je vous promets, je vous le jure : je vends mon âme au Diable.
(Il compte)
Un... (Un temps) Deux...
(Un temps. Décharge d'électricité. Puis, noir)
*
L'origine de Greenville
Le biographe : Toute histoire a un commencement, un début, une origine.
Alors ?
Qu'elle est l'origine de Greenville ? Par où commencer ?
Par cette rencontre chez le disquaire de la rue Montmartre, un beau soir de février ? Dehors il neige. A l'intérieur il fait chaud, il y a de la buée sur la vitrine et c'est comme un cocon. Alors on parle musique, on s'échange des titres de disque, on entre en connivence.
Par où commencer ?
Par leur adolescence ? Par leur enfance ? Par leur naissance ? Par la rencontre de leurs parents - cette nuit où ils font l'amour, et peut-être qu'ils se disent que cette fois ça y est, enfin, c'est le début de quelque chose. Ou peut-être que c'était juste comme ça, on a dansé, on a picolé, alors on se touche, on se prend, on ne pense à rien, juste son corps et le mien, et le hasard fait le reste.
Peut-être faut-il remonter plus loin encore.
Un jeune adolescent de Liverpool entend pour la première fois Heartbreak Hotel à Radio Luxembourg. Il sort de chez lui, il court dans la ville. Sa vie ne sera plus jamais la même.
Et voilà qu'un homme dépose son pied sur le sable. L'air est parfumé. Il fait doux. Il avance sur la plage. Comme il n'est plus habitué à la lumière, il plisse des yeux, met la main en visière et regarde l'Amérique. L'homme est noir. Il est attachée à des chaînes.
Eurydice, le long d'une rivière, se fait mordre par un serpent. Orphée descend la chercher en enfer et son chant est si beau que Proserpine laisse la morte rejoindre les vivants. Mais Orphée se retourne.
Alors ?
Par où commencer ?
Quelle est l'origine de Greenville ?
(...)
Présentation de l'éditeur :
Thomas : Seigneur ? Vous êtes là, Seigneur ? Si vous êtes là, si vous êtes bien là, j'aurais un service à vous demander. Alors voilà. Auriez-vous l'amabilité de faire en sorte, Seigneur, que tous ces petits gars qui, hier encore, ricanaient derrière mon dos tandis que pour leur plaire je m'essayais à ma première clope, désormais, toutes les nuits, dans leur lit, se retournent en rêvant de s'habiller comme moi, en rêvant de marcher comme moi, en rêvant de jouer de la guitare comme j'en joue. Pourriez-vous faire ça pour moi, Seigneur ? Et aussi, pourriez-vous, s'il vous plaît, faire qu'un jour mon prof d'anglais me voie chanter sur scène et, la tête entre les mains, souffre mille morts en regrettant amèrement la terrible humiliation infligée ce matin devant toute la classe parce que j'ai confondu turn the light on avec turn the light off. Si vous pouviez faire ça, Seigneur, soyez-en sûr, je vous serais éternellement reconnaissant. Et aussi, tant que j'y suis, plus que tout au monde, je voudrais Caroline - je voudrais ses seins, Seigneur, je voudrais ses fesses, je voudrais sa bouche et son nombril, et ses clavicules, et ses épaules, ses hanches, l'arrière de ses genoux, sa langue sur la mienne, et sa peau, et son âme. Si vous pouviez faire ça pour moi, vous seriez vraiment un chic type. Mais surtout, Seigneur, si c'était encore possible, si ce n'était pas trop abuser de votre bonté, s'il vous plaît, s'il vous plait, s'il vous plaît, j'aurais une dernière chose à vous demander, voilà : faites qu'un jour mon père soit fier de moi.
Alors voilà, Seigneur, maintenant, je vais compter jusqu'à trois. Et si à trois vous ne m'avez pas envoyé un signe d'encouragement, un minimum de garanties, une raison d'espérer en mon futur, alors, Seigneur, je vous promets, je vous le jure : je vends mon âme au Diable.
(Il compte)
Un... (Un temps) Deux...
(Un temps. Décharge d'électricité. Puis, noir)
*
L'origine de Greenville
Le biographe : Toute histoire a un commencement, un début, une origine.
Alors ?
Qu'elle est l'origine de Greenville ? Par où commencer ?
Par cette rencontre chez le disquaire de la rue Montmartre, un beau soir de février ? Dehors il neige. A l'intérieur il fait chaud, il y a de la buée sur la vitrine et c'est comme un cocon. Alors on parle musique, on s'échange des titres de disque, on entre en connivence.
Par où commencer ?
Par leur adolescence ? Par leur enfance ? Par leur naissance ? Par la rencontre de leurs parents - cette nuit où ils font l'amour, et peut-être qu'ils se disent que cette fois ça y est, enfin, c'est le début de quelque chose. Ou peut-être que c'était juste comme ça, on a dansé, on a picolé, alors on se touche, on se prend, on ne pense à rien, juste son corps et le mien, et le hasard fait le reste.
Peut-être faut-il remonter plus loin encore.
Un jeune adolescent de Liverpool entend pour la première fois Heartbreak Hotel à Radio Luxembourg. Il sort de chez lui, il court dans la ville. Sa vie ne sera plus jamais la même.
Et voilà qu'un homme dépose son pied sur le sable. L'air est parfumé. Il fait doux. Il avance sur la plage. Comme il n'est plus habitué à la lumière, il plisse des yeux, met la main en visière et regarde l'Amérique. L'homme est noir. Il est attachée à des chaînes.
Eurydice, le long d'une rivière, se fait mordre par un serpent. Orphée descend la chercher en enfer et son chant est si beau que Proserpine laisse la morte rejoindre les vivants. Mais Orphée se retourne.
Alors ?
Par où commencer ?
Quelle est l'origine de Greenville ?
(...)
Une vie de musicien rock est-elle plus intense qu'une vie d'agent d'assurances ? Que garde-t-on de sa jeunesse ? Notre société a-t-elle préservé sa part de dionysiaque ? Le destin guide-t-il nos vies ? Pourquoi sommes-nous avides de modèles ? Est-ce plus facile de coucher avec une fille quand on joue d'un instrument ?
Dans une écriture à la fois cinématographique, radiophonique et musicale, Régis Duqué traverse ces questions avec humour dans cette pièce entre mythe, documentaire et concert rock.
Régis Duqué est diplômé en philologie romane et en études théâtrales. Professeur, journaliste, metteur en scène et animateur d'ateliers théâtraux, il consacre aujourd'hui une part importante de son temps à l'écriture dramatique. Avec succès puisque la plupart de ses pièces ont été montées en Belgique et primées. Son théâtre est publié chez Lansman.
Dans une écriture à la fois cinématographique, radiophonique et musicale, Régis Duqué traverse ces questions avec humour dans cette pièce entre mythe, documentaire et concert rock.
Régis Duqué est diplômé en philologie romane et en études théâtrales. Professeur, journaliste, metteur en scène et animateur d'ateliers théâtraux, il consacre aujourd'hui une part importante de son temps à l'écriture dramatique. Avec succès puisque la plupart de ses pièces ont été montées en Belgique et primées. Son théâtre est publié chez Lansman.
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- ÉditeurLansman
- Date d'édition2015
- ISBN 10 2807100473
- ISBN 13 9782807100473
- ReliurePoche
- Nombre de pages38
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GREENVILLE
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LANSMAN
(2015)
ISBN 10 : 2807100473
ISBN 13 : 9782807100473
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Description du livre Etat : Neuf. N° de réf. du vendeur 9782807100473
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