Présentation de l'éditeur :
À vingt-deux ans, il passait pour l'égal de César et d'Alexandre. De 1643 à 1648, durant la guerre franco-espagnole, il accumula les exploits et devint l'idole de la jeune noblesse d'épée. Il avait tout, naissance et fortune. Il ne lui manquait que d'être roi. Se croyant tout permis, il rejetait obstacles et interdits et cultivait le scandale.
L'action politique, où il s'engagea imprudemment, fut son talon d'Achille. Il soutint d'abord Anne d'Autriche et Mazarin lorsque les magistrats déclenchèrent contre eux la Fronde parlementaire. Mais pour prix de ses services, il montra une telle arrogance et afficha des prétentions si outrées qu'elles lui valurent une année de prison. A sa sortie, il se jeta dans une guerre civile qu'il perdit et, plutôt que de s'incliner, il alla mettre son génie militaire au service des Espagnols, sans pouvoir empêcher leur défaite finale.
De retour après la paix des Pyrénées, il se résigna à n'être qu'un homme privé, dans une France qui avait profondément changé. Il opéra alors une extraordinaire mutation psychologique et morale, faisant de son domaine de Chantilly un haut lieu de culture, de tolérance et de paix.
A travers l'histoire d'un héros, ce livre invite à réfléchir à la gloire, à ses enjeux, à ses dérives. En arrière-plan, il évoque, avec la régente, Gaston d'Orléans, Mazarin, Turenne et le jeune Louis XIV, les grandes figures d'une époque où les derniers sursauts de l'esprit féodal s'effacent pour laisser place à la France moderne.
Bien que solidement documenté et non romancé, il s'anime sous la plume alerte de Simone Bertière de plaisantes anecdotes et se colore d'humour.
Après avoir enseigné la littérature comparée Simone Bertière s'est consacrée, via l'étude des mémorialistes, à l'histoire des mentalités. Elle a publié une Vie du cardinal de Retz et une édition commentée de ses Mémoires, puis elle a entrepris d'évoquer en une vaste fresque la condition des reines dans la France des Temps Modernes. Le premier volume des «Reines de France au temps des Valois», Le Beau XVIe siècle, est paru en 1994 et le second, Les Années sanglantes, en 1995. En 1996 paraît le premier volume des «Reines de France au temps des Bourbons» : Les Deux Régentes (Grand Prix d'Histoire Chateaubriand - La Vallée aux loups). Viendront ensuite Les Femmes du Roi-Soleil (1998), La Reine et la favorite (2000) et en 2002 le quatrième et dernier volume : Marie-Antoinette l'insoumise (Grand Prix de la Biographie de l'Académie française, Prix des Ambassadeurs, Prix des Maisons de la Presse).
En 2004 paraît Apologie pour Clytemnestre. En 2007 Mazarin, le maître du jeu (Grand Prix de la Biographie de la revue Lire). En 2009 Dumas et les Mousquetaires. Histoire d'un chef-d'oeuvre.
Extrait :
UNE FAMILLE DE REBELLES
L'éclat de la carrière du Grand Condé tend à en occulter les fondements. Mais le jeune guerrier qui surgit à Rocroi n'est pas issu de nulle part. Il est un maillon d'une lignée, le fils d'un père rongé de frustrations qui voit en lui l'instrument de sa revanche. Il s'adosse à une vaste parentèle, dont il porte les espérances de fortune. Sa conduite obéit donc initialement à des impératifs familiaux, auxquels il se pliera de nouveau plus tard pour assurer l'avenir de son fils. Pour le mieux connaître, un détour du côté des ancêtres ne sera donc pas superflu.
C'est à l'ombre du trône que furent élevés les deux parents du futur héros, Henri II de Bourbon, prince de Condé, et Charlotte-Marguerite de Montmorency. Difficile de réunir des origines plus prestigieuses. Le père, fils d'un cousin germain du roi, véhiculait dans son sang quelques précieuses gouttes de celui de saint Louis. La mère pouvait afficher dans son ascendance la plupart des grands noms ayant marqué l'histoire de France. Ils étaient d'âge et de condition assortis. Selon la stratégie présidant aux mariages princiers, leur union paraissait aller de soi. Mais derrière cette brillante façade se cachait une réalité beaucoup moins reluisante. Henri de Condé était le dernier rejeton d'une lignée qui s'était engagée à fond dans le parti huguenot lors des guerres de religion, s'y était couverte de gloire, mais ruinée. Un drame familial avait achevé de faire de lui un semi-réprouvé, qui ne trouvait pas sa place dans la France réconciliée d'Henri IV. Ayant opté pour la politique du pire, il aggravait son cas en multipliant les provocations. Mais il conservait l'orgueil de son rang et avait pour idée fixe de remonter la pente et de rendre à son nom l'éclat initial.
Son mariage avec une Montmorency aurait pu - aurait dû même - constituer une première étape dans son ascension, si d'inavouables calculs du roi n'étaient pas venus le vicier au départ.
Après son grand-père et son père, Henri II de Condé commença donc par inscrire un chapitre de plus dans l'histoire des rébellions chères à sa lignée.
La malédiction des cadets
La famille dont il portait le nom était la fois très ancienne et très récente. Très ancienne parce qu'elle remontait au sixième fils de saint Louis, Robert, comte de Clermont, fondateur de la maison de Bourbon - du nom d'une des seigneuries qu'il détenait. Très récente, parce qu'elle n'était qu'un rameau adventice poussé tardivement sur cette tige. Son émergence en tant que maison nobiliaire autonome ne datait que d'une cinquantaine d'années. Elle était l'oeuvre de Louis de Bourbon, premier prince de Condé. Les Bourbons sont des cadets. Situation inconfortable, tant il est difficile d'admettre que quelques années de distance dans l'ordre de naissance suffisent à créer un gouffre entre un aîné, qui est roi, et son frère, qui n'est que le premier de ses sujets. Au coeur de tous les cadets sommeille une frustration d'autant plus forte que l'écart avec les aînés est plus mince.
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