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Tout le monde connaît l'histoire du Petit Poucet. Dans ce conte, chacun se souvient de la maison de l'ogre et de ses filles, les ogresses, qui finissent par se faire égorger au milieu de la nuit. Poucet, pour les grands s'inspire de ce moment précis : la rencontre de Poucet avec ces ogresses et en particulier avec la plus jeune qui ne mange pas de viande et passe ses journées à lire des livres : une ogresse résiliente en quelque sorte ! Comme elle a beaucoup lu, le jour où elle rencontre Poucet, elle reconnaît l'histoire... et sait ce qui va lui arriver au milieu de la nuit... La pièce Poucet, pour les grands nous parle de la possibilité pour chacun d'échapper à son destin. Elle évoque les pères dont on ne sait pas tout , les mères soumises ou complices... et les petites filles qui tracent leur chemin au milieu de ces embûches, pour grandir et réussir malgré tout à s'envoler.
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Extrait :
Rencontre au bord de la grande forêt
C'est le soir, il fait dota et presque nuit. A l'orée de la clairière se trouve une mare. Au bord de cette mare, une jeune fille, un livre à la main. Elle porte une jolie robe ; sur sa tête, une couronne. Depuis un bon moment le hibou répond au crapaud mais elle n'entend pas. Du bois, sort un jeune garçon en guenilles. Il est petit, porte un bonnet et semble de très mauvaise humeur. Pourtant, elle n 'a pas peur.
Poucet : Pourquoi tu me regardes ?
L'ogresse :...
Poucet : Tu trouves que je suis sale ? L'ogresse : Non.
Poucet : Tu trouves que je suis pauvre ? L'ogresse : Non.
Poucet : Tu trouves que je suis petit ? L'ogresse : Non.
Poucet : Alors pourquoi tu me regardes ?
L'ogresse : Je ne sais pas. (Poucet continue son chemin) Ne trouves-tu pas que j'ai le nez crochu, les dents pointues et tout écartées dans une trop grande bouche et mes yeux, regarde bien mes yeux, ne les trouves-tu pas tout gris et bien trop rapprochés, là, exactement là, qu'on dirait qu'ils vont se rejoindre par-dessus mon nez ?
Poucet (après l'avoir attentivement observée) : Non. Je ne vois pas, non.
L'ogresse : Et cette couronne, ne la trouves-tu pas ridicule ?
Poucet : Moi, j'ai un bonnet.
L'ogresse : Il n'est pas ridicule, ton bonnet.
Poucet : Qu'est-ce que tu fais au bord de cette mare ?
L'ogresse : Quand je suis triste, c'est là que je viens. Je suis souvent triste, alors je passe beaucoup de temps ici. Parfois je découvre des mystères au fond de l'eau. C'est un joli endroit. Et toi ?
Poucet : Je suis avec mes frères et nous sommes perdus dans la forêt. J'ai vu une maison par ici, je vais les chercher, il nous faut un abri pour la nuit. Que se passe-t-il ? Quelle tête tu fais !
L'ogresse : Je sais qui tu es.
Poucet : Ça m'étonnerait...
L'ogresse : Tu t'appelles Poucet.
Poucet : Tu connais mon nom ? Je ne t'ai jamais vue.
L'ogresse : J'ai lu notre histoire.
Poucet : Notre histoire ?
L'ogresse : C'est à ne pas croire : j'ai lu ce livre qui raconte ton histoire et je suis dedans. Nous sommes dans la même histoire.
Poucet : Ça m'étonnerait. Tu es bien habillée, tu portes une couronne et moi je suis un fils de pauvres paysans, un fils abandonné...
L'ogresse : Deux fois.
(Elle sème quelques cailloux blancs autour de la mare)
Première fois.
Biographie de l'auteur :
C'est le soir, il fait dota et presque nuit. A l'orée de la clairière se trouve une mare. Au bord de cette mare, une jeune fille, un livre à la main. Elle porte une jolie robe ; sur sa tête, une couronne. Depuis un bon moment le hibou répond au crapaud mais elle n'entend pas. Du bois, sort un jeune garçon en guenilles. Il est petit, porte un bonnet et semble de très mauvaise humeur. Pourtant, elle n 'a pas peur.
Poucet : Pourquoi tu me regardes ?
L'ogresse :...
Poucet : Tu trouves que je suis sale ? L'ogresse : Non.
Poucet : Tu trouves que je suis pauvre ? L'ogresse : Non.
Poucet : Tu trouves que je suis petit ? L'ogresse : Non.
Poucet : Alors pourquoi tu me regardes ?
L'ogresse : Je ne sais pas. (Poucet continue son chemin) Ne trouves-tu pas que j'ai le nez crochu, les dents pointues et tout écartées dans une trop grande bouche et mes yeux, regarde bien mes yeux, ne les trouves-tu pas tout gris et bien trop rapprochés, là, exactement là, qu'on dirait qu'ils vont se rejoindre par-dessus mon nez ?
Poucet (après l'avoir attentivement observée) : Non. Je ne vois pas, non.
L'ogresse : Et cette couronne, ne la trouves-tu pas ridicule ?
Poucet : Moi, j'ai un bonnet.
L'ogresse : Il n'est pas ridicule, ton bonnet.
Poucet : Qu'est-ce que tu fais au bord de cette mare ?
L'ogresse : Quand je suis triste, c'est là que je viens. Je suis souvent triste, alors je passe beaucoup de temps ici. Parfois je découvre des mystères au fond de l'eau. C'est un joli endroit. Et toi ?
Poucet : Je suis avec mes frères et nous sommes perdus dans la forêt. J'ai vu une maison par ici, je vais les chercher, il nous faut un abri pour la nuit. Que se passe-t-il ? Quelle tête tu fais !
L'ogresse : Je sais qui tu es.
Poucet : Ça m'étonnerait...
L'ogresse : Tu t'appelles Poucet.
Poucet : Tu connais mon nom ? Je ne t'ai jamais vue.
L'ogresse : J'ai lu notre histoire.
Poucet : Notre histoire ?
L'ogresse : C'est à ne pas croire : j'ai lu ce livre qui raconte ton histoire et je suis dedans. Nous sommes dans la même histoire.
Poucet : Ça m'étonnerait. Tu es bien habillée, tu portes une couronne et moi je suis un fils de pauvres paysans, un fils abandonné...
L'ogresse : Deux fois.
(Elle sème quelques cailloux blancs autour de la mare)
Première fois.
Gilles Granouillet, après avoir exercé différents métiers, a fondé en 1989 la compagnie Travelling Théâtre. Traduit et monté dans une dizaine de pays, il a été auteur associé au CDN de Saint-Etienne pendant plus de dix ans. La plupart de ses pièces sont publiées chez Actes Sud/Papiers, Lansman, Espace 34 et L'avant-scène Théâtre.
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- ÉditeurLansman
- Date d'édition2012
- ISBN 10 2872829105
- ISBN 13 9782872829101
- ReliureBroché
- Nombre de pages48
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