Extrait :
Extrait du prologue :
Le sacre de Denver
Au loin se détachent les hauts immeubles du centre-ville. Ayant bravé la chaleur et fait la queue sous le soleil pour emprunter la navette, Solon est heureux d'être arrivé à destination : Invesco Field, le stade des Broncos, l'équipe de football de Denver. Cet Africain-Américain de Détroit, dans le Michigan, a fait le voyage pour assister à la Convention nationale du parti démocrate. S'il est là, c'est pour Barack Obama, qui doit officiellement «accepter» la nomination de son parti, ce jeudi 28 août au soir.
Derrière ses lunettes de soleil, toutefois, Solon demeure inquiet. «Il reste du boulot. Cette convention est une réussite, mais je doute. Je ne sais pas si, dans l'isoloir, les gens ne vont pas changer d'avis au dernier moment... J'en ai tellement peur.» Jeune quadragénaire et père de famille, Solon manie le mot «racisme» du bout des lèvres. «Les républicains vont utiliser les mêmes vieilles ficelles, réveiller la peur des Américains. Je sais que c'est dur pour les Blancs de comprendre, mais c'est vraiment quelque chose de particulier que d'être une minorité», dit-il d'un ton posé.
Solon reste - concentré». Il estime qu'Obama a déjà fait une superbe campagne, mais qu'il «ne faut pas se louper dans la dernière ligne droite». Il pénètre enfin dans l'enceinte du stade aux courbes séduisantes. Le show vient de commencer. Dans les travées, des centaines de supporters démocrates font la queue pour acheter de quoi grignoter et boire toute la soirée. Le stand «officiel» des produits de merchandising fait le plein. Badges, pancartes, T-shirts, casquettes... Tout est estampillé du logo «Obama for America», un soleil levant aux couleurs du drapeau américain, sur fond bleu. L'écrasante majorité des citoyens - Blancs, Noirs, Latinos, Asiatiques... - affiche au moins l'un de ces objets de campagne. Même les journalistes !
Des coursives, on empreinte un mini-tunnel pour déboucher dans les tribunes. La cuvette impressionne : trois étages, trois écrans géants et une foule déjà compacte. La scène, sur l'un des grands côtés de la pelouse, présente un décor de colonnades qui rappelle le Capitole de Washington. Sur la droite, un orchestre rock d'une quinzaine de musiciens. Au centre, le podium s'avance presque au milieu de la foule. Le pupitre principal est placé là, au coeur de ce cercle étoile sur moquette bleue. De part et d'autre de la scène, deux autres pupitres.
C'est le grand jour. Dans quelques heures, Barack Obama sera officiellement le premier Noir candidat à la présidence des États-Unis. En ce quatrième et dernier jour de la Convention, l'heure est à la fête. Le rappeur William et les chanteurs John Legend, Sheryl Crow et Stevie Wonder se succèdent sur scène. On chante, on danse, on rit dans les tribunes. On agite déjà les pancartes «Obama».
Présentation de l'éditeur :
On le disait inexpérimenté, pas assez patriote, trop consensuel... Et voici qu'après sa désignation par acclamation le candidat du parti démocrate se lance dans une campagne offensive, multipliant les coups contre son adversaire, John McCain, qu'il avait jusqu'alors ménagé.
«L'Amérique mérite mieux que les huit années qui viennent de s'écouler», a-t-il lancé au soir de son investiture. Premier Noir au seuil de la Maison Blanche, Barack Obama saura-t-il, comme il l'a promis, donner un nouveau souffle au «rêve américain» mis à mal par l'administration Bush ? Comment entend-il sortir le pays du bourbier irakien ? Réagir aux provocations, qu'elles proviennent d'Iran, de Russie ou de Chine ? Combler le fossé qui se creuse entre riches et pauvres aux États-Unis ?
Guillaume Serina a suivi jour après jour la campagne du candidat démocrate, interrogeant les témoins de sa jeunesse et de sa marche vers le pouvoir. Du caucus victorieux de l'lowa, en janvier, aux lendemains de son plébiscite à Denver, en août 2008, il livre les instantanés de l'ascension du sénateur de l'lowa, analyse ses écrits, ses déclarations, et décrit l'émergence d'un phénomène politique qui pourrait bien être le nouveau visage de l'Amérique.
Correspondant du quotidien Le Parisien et de l'hebdomadaire Le Point à Los Angeles, Guillaume Serina collabore également au Monde 2. Diplômé d'histoire de l'Amérique du Nord, il est l'auteur de Les Etats-Unis : questions sur la superpuissance (Milan, 2004). En 2008, il a fondé l'agence France USA Media et son magazine en ligne www.benfranklinpost.com.
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