Extrait :
Extrait de l'introduction
Les aventures de la musique de film
Beaucoup d'images de cinéma sont indissociables de leur musique. Une conjonction qui tient de l'alchimie. Comment est née l'étincelle qui a produit cette fusion ? A quel moment la partition est-elle venue se marier aux plans tournés ? Quel processus a-t-il permis aux cinéastes et aux compositeurs d'unir leurs talents ?
La rencontre peut se faire par hasard ou naître d'une admiration partagée. Ils ont pu débuter ensemble dans l'inconscience de la jeunesse, ou se faire profiter mutuellement des acquis de l'expérience. Cinéastes et compositeurs travaillent parfois main dans la main avec d'incessants allers-retours, ou aiment au contraire découvrir à chaque fois le travail de l'autre avec l'excitation - parfois l'anxiété - d'un rendez-vous à l'aveugle...
Toutes les combinaisons sont autorisées, et elles sont évoquées à travers les témoignages recueillis dans cet ouvrage.
La parole est d'abord donnée à des compositeurs seuls, et pas des moindres. Dans un fructueux dialogue avec son ami musicologue Sergio Miceli, Ennio Morricone répond notamment à ceux qui lui ont reproché la surabondance de sa production. Il raconte que le résultat que l'on entend dans ses «grands films» est peut-être issu de recherches ou d'expériences tentées dans des films moins renommés. Il prend d'ailleurs une position assez peu courante en distinguant le travail du compositeur dans les films à forte attente commerciale, pour lesquels il se soumet sans rechigner aux contraintes, des oeuvres artistiquement exigeantes qui lui permettent plus de liberté créatrice.
Quelle est la «musique juste» pour accompagner un film donné ? Morricone se garde bien de répondre, de même que Vladimir Cosma, pour qui musique et cinéma sont des arts autonomes, qui n'ont pas foncièrement besoin l'un de l'autre, mais dont la conjonction peut aboutir à une transcendance mutuelle. 11 ne justifie pas plus qu'il ne déplore qu'un cinéaste préfère une musique préexistante : «Personnellement, je trouve qu'il n'y a aucun lien précis entre la musique et l'image», affirme-t-il paradoxalement, mais la musique, quand elle ne se contente pas d'être platement fonctionnelle (le «papier peint» sur un mur dont parlait Stravinski), est capable d'apporter «une expression poétique supplémentaire» (un tableau accroché au mur ?)
Ce qui est frappant, avec Carter Burwell, compositeur attitré de Joël et Ethan Coen, c'est la façon dont il a appris son métier, en parallèle avec les deux frères, et qui l'a conduit progressivement à un cinéma plus mainstream (la série des Twilight). Sans le cinéma, il n'aurait sans doute jamais pris de cours de solfège, d'orchestration ou de direction d'orchestre ! Outre la modestie de ses propos, son témoignage pourrait être utile à beaucoup d'étudiants ou d'enseignants de musique, qui ont tendance, heureusement de plus en plus rarement, à considérer la musique pour l'image avec «un peu de mépris», selon les mots de Morricone. Quant à Alberto Iglesias, le musicien de Pedro Almodovar, mais aussi de Julio Medem et d'Icíar Bollain, il est l'un des rares artistes à accepter généreusement de partager sa méthode de travail, définissant les «dix commandements» qui l'aident à composer pour le cinéma, et éventuellement à surmonter ses blocages, sous forme de dualités : «énoncer / cacher ; confirmer / transgresser ; préparer / résoudre ; symétrie / asymétrie ; énoncer / métaphoriser ; thèmes / variations ; similitude / différence ; additionner / soustraire ; prévenir / confirmer ; convergence / divergence».
Présentation de l'éditeur :
Beaucoup d'images de cinéma sont indissociables de leur musique. Une conjonction qui tient de l'alchimie. Comment est née l'étincelle qui a produit cette fusion ? À quel moment la partition est-elle venue se marier aux plans tournés ? Quel processus permet aux cinéastes et aux compositeurs d'unir leurs talents ? Nous leur donnons ici la parole.
Sont explorés dans cet ouvrage les grands élans et la petite cuisine, les moments d'enthousiasme et les tiraillements du doute, tout ce qui constitue la collaboration entre un metteur en scène et un musicien, avant de parvenir à « l'accord parfait ». Ces passionnants témoignages racontent l'aventure de la création : ils intéresseront autant le spécialiste que le profane. Nous espérons aussi qu'ils incitent les jeunes cinéastes de demain à être encore plus mélomanes, et les compositeurs plus cinéphiles, afin de poursuivre le chemin tracé par ces artistes.
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