Extrait :
LA CRÉATION DU SANCTUAIRE PAR SAINT AUBERT
Dans beaucoup de civilisations, la montagne est un lien entre la terre et le ciel ; elle représente la porte du ciel. Le Mont-Saint-Michel, qui s'élève au milieu de l'immensité rectiligne des grèves, est une montagne sacrée, au même titre que la montagne de Sion ou le mont Sinaï, où l'homme a depuis longtemps été à la rencontre de Dieu. De pieux ermites ont choisi cet endroit sauvage et retiré du monde pour y prier Dieu dès le VIe siècle. Le rocher s'appelait alors mont Tombe, du latin tumba, qui signifie «tumulus» et «tombe».
Selon la tradition, un sanctuaire dédié à l'archange saint Michel y a été édifié par saint Aubert, évêque de la ville voisine d'Avranches, sous le règne du roi Childebert III (695-711). Dans la tradition chrétienne, Michel est l'archange qui terrasse le dragon ; il représente la victoire de la lumière sur les ténèbres. Il est aussi celui qui pèsera les âmes lors du Jugement dernier et emmènera celles des élus au Paradis ; il est donc un intermédiaire très précieux entre les hommes et Dieu. Une nuit de l'an 708, l'archange serait apparu en songe à saint Aubert pour lui demander de construire un sanctuaire en son honneur sur le mont Tombe. Comme le prélat doutait de l'origine divine du songe, saint Michel dut intervenir à trois reprises pour vaincre son incrédulité. Au cours du troisième songe, pour être plus persuasif, l'archange aurait touché le crâne de saint Aubert, y faisant un trou avec son doigt ! En réalité, cette intervention physique de saint Michel n'existe pas dans la tradition primitive ; elle a été ajoutée au XIe siècle, après la découverte sur le Mont d'un crâne percé d'un trou qu'un parchemin aurait authentifié comme étant celui de saint Aubert. Ainsi assuré de l'origine angélique de ses songes, l'évêque fit construire à l'ouest de la pointe du rocher une réplique du sanctuaire italien du mont Gargan, dans les Pouilles, où saint Michel serait apparu dès la fin du Ve siècle. Saint Aubert fit ensuite appel à une communauté de douze religieux, sans doute des chanoines réguliers, pour assurer la garde de la nouvelle église. La renommée du sanctuaire se répandit rapidement. Des pèlerins prirent l'habitude de venir se placer sous la protection de l'archange sur le mont Tombe, qui devint ainsi un centre de pèlerinage ; et l'on ne tarda pas à l'appeler Mont-Saint-Michel, comme s'il éclipsait les autres sanctuaires de l'archange.
Présentation de l'éditeur :
Le Mont-Saint-Michel, cette œuvre architecturale hors du commun, classée au patrimoine mondial de l'UNESCO, déclenche depuis sa création au VIIIe siècle des admirations, voire des dévotions. Né d'une vision, ce site unique au monde a abrité les moines et attiré les pèlerins, connu le temps des guerres, des geôliers et une période de décadence. Mais tout ceci pour mieux renaître au XIXe siècle et reprendre sa place de merveille de l'Occident, faisant succomber sous son charme, architectes, écrivains, voyageurs illustres et nouveaux touristes. Ce sont tous ces témoignages empreints d'émotion qu'Henry Decaëns, grand spécialiste du Mont nous conte dans ses textes auxquels le photographe Didier Goupy apporte son regard, très personnel et sensible.
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