Extrait :
L'ÉTAT, C'EST NOUS !
Par fonction et par passion, j'observe depuis des années l'évolution de la France et de ses habitants. J'ai longtemps espéré, cru et écrit que notre pays s'adapterait naturellement aux bouleversements en cours dans le monde, qu'il inventerait même des réponses nouvelles à des questions inédites. Il en a les capacités, comme en témoigne son histoire. Je sais aussi que les Français en ont, au fond d'eux, le désir. Pourtant, il faut bien constater que le «grand rattrapage» n'a pas eu lieu ; le retard s'est au contraire accru. Pourquoi ?
D'abord parce que certaines de nos singularités et «exceptions» nationales, qui ont longtemps été des atouts, sont aujourd'hui des handicaps. Elles nous paralysent, nous empêchent de remettre en question le présent pour préparer l'avenir. Notre nation est en réalité une «non-société», en même temps qu'une «société du non», ce qui n'est pas moins inquiétant. Nous ne parvenons plus à vivre ensemble ; nous tendons à nous diviser plutôt qu'à nous rassembler, à nous affronter plutôt qu'à chercher des solutions en commun. Nous manquons de repères, de perspectives, mais aussi souvent de bonne volonté, de bon sens et de bonne foi. Avec l'ensemble des acteurs (partis, institutions, entreprises...) et des intermédiaires (élus, syndicats, médias...), nous portons tous une part de responsabilité dans la situation délétère de notre pays.
L'autre cause de nos difficultés, qui n'est pas indépendante de ce qui précède, est que la voie politique traditionnelle est devenue une impasse. Les partis se déchirent entre eux, mais aussi en leur sein. Leurs dirigeants sont incapables de mettre en place l'«union sacrée» ou au moins la coalition dont nous avons besoin. Cela impliquerait qu'ils oublient leurs certitudes et leurs querelles de personnes, pour s'intéresser enfin au bien commun. Leur inaptitude fait le lit des partis extrêmes et populistes ; il ne faut pas ignorer les questions qu'ils posent, ni les électeurs qu'ils séduisent. Même si l'on doit refuser les réponses qu'ils proposent, en démontrant qu'elles sont inadaptées, impossibles à mettre en oeuvre, égoïstes et dangereuses.
La conséquence est que l'État ne parvient plus à assumer les missions que les citoyens lui ont confiées ou qu'il s'est lui-même attribuées : fournir des projets collectifs et des services individuels, garantir la justice sociale, proposer des valeurs communes, être le moteur d'un «progrès» continu, faciliter la vie des citoyens. Les caisses sont vides, les discours creux, les visions courtes, les idées rares, les ambitions pour le pays réduites. Le modèle républicain est en panne ; il ne tient plus ses promesses.
Présentation de l'éditeur :
Depuis le milieu des années 1960, la France est bousculée dans ses fondements ; elle a accumulé les factures économiques et laissé se développer des fractures sociales. Les citoyens ont perdu espoir en l'avenir et confiance en l'État. Le « modèle républicain » est en panne et fait le lit du communautarisme. La mondialisation, les difficultés de l'Europe et la « crise » récente n'ont fait qu'exacerber les inégalités, les tensions et les risques.
L'État ne peut plus agir seul. Il faut redéfinir son rôle et restaurer sa relation avec la nation. Pour cela, il faut créer les conditions d'une mobilisation générale, organiser de nouveaux modes de consultation et de collaboration, mettre en oeuvre une intelligence collective.
La réinvention de la France passe par l'instauration d'une démocratie positive, c'est-à-dire active, collaborative, empathique et permanente. En liaison avec un État animateur-modérateur, les citoyens y exerceront en commun un pouvoir de proposition, délibération, décision, expérimentation, contrôle. Ils accepteront d'autant mieux les réformes et innovations nécessaires qu'ils en seront les instigateurs. Cette révolution culturelle et structurelle est possible dans une société devenue « horizontale », qui dispose d'outils de réflexion et de partage totalement inédits.
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