Extrait :
Extrait du prologue
Un jour, ma main gauche s'est mise à trembler.
C'était quelques semaines après la mort de ma mère.
Ma mère avait passé chez moi les deux dernières années de sa vie, dans une cohabitation réussie, bien que nos rapports aient été si tumultueux par le passé.
Elle faisait partie de ces gens qui sont incapables de voir la relativité des points de vue. Pour elle, il existait une vérité, la sienne ; un sens du beau, le sien ; et elle refusait d'en démordre.
Aussi avait-elle toujours su, avec une détermination farouche, ce qu'elle voulait pour moi, qui était l'amour de sa vie (j'étais fille unique et mon père était mort quand j'avais dix-neuf ans).
Devenue nonagénaire, elle avait enfin commencé à mettre un peu d'eau dans son vin, admettant pour la première fois que je semblais heureuse ; que, peut-être même, je l'étais.
Aussi avais-je pu la prendre chez moi, quand il était devenu évident qu'elle ne parvenait plus à fonctionner seule, si indépendante soit-elle.
Je l'avais installée, avec son inséparable télé, dans une petite chambre - jouxtant la cuisine - que mes deux enfants avaient définitivement libérée.
Les derniers mois de sa vie nous avaient apporté leur lot de pipi caca intempestif. La boucle se bouclait. C'était elle le grand bébé, à présent, et il me fallait apprendre à accepter chez ma vieille mère ce qui m'avait semblé si naturel chez mes enfants nouveau-nés.
Finalement, elle était morte dans son lit. J'étais contente d'avoir réussi ce petit exploit. Naître à la maison, mourir à la maison, même combat.
Vivre ces passages dans l'intimité de ceux qu'on aime.
Le tremblement de ma main me semblait lié à la mort de ma mère ; je me mis donc à explorer de ce côté-là.
À sa disparition, le sentiment de deuil m'avait prise par surprise.
Elle avait quatre-vingt-seize ans. Depuis quelques jours, elle s'éteignait sous nos yeux (à nous qui formions avec elle une peu orthodoxe petite famille de quatre personnes, réparties sur quatre générations).
Sa mort était prévisible, attendue. J'avais eu pleinement le temps de m'y préparer. Il me semblait que le travail du deuil était en quelque sorte partiellement accompli.
J'allais découvrir qu'il n'en était rien.
Présentation de l'éditeur :
Un témoignage à coeur ouvert, éminemment féminin, audacieux et captivant. Une stimulante philosophie de l existence.
Ces pages content une belle et singulière histoire d'amour. Comment aimer un homme qui a vingt-cinq ans de moins que soi ? Comment continuer à l'aimer lorsqu'il s'éprend d'une autre femme ? Ce témoignage intime, d'une rare authenticité, qui aborde les drogues comme le sexe sans aucun tabou, nous fait partager un parcours débordant de vie. Au fil de soixante-dix ans d'existence aventureuse, nous accompagnons l'auteure sur les océans, à bord d'un voilier construit de ses mains, ou mettant au monde ses enfants dans la forêt sauvage du Canada. Cet ouvrage relate aussi l'aboutissement d'une quête aux sources de la guérison. Il en résulte une autobiographie inclassable, élégante, d'une portée intemporelle et riche d'enseignements.
A paraître : Livre 4.
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