Extrait :
Extrait de l'introduction :
Étymologiquement, l'économie, du grec oikos (maison, propriété, avoir) nomos (usage, règle de conduite, organisation) signifie l'art de bien administrer une maison. L'économiste est donc à l'origine celui «qui ne s'occupe que de la subsistance» comme l'affirme, au IVe siècle avant J.-C., Aristote dans La Politique. Rares sont les professions qui peuvent prétendre au plus vieux métier du monde (cf. Sylvain Allemand, Comment je suis devenu géographe, 2007) et l'économiste en fait partie à n'en pas douter. Dans les premières sociétés de cueilleurs-chasseurs, il s'est forcément trouvé des hommes et des femmes capables de gérer leur maisonnée. En développant progressivement la connaissance (Logos) de leur territoire et de leurs ressources, ces pionniers deviennent peu à peu maîtres dans l'art de vivre avec leurs proches et leur environnement. L'avènement de l'écriture leur permet de consigner une pensée économique déjà riche et complexe comme en témoignent les lois et les principes économiques exposés dans le code d'Hammourabi (1730 av. J.-C.). D'aucuns considèrent que ce code est le premier document économique écrit. On y trouve des indications sur ce qui revient à l'initiative privée (production, commerce) et ce qui relève de l'État (accords de prêts à faible intérêt, contrôle de la propriété terrienne, entretien des canaux d'irrigation...)
L'économie en tant que telle est définie pour la première fois par une poignée de grands philosophes grecs en marge de leurs oeuvres respectives. Citons Xénophon (426-355 av. J.-C.), élève de Socrate, qui est le premier à employer le terme d'«économie» dans un ouvrage intitulé L'Économique (380 av. J.-C.). L'économiste y est décrit comme celui qui maîtrise l'art de l'administration domestique ainsi que celui de faire croître les richesses. Pour mener à bien l'administration de son domaine (diversifier ses cultures, utiliser les techniques appropriées, diriger ses ouvriers, vendre et acheter au moment adéquat...), il faut avoir recours, selon Xénophon, à des pratiques rationnelles qu'il appelle tantôt épistémè (savoir) tantôt techné (art ou technique). Même si la distinction entre ces deux termes a fait débat entre les philosophes grecs, comment ne pas y voir en germe la distinction moderne entre économistes praticiens et économistes théoriciens ? Dans Les Revenus (355 av. J.-C.), Xénophon déborde le cadre domestique en définissant l'économie comme l'art de satisfaire les besoins de la société dans son ensemble. Dans Les Lois (348 av. J.-C.), la réflexion économique de Platon (427-348 av. J.-C.), autre disciple illustre de Socrate, porte précisément sur la répartition la plus égalitaire possible des ressources dans la société. Il en va de même pour Aristote (384-322 av. J.-C.) qui recherche les moyens de corriger les anomalies et les injustices de la distribution des richesses. Malgré ces réflexions pionnières, l'économiste restera longtemps cantonné à la techné (tâches d'administration, de contrôle, de suivi, de maîtrise des coûts) et il faudra attendre le XVIIIe siècle pour que l'épistémè économique émerge comme objet d'étude spécifique.
En effet, durant la période médiévale, l'Église impose sa morale à la pensée économique : condamnation de l'usure, aide aux plus démunis, rejet de l'esprit spéculatif... En Europe, les théologiens sont les principaux penseurs des questions économiques. Les réflexions économiques de Thomas d'Aquin (1228-1274), par exemple, sur la fixation de «prix justes» et sur la nature de la monnaie sont explicitement destinées aux confesseurs afin de leur permettre d'identifier les cas de fraudes liées aux activités marchandes.
En Orient, des penseurs s'interrogent également sur la formation des prix, mais également sur les relations entre la population et la croissance économique. Le philosophe et historien tunisien Ibn Khaldun (1332-1406) est représentatif de ce courant de pensée. Il montre, dans ses Prolégomènes (1374) que la densité de population n'est pas sans impact sur la division du travail et l'essor économique, ce dernier rétroagissant à son tour sur la densité de population.
Présentation de l'éditeur :
Etymologiquement, l'économiste est celui qui a pour tâche de bien administrer la maison. Il est aussi celui qui fait croître les richesses et est donc, à ce titre, souvent proche du pouvoir.
Occupant une place centrale dans la vie de la Cité d'hier et du «village mondial» d'aujourd'hui, il n'en reste pas moins souvent incompris. «Abscons comme un discours d'économiste» avait-on déjà coutume de dire au XVIIIe siècle ! Gageons que les 12 économistes réunis ici sauront éclairer cette discipline que la plupart ont choisie en réponse à leur ambition de comprendre les mécanismes sociaux et leur souhait d'être utiles à la société.
DERRIÈRE CHAQUE DISCIPLINE SE TROUVENT DES FEMMES ET DES HOMMES QUI LA CONSTRUISENT, LA FONT VIVRE ET ÉVOLUER. COMMENT DEVIENT-ON GÉOGRAPHE, ÉCONOMISTE, ASTROPHYSICIEN, ARCHÉOLOGUE... ? DOUZE PORTRAITS EN FORME D'ENTRETIENS, DOUZE PARCOURS DE VIE EN REVELENT LE CHEMINEMENT. DU CURSUS AUX RENCONTRES CLÉ, EN PASSANT PAR LES APPORTS MAJEURS DE CHACUN, «COMMENT JE SUIS DEVENU...» EST, CHAQUE FOIS, UNE INVITATION A LA DÉCOUVERTE VIVANTE ET ÉCLECTIQUE D'UNE DISCIPLINE.
UNE COLLECTION CONÇUE ET DIRIGÉE PAR SYLVAIN ALLEMAND.
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