Présentation de l'éditeur :
Je ne sais pas depuis quand je me pose des questions. Se poser des questions, ce n'est pas plus bête que de croire tout ce qu'on nous dit. Certainement qu'un jour j'étais assise, comme d'habitude, un peu à l'écart du Pont, bien tranquille sur la rive. Il y a forcément eu une première fois où j'ai commencé à me demander si on ne nous mentait pas, si le Fleuve était vraiment toxique et si les soldats étaient vraiment là pour nous protéger...
Nour est une fille différente des autres, à part. Son temps, elle le passe au bord du Fleuve, à se poser des questions et attendre. Comme si elle avait un rendez-vous. Un rendez-vous avec quelque chose ou quelqu'un...
Nour vit à Satmine, une ville-enclave bordée par un Fleuve aux eaux interdites.
Personne n'en sort jamais. Pourquoi les habitants le désireraient-ils, puisqu'ils ne manquent de rien ? Il y a régulièrement des fêtes, des cachets de rexaltium pour être toujours en forme, du travail aux mines de Karka pour les hommes et aux jardins potagers pour les femmes. Les enfants (un seul par famille), vont à l'école jusqu'à 15 ans et rejoignent ensuite les brigades de travail. Nour, qui aura justement bientôt 15 ans, profite des derniers mois qui lui restent en tant qu' «immature».
Depuis toujours elle a été différente : elle n'aime rien de ce qui plaît aux autres. Aux amusements obligatoires, elle préfère se promener seule sur la rive du Fleuve, y faire des photos et fabriquer dans son grenier des boîtes vides. Surtout, elle se pose beaucoup de questions, depuis toujours. Pourquoi ne peut-on pas sortir de Satmine ? Est-ce parce que dehors, c'est la guerre ? Est-ce que les soldats qui patrouillent le long du Fleuve sont là vraiment pour les protéger ? Car c'est autour du Fleuve que semblent se produire des évènements inexpliqués.
Des formes blanches y apparaissent, des explosions sur l'autre rive qu'elle est la seule à entendre. Ses interrogations vont se renforcer au moment d'une crue durant laquelle les habitants sont confinés chez eux. Jusqu'à ce qu'elle décide de franchir le pas, lors de la «dernière nuit de ses doutes».
Née en 1968 à Paris, Hélène Vignal vit à Briard, près de Poitiers. Elle a travaillé dans beaucoup d'endroits différents : librairie, préfecture, mairies, écoles, agences de publicité, centres de vacances, cabinet médical, associations... Elle a publié son premier texte au Rouergue en 2005, Le Grand Concours, et publie depuis dans les différentes collections de romans et d'albums.
Extrait :
J'habite près du Pont, le long du Fleuve. En gros, c'est le quartier le plus pourri de Satmine. En général, les gens préfèrent habiter près de la Mairie. Les immeubles et les maisons du quai tournent le dos au Fleuve et regardent vers le coeur de la ville. Les fenêtres de ce côté-là sont souvent murées ou condamnées. Le Bourgmestre nous met en garde contre les brumes toxiques qui montent de l'eau infectée du Fleuve. Il répète qu'elles sont dangereuses, voire mortelles. Il fait placarder des affiches dans la ville, diffuse des spots à la télé, en parle dans chacun de ses discours et nos parents, nos maîtres, relaient ces messages. Tous les immatures de Satmine sont élevés dans la méfiance du Fleuve. Personne n'aime se promener dans ses alentours, il n'y a rien à voir en dehors des soldats de la force spéciale de protection de Satmine et de leurs chiens qui font des rondes pour empêcher les gens d'approcher de l'eau ou pour prévenir on ne sait trop quelle invasion de l'extérieur.
Les abords du Fleuve n'attirent personne en raison de la puanteur qui s'en dégage. Ce sont des miasmes qui viennent des marécages de l'autre côté du Pont. Quand le vent souffle de l'est, on sent aussi les odeurs de la mine. La seule richesse naturelle ici, c'est le Karka qu'extraient du ventre de la terre tous les hommes de Satmine de quinze à soixante-dix ans. C'est pour cela qu'on vit à Satmine : pour le Karka. C'est un minerai très rare découvert au début du siècle et prisé pour sa résistance aux températures extrêmes. Allié à une infime quantité d'or, il devient impossible à fondre et intéresse tous les États du globe, notamment pour les programmes spatiaux. Les seules mines trouvées à ce jour sont exploitées par les Satminiens. Elles sont assez loin de l'Enclave, et les routes sont dangereuses. C'est pourquoi chaque matin, ce sont des blindés qui emmènent nos pères vers leur travail.
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