Extrait :
La crise que connaît notre système de santé et de protection sociale révèle les faiblesses d'un dispositif par ailleurs classé, à tort ou à raison, parmi les meilleurs du monde. Elle traduit en même temps les mutations liées au développement des progrès médicaux, à des évolutions démographiques - au premier chef l'allongement de la longévité-, à l'essor de la prévention, ainsi qu'à la perspective et aux conséquences d'une médecine de plus en plus ciblée.
PAUL BENKIMOUN : Le secteur de la santé est aujourd'hui en pleine agitation. Depuis des années, les crises de la Sécurité sociale se succèdent avec des déficits abyssaux non maîtrisés. Les hôpitaux et, depuis quelques années, le secteur de la médecine libérale connaissent des conflits à répétition. Dans ce contexte, comment voyez-vous l'évolution de ce secteur ?
DIDIER TABUTEAU : Il est toujours difficile de se projeter dans l'avenir. Mais l'exercice de prospective est encore plus aléatoire lorsque le secteur en cause connaît une crise d'identité profonde. Et c'est bien le cas pour la santé. Après la période faste des Trente Glorieuses, qui a permis de financer une Sécurité sociale instituée en 1945, la transition est brutale. Pendant 30 ans, nous avons construit des hôpitaux au point de doubler le parc hospitalier et accru de façon spectaculaire le nombre des médecins libéraux, dont l'effectif a été multiplié par six. Tout cela, sans véritablement nous soucier ni du coût, ni de la qualité du système de santé. Il y avait tant à faire. Les progrès de la médecine et de la protection sociale ont transformé notre approche de la maladie. Nous sommes parvenus peu ou prou à mettre à disposition de l'ensemble de la population la plupart des avancées médicales et des traitements efficaces. C'est ce constat, ô combien singulier, qui doit être le point de départ de toute réflexion. À l'exception de l'Europe, du Canada, du Japon et en partie des Etats-Unis, peu de pays connaissent cette situation. La donne est aujourd'hui en plein changement.
Présentation de l'éditeur :
La médecine fait des progrès constants. Bonne nouvelle, dira-t-on. Oui, mais quelles en sont les conséquences ? Vieillissement de la population, augmentation de la dépendance, développement des soins préventifs, modification de la consommation des soins, évolution des métiers médicaux et paramédicaux... Et surtout, quel en est - et quel en sera à l'avenir - le coût pour soi et pour le système de protection sociale ? En effet, au-delà du problème concret d'adaptation des institutions sanitaires et des assurances santé, c'est la conception même de la médecine et des soins qui est désormais en question. Quelles sont les limites des progrès médicaux, tant en matière de soins que de prévention ? Comment notre système de santé (des hôpitaux à la médecine de ville et aux caisses d'assurance maladie) va-t-il réagir à ces nouvelles données ? Jusqu'où, d'ailleurs, doit-il s'adapter ?
C'est à ces problématiques, ainsi qu'à bien d'autres questions qui concernent la société dans son ensemble et chacun en particulier, que répond Didier Tabuteau, expert des questions de santé.
Les informations fournies dans la section « A propos du livre » peuvent faire référence à une autre édition de ce titre.